Pourquoi est-ce qu’on aime souffrir en trail ?
« Ceux qui dansaient furent considérés comme fous par ceux qui ne pouvaient entendre la musique ». Cet aphorisme de Nietzsche est quelque chose que j’ai toujours trouvé absolument sublime, tant dans sa forme que dans le fond. En le lisant, il trouve forcément un écho particulier dans notre pratique du trail, et plus particulièrement dans notre rapport à la souffrance.
Ceux qui ne font pas d’ultra regarderont toujours d’un œil bizarre ceux qui en font. Tout simplement parce qu’ils ne savent pas pourquoi on aime souffrir en trail. Bon, je dois bien avouer que je me pose aussi la question parfois. Après une soixantaine de kilomètres parcourus (je dis le chiffre au hasard), on va avoir un temps faible, on va commencer à avoir mal et forcément, la question fatidique : « qu’est-ce que je fous là ? » ou encore « pourquoi je me suis dit que j’allais aimer souffrir ? » Alors, pourquoi est-ce qu’on aime souffrir en trail ? Tentative de réponses…
En trail, le plaisir après la souffrance
Souffrir pour le plaisir ?
A moins d’avoir une nature un peu masochiste, c’est rarement le cas. Je ne juge certainement pas ceux pour qui ce serait le cas. Je dis juste que le plaisir vient après la souffrance, qu’il en est la conséquence plutôt que la cause.
Le trail, le plaisir hors de la routine
Parce qu’on s’ennuie dans nos vies ?
Un article assez potache sur la forme, mais que je trouvais pertinent sur le fond, et qui s’appelait « le running est-il un sport de blanc qui s’emm*** ? » avançait cette théorie. Au-delà de l’aspect provocation, l’auteur avançait l’idée que dans les carrières à l’occidentale, les employés de bureau et les cadres avaient un quotidien chiant et qu’ils allaient se défouler et se faire mal dans le sport.
En trail, le plaisir dans l’estime de soi
Pour se prouver quelque chose
Parce qu’on souffre tous quasi naturellement d’un déficit de confiance en nous, on (les traileurs) va toujours essayer de trouver des stratégies dans nos vies pour se prouver qu’on n’est pas inférieurs aux autres, qu’on n’a pas forcément à rougir face à nos semblables. Courir des ultras peut aider, jusqu’au moment où on se rend compte que ça n’a pas eu l’effet escompté.
Le trail, le plaisir dans la performance
S’il y a bien une vérité quasi universelle dans le sport (et donc dans le trail), c’est que si on veut performer, il faut s’entraîner, répéter ses gammes inlassablement sur des pistes d’athlétisme ou sur des côtes. Et ça va demander de la souffrance, beaucoup de souffrance. Mais celle-ci peut être plaisir à partir du moment où elle constitue un moyen en vue d’une fin, qui sera ici d’être performant, ou a minima de franchir la ligne d’arrivée de notre défi.
Le trail, le plaisir dans la connaissance de soi
Pour se connaître
On dit en général qu’on connaît la nature des personnes quand elles occupent des postes où elles deviennent des supérieurs hiérarchiques et/ou quand elles sont dans la souffrance. Et quand on fait de l’ultra, le moins que l’on puisse dire, c’est que l’on va souffrir. C’est quand on sera au fond du fond du fond du trou (oui, au moins trois fois au fond) qu’on verra ce qu’on a dans le ventre, que la fatigue sera tellement forte que notre inconscient ne pourra plus nous permettre de nous dérober.
En d’autres termes, la souffrance fait s’envoler bien des barrières et nous offre l’opportunité de savoir qui on est, ou ce qu’on vaut.
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