Plus de plaisir, moins d’ultra ? Le trail se recentre sur des formats plus courts.
Le trail est souvent associé à l’ultra-distance, aux défis extrêmes et aux courses qui repoussent les limites de l’endurance humaine. Pourtant, une tendance se dessine depuis plusieurs années : la majorité des traileurs privilégient désormais les formats plus courts, compris entre 20 et 45 kilomètres. Ce constat remet en question l’image véhiculée par les médias et pose une question centrale : le plaisir ne serait-il pas la clé d’une pratique plus durable du trail ?
ultra # trails courts : pourquoi les formats courts séduisent de plus en plus de traileurs ?
Si l’ultra-trail est une discipline fascinante, elle reste exigeante. L’engouement croissant pour des formats plus courts repose sur plusieurs raisons :
1. Moins de fatigue, plus de régularité
L’ultra-trail impose des charges d’entraînement importantes et un effort intense le jour de la course. Il est souvent suivi d’une longue période de récupération qui peut ralentir la progression et augmenter le risque de blessure.
Les courses de 20 à 45 km, en revanche, permettent de :
- Maintenir une fréquence de course plus régulière (participer à plusieurs courses par an sans s’épuiser).
- Éviter le surentraînement et la fatigue chronique qui guette de nombreux ultra-traileurs.
- Préserver son corps et limiter les traumatismes liés aux longues distances.
Le risque de syndrome du surentraînement, qui touche de nombreux athlètes d’ultra, est ainsi réduit, et la motivation reste plus stable tout au long de l’année.
2. Une accessibilité plus large pour les amateurs
L’ultra nécessite un entraînement spécifique, un équipement adapté et une logistique complexe (gestion de l’alimentation, des drop bags, des pauses stratégiques, etc.). Pour les coureurs amateurs, cela peut être une contrainte trop lourde.
À l’inverse, les courses plus courtes permettent une participation plus spontanée, avec moins de préparation en amont et une charge mentale allégée. Moins de pression, plus de plaisir.
De plus, sur des distances de 20 à 45 km, les barrières horaires sont moins strictes, rendant ces courses plus accessibles aux coureurs de niveau intermédiaire.
3. Une expérience plus intense et variée
Paradoxalement, courir un ultra peut parfois devenir monotone : une gestion prudente de l’effort oblige souvent à réduire l’intensité et à éviter de trop forcer.
Sur des distances plus courtes :
- L’intensité est plus élevée, ce qui permet de vivre des sensations plus fortes.
- Le rythme de course est plus dynamique, favorisant le dépassement de soi sans tomber dans l’épuisement.
- Les terrains variés sont mieux exploités, avec des parcours souvent plus techniques et nerveux.
Au lieu de subir un ultra, on profite pleinement de chaque kilomètre.
Le mythe de l’ultra comme aboutissement du trail : une remise en question ?
Pendant longtemps, l’ultra-trail a été présenté comme l’ultime objectif de tout traileur. Beaucoup se sont lancés dans cette discipline en pensant qu’il fallait obligatoirement évoluer vers des distances toujours plus longues.
Or, cette vision est en train de changer. De plus en plus de coureurs réalisent qu’il est possible de :
- S’épanouir sans courir 100 km ou plus.
- Progresser en trail sans forcément viser des formats extrêmes.
- Garder du plaisir sur le long terme, sans s’user prématurément.
Même certains élites, comme Kilian Jornet ou François D’Haene, reconnaissent l’importance de la diversité dans leur pratique. Ils alternent entre des formats courts et longs pour éviter la monotonie et préserver leur motivation.
Le trail n’a pas besoin d’être une quête du toujours plus long. Il peut être une quête du toujours plus plaisant.
Vers une meilleure longévité dans la pratique du trail
L’un des aspects les plus intéressants de cette tendance est la notion de pérennité. Beaucoup de traileurs qui s’attaquent trop tôt à l’ultra finissent par accumuler des blessures ou perdre la motivation.
Les formats plus courts permettent :
- De durer plus longtemps dans le sport, sans épuiser ses ressources physiques et mentales
- De garder un plaisir intact, sans tomber dans l’obligation de performer à tout prix.
- D’éviter l’usure prématurée, notamment sur les articulations, les tendons et la fatigue musculaire.
De nombreux traileurs, après une période où ils se sont focalisés sur l’ultra, reviennent aux distances intermédiaires en constatant qu’ils y prennent finalement plus de plaisir et qu’ils progressent mieux.
Une tendance de fond dans le trail ?
Les chiffres et les études scientifiques montrent que le trail se démocratise et que les traileurs recherchent avant tout le plaisir.
Loin des images spectaculaires des ultras médiatisés, la majorité des pratiquants trouvent leur bonheur sur des distances plus raisonnables. Moins de fatigue, plus d’accessibilité, une meilleure régularité dans l’entraînement et une pratique plus durable : les arguments en faveur des formats courts sont nombreux.
Alors, faut-il forcément courir un ultra pour être un « vrai » traileur ? Clairement, non.
L’avenir du trail pourrait bien être celui d’une pratique plus équilibrée, où le plaisir et la longévité l’emportent sur la course à la performance extrême
Une évolution confirmée par les études scientifiques
Les recherches scientifiques sur l’impact de la distance et de l’intensité sur la longévité des athlètes confirment cette tendance. Une étude publiée dans le Journal of Strength and Conditioning Research (Millet et al., 2020) montre que les coureurs d’ultra-trail présentent un taux de blessures plus élevé que ceux pratiquant des distances plus courtes. Parmi les principales causes identifiées, on retrouve la fatigue musculaire excessive, le stress articulaire chronique et les déficits énergétiques prolongés, qui augmentent le risque de fractures de fatigue et de déséquilibres hormonaux (Hoffman et al., 2014, Sports Medicine).
De plus, une analyse réalisée par Schutz et al. (2022) dans la revue Frontiers in Physiology met en avant que les coureurs évoluant sur des distances modérées (20 à 45 km) conservent une meilleure stabilité biomécanique et une fréquence cardiaque plus stable sur le long terme. Ces données suggèrent qu’un entraînement basé sur des courses intermédiaires permettrait de maintenir une pratique plus durable et de limiter les risques liés à l’épuisement physiologique observé chez certains ultra-traileurs.
Enfin, des chercheurs de l’université de Calgary (Journal of Applied Physiology, 2021) ont démontré que les traileurs pratiquant régulièrement des courses de 20 à 40 km maintiennent une meilleure adaptation neuromusculaire que ceux engagés dans des formats plus longs, où la fatigue altère progressivement les réflexes et la coordination. Ces résultats viennent confirmer que le choix des distances peut jouer un rôle déterminant dans la performance et la longévité des coureurs en trail.
Ces études renforcent l’idée que courir moins long mais de manière plus régulière pourrait être la clé d’une pratique plus saine et plus durable.
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