Le sport, c’est la santé !
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interdire le trail aux dépressifs ?
On entend régulièrement que :
« L’activité physique est fortement recommandée pour prévenir des pathologies chroniques et contribuer au traitement d’un très grand nombre d’affections de longue durée comme le diabète, le cancer, ou l’obésité, mais également les maladies neurodégénératives et psychiatriques. »
En effet, le ministère des Sports précise sur son site internet :
« Lorsqu’on pratique une activité sportive, le corps sécrète des hormones telles que l’endorphine, la dopamine ou l’adrénaline, qui permettent de réduire le stress, d’améliorer la qualité du sommeil, de diminuer les douleurs et d’agir comme un antidépresseur. C’est donc avant tout une source de plaisir. »
Le sport apparaît donc comme un excellent traitement contre la dépression. Il aide à retrouver chimiquement un peu de plaisir, à ne pas rester enfermé dans ses pensées (le mouvement du corps favorise aussi celui des idées), tout en permettant de maintenir du lien social et de retrouver un contact extérieur. L’immersion dans la nature joue également un rôle apaisant et ressourçant. Cependant, le trail est-il vraiment un sport comme les autres ? Autoriser des personnes souffrant de dépression à pratiquer cette discipline soulève plusieurs interrogations.
Une question de prudence
Sur le site de la célèbre marque de trail Salomon, on trouve cette définition :
« Le trail se définit simplement comme la pratique de la course à pied en pleine nature. C’est un sport complet qui […] demande concentration et prudence. »
Or, les personnes souffrant de dépression sont souvent prisonnières de leurs pensées, envahies par des angoisses, et leur capacité de concentration est l’un des principaux symptômes touchés. Sauront-elles suivre un itinéraire ? Ne pas se mettre en danger ? Évaluer leur effort ? Penser à s’alimenter et à s’hydrater ?
Une question de compétitivité
L’esprit trail repose sur des valeurs de solidarité, de partage et d’entraide. Mais à l’heure actuelle, où il faut déjà batailler pour obtenir un simple dossard à une course de village, où tout le monde se presse dès la ligne de départ pour éviter les ralentissements, et où les performances sur Strava deviennent un véritable gage de sérieux… La réalité peut être bien différente.
Les personnes souffrant de dépression pourront-elles gérer cette compétitivité ? Ne risquent-elles pas de percevoir cela comme une pression supplémentaire ? Et si elles ne parviennent pas à suivre le rythme, cela pourrait-il aggraver leur état en renforçant un sentiment d’échec ?
Le trail, c’est aussi une recherche de dépassement de soi… et des autres. On le voit bien avec la prolifération des courses basées sur le concept du « dernier homme debout ». Alors, y a-t-il vraiment de la place pour des personnes limitées par leur dépression, qui pourraient s’effondrer en larmes au beau milieu d’un sentier ? Imaginez l’impact sur l’empathique coureur qui se retrouverait à ce moment-là, devant sacrifier quelques précieuses secondes pour sortir un paquet de mouchoirs… Les classements pourraient en être chamboulés. Dans cet univers marqué par la compétition, reste-t-il encore une place pour les plus fragiles ?
Une question de sécurité
En pleine course, les coureurs sont souvent confrontés à des moments de doute, de faim, de soif, de froid ou de chaud. On entend souvent dire : « Cette course, je l’ai terminée au mental. » Mais que se passe-t-il quand ce « mental » fait défaut, affaibli par la dépression ? Quels sont les risques encourus ?
Le risque ultime reste l’accident (volontaire ou non). En montagne, la présence de falaises, de sentiers dangereux ou de passages exposés peut amplifier ce danger. Un accident pourrait entraîner l’arrêt d’une course et la mobilisation des secours, qui, rappelons-le, sont désormais payants dans certaines zones. Qui en assumerait le coût ? La famille du coureur ? L’organisateur ? Le médecin qui a validé le certificat médical ? Cela pose une question délicate, à l’image d’autres situations similaires dans la société.
Ce débat reste ouvert. Peut-être serait-il plus raisonnable que les personnes souffrant de dépression se limitent à des courses sur route ou à des distances plus courtes, comme un 10 km. Après tout, cela suffit amplement pour atteindre les fameux 10 000 pas quotidiens recommandés
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- Je m’attendais à souffrir beaucoup plus ». Quelle insolence de ce jeune raideur !