Record du marathon vs record de l’UTMB : deux mondes, deux chronos
On pourrait croire qu’un record est un record, quel que soit le terrain. Mais comparer un record sur marathon à un record sur l’UTMB, c’est comme comparer un 100 mètres en ligne droite à un parcours d’obstacles en montagne. Pourtant, les deux disciplines partagent une obsession commune : aller toujours plus vite, et repousser les limites du corps humain.
Les chiffres : 2h00 en marathon vs 19h37 pour le record de l’UTMB
Le record officiel du marathon est actuellement de 2h00min35s, établi par Kelvin Kiptum lors du marathon de Chicago en 2023. À l’inverse, le record de l’UTMB est détenu depuis 2024 par Jim Walmsley, en 19h37. Des écarts qui donnent le vertige, mais qu’il faut replacer dans leur contexte.
Une différence de terrain radicale
- Marathon : 42,195 km sur route plate ou légèrement descendante, avec un bitume optimisé pour la vitesse.
- UTMB : environ 171 km, 10 000 m de D+, sentiers alpins, cols à plus de 2 500 m, boue, neige, rochers, gestion de la nuit.
Le marathon est une discipline d’efficience pure. L’UTMB, lui, est un test de résistance prolongée, de stratégie et d’adaptation. L’un dure deux heures. L’autre, presque vingt.
Si l’on cherche à comparer objectivement, un marathonien d’élite court à environ 21 km/h (2h00), soit 2’50/km. Jim Walmsley, lui, a parcouru l’UTMB 2024 à une allure moyenne de 8,7 km/h, soit 6’50/km.
Mais ce n’est qu’une partie de l’équation. En trail, on estime qu’un 100 m de D+ équivaut à 1 km plat. Appliquée à l’UTMB, cette conversion donne un « équivalent plat » de 271 km. Ce qui ramène la vitesse réelle à environ 7 km/h — soit une allure plus de deux fois plus lente que celle d’un marathonien, malgré un niveau d’élite comparable.
La montagne impose ses règles : météo instable, altitude, autonomie, gestion mentale. Ce n’est pas qu’une course contre le chrono. C’est une course contre l’environnement lui-même.
Quelle marge de progression ?
Le marathon approche sans doute de ses limites. En 25 ans, les gains ont été marginaux, portés par l’optimisation extrême du matériel, de l’entraînement, et de la nutrition.
Pour l’UTMB, la marge reste importante. Le record de 19h37 est récent, mais déjà Vincent Bouillard prédit un passage sous les 19 heures, voire sous les 18.
Le matériel s’améliore, les profils s’affûtent, la densité du peloton élite augmente chaque année… Mais ce n’est pas tout. La nutrition évolue aussi rapidement. Des approches comme celle de David Roche promeuvent une consommation élevée de glucides — jusqu’à 120 à 150 g par heure — associée à un entraînement du système digestif, pour repousser la fatigue et maintenir des allures élevées même après 10 ou 15 heures d’effort.
Ce basculement vers la performance pose néanmoins question. Le trail, longtemps épargné par les soupçons, est désormais confronté aux mêmes enjeux que les autres sports d’endurance. Le circuit UTMB World Series a renforcé ses protocoles de lutte anti-dopage via l’ITA et le Code WADA. Mais les cas récents — comme celui de Stian Angermund ou celui, plus ancien, de Gonzalo Calisto (contrôlé positif à l’EPO à l’UTMB 2015) — rappellent que l’éthique du sport ne va pas de soi. Vigilance et transparence restent essentielles.
Deux records, deux révolutions
Quand Kipchoge a franchi la barrière des deux heures (dans des conditions non homologuées), il a changé l’histoire de la course à pied. Un jour, un traileur franchira la ligne d’arrivée à Chamonix en moins de 19 heures. Et lui aussi marquera l’histoire du sport.
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