Bilan, statistiques et chiffres de States of Elevation
Les chaussures utilisées par Kilian Jornet
Les chaussures utilisées par Kilian Jornet
Kilian Jornet a terminé States of Elevation : le plus grand projet d’endurance de sa vie
C’est une ligne de crête dessinée à la force des jambes, une traversée poétique et brutale de l’Ouest américain, une épopée entre roche, neige et solitude.
Le bilan de States of Elevation
Après 31 jours d’effort ininterrompu, Kilian Jornet vient de compléter son projet le plus ambitieux à ce jour : States of Elevation. Ce défi monumental l’a vu gravir, à la seule force humaine, les 73 sommets culminant à plus de 14 000 pieds (4 267 m) dans les 48 États contigus des États-Unis.
Il a relié ces sommets sans moteur, uniquement à pied et à vélo, parcourant plus de 5 000 kilomètres et plus de 200 000 mètres de dénivelé cumulé, dans des conditions parfois extrêmes.
Mais derrière les chiffres, il y a surtout une quête esthétique, spirituelle, une exploration du lien entre l’homme et la montagne.
Une ligne impossible devenue tangible
Le point de départ s’appelait Longs Peak, dans le Colorado. L’arrivée s’est faite sur le Mont Rainier, dans l’État de Washington. Entre les deux : des jours à courir, grimper, pédaler, dormir à la belle étoile ou lutter contre des tempêtes.
Pour les néophytes, « States of Elevation » pourrait sembler être une simple accumulation de sommets. Pour Jornet, c’est tout le contraire. « Ce n’était pas une question de chiffres », a-t-il écrit dans son message de clôture. Le but, c’était la ligne. Une ligne à travers l’Ouest sauvage. Une ligne traversant les Rocheuses, la Sierra Nevada, les forêts et les déserts, les volcans et les crêtes pelées.
« Les chiffres ne sont qu’un prétexte. Ce qui compte, c’est ce qu’il y a entre eux. Le silence. Le vent. La lumière. La manière d’y aller. »
Un enchaînement dantesque : Nolan’s 14, Elks Traverse, Norman’s 13…
Pour les initiés, ce projet a de quoi donner le vertige. Il ne s’est pas contenté de gravir les quatorze mille (ou « fourteeners ») les plus connus. Il a enchaîné certains des segments les plus techniques et engagés des États-Unis :
Nolan’s 14
un enchaînement mythique de 14 sommets dans le Colorado, avec 90 kilomètres et 13 000 mètres de D+ ;
L’Elks Traverse
un parcours de 80 km entre les sommets les plus techniques du Colorado, rarement réalisé en intégralité ;
Norman’s 13
une ligne sauvage de 160 km et 12 000 m de D+ dans la Sierra Nevada.
Et entre ces segments ? Du vélo, souvent sous la pluie, parfois de nuit, avec des transitions de plusieurs centaines de kilomètres. Rien que pour rejoindre la Californie, il a pédalé près de 1 400 kilomètres en cinq jours.
Le choix de la ligne, pas de la vitesse
Ce qui rend States of Elevation unique, ce n’est pas seulement la performance physique. C’est le refus de la facilité. À de nombreuses reprises, Jornet aurait pu emprunter un itinéraire plus court, plus direct, plus « logique ». Mais il a préféré suivre « la ligne la plus esthétique », quitte à rallonger, à souffrir davantage.
Sur le LA Freeway, par exemple, il a préféré faire un détour de 60 km hors sentier au lieu de redescendre et remonter à vélo. Non pas pour battre un record. Mais pour honorer la montagne, la parcourir comme un tout, sans discontinuité.
Un effort de tous les jours, de toutes les heures
Pendant un mois, Jornet a vécu dans une temporalité parallèle. Il se levait avant l’aube, dormait quelques heures dans un bivouac de fortune, avalait des kilomètres en courant et à vélo. Dans le parc national de Kings Canyon, il a enchaîné deux jours de traversée intense avec à peine deux heures de sommeil.
Dans les dernières heures du projet, il a affronté des températures glaciales sur le Mount Rainier, progressant dans la neige et la glace avec un vent de face à plus de 60 km/h. Il est arrivé au sommet comme on termine un poème. Sans fanfare. Juste la ligne.
Un message pour les générations futures
States of Elevation n’est pas un projet égoïste. C’est une déclaration d’amour aux montagnes. Un plaidoyer pour la protection des espaces sauvages. Un manifeste silencieux contre la motorisation de l’aventure.
Dans l’un de ses messages les plus partagés, Jornet rappelait : « Les animaux qu’on croise, les forêts qu’on traverse, les crêtes qu’on partage, tout cela peut disparaître. Alors il faut les aimer. Et pour ça, il faut aller les voir. »
C’est là tout le sens de cette traversée : ne rien laisser d’autre que ses empreintes. Et faire naître, chez ceux qui regardent, l’envie d’en faire autant.
Un projet hors-norme, pour un athlète hors-norme
Kilian Jornet a désormais 38 ans. Il a tout gagné. UTMB, Hardrock, Sierre-Zinal, Western States. Il a gravi l’Everest sans oxygène, traversé les Alpes et les Pyrénées d’un trait. Mais States of Elevation marque un tournant : un passage du compétiteur au contemplateur.
Ce projet ne visait aucun podium. Il n’était inscrit dans aucun calendrier. Il ne dépendait d’aucun sponsor. C’était un acte libre. Pur. Brut. Une ode au trail, dans ce qu’il a de plus profond.
Et sans doute, le plus bel hommage possible à ce sport.
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