alcool trail
Sur le Trail de la Grande Champagne, la chaleur a chamboulé les habitudes. Les ravitos se sont adaptés. Et même… l’heure de la bière. Dans une vidéo relayée par Patrick Montel, on voit un coureur trinquer dès 9 heures du matin, sourire aux lèvres et Camelbak sur le dos. « Pour cause de chaleur, la petite bière qui réconforte est avancée à 9h du mat », écrit le journaliste. Une anecdote sympathique ? Oui. Mais aussi une incohérence de fond qu’on ne peut ignorer.
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Trail et alcool : une tolérance ambigüe
Dans l’imaginaire collectif, l’effort se récompense par une mousse. Pourtant, les effets de l’alcool, notamment après un effort prolongé sous forte chaleur, posent de vrais risques de santé : déshydratation, troubles de l’équilibre, effets cardio-vasculaires amplifiés… Et dans un cadre aussi exigeant que le trail, ces risques ne sont pas théoriques.
Loi Évin, cadre légal et dérives
La loi Évin encadre strictement la publicité en faveur de l’alcool, notamment dans les événements sportifs. Or, même sans qu’il s’agisse d’une publicité commerciale à proprement parler, montrer sur une vidéo publique un traileur en train de boire de la bière avec un message bienveillant est à la limite de cette loi.
Si le Trail de la Grande Champagne propose de la bière à l’arrivée à 9h du mat, d’autres évènements font tout leur marketing autour de l’alcool. uTrail a déjà parlé du Marathon de la bière, du marathon du Médoc. Peut-être que les traileurs ont un problème avec l’alcool.
Une image décalée du trail ?
Les organisateurs le diront : il s’agit d’un moment de convivialité. Certes. Mais alors que le trail attire un public toujours plus large, ce type de communication alimente une image du sport de pleine nature qui flirte avec le folklore : bière, copains, départs de nuit « à la fraîche », effort extrême et récupération express autour d’un gobelet.
En réalité, la course à pied — et encore plus le trail en conditions difficiles — demande une hygiène irréprochable. Hydratation, nutrition, récupération. Il est donc pour le moins contradictoire de banaliser une consommation d’alcool aussi précoce, juste après un effort sous la canicule.
Aimer le trail, c’est aimer les moments partagés. Mais c’est aussi respecter les bases de la santé sportive. Ce que montre la vidéo postée par Patrick Montel fait sourire, mais questionne aussi : que dirait-on si, à la fin d’un match de tennis ou d’un triathlon, on servait des bières à 9h du matin ? Dans un contexte de plus en plus professionnel et exigeant, le trail gagnerait à envoyer des signaux plus cohérents.
En résumé
Lors du Trail de la Grande Champagne, une vidéo partagée par Patrick Montel montre un traileur trinquant à la bière… dès 9h du matin. Un moment convivial en apparence, mais qui soulève plusieurs incohérences. Alors que la loi Évin encadre strictement la promotion de l’alcool dans le sport, ce genre de scène interroge sur l’image que le trail renvoie : entre exigence sportive et folklore festif.
L’article rappelle que l’alcool après un effort intense est déconseillé : il accentue la déshydratation, freine la récupération, et peut même s’avérer dangereux en cas de forte chaleur. Boire une bière à l’arrivée n’est pas illégal, mais valoriser cette pratique publiquement, surtout si tôt, brouille les messages de santé publique.
Le texte invite les organisateurs et les figures médiatiques du trail à faire preuve de cohérence : on ne peut pas promouvoir à la fois la performance en pleine nature et la bière du matin comme si de rien n’était.
Statistiques : alcool et trail, les données alarmantes
- Selon l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP), la consommation d’alcool entraîne une baisse de performance musculaire allant jusqu’à 11 % dans les 48 heures suivant l’ingestion.
- D’après une étude publiée dans le Journal of Applied Physiology, une dose modérée d’alcool (équivalente à deux verres) peut réduire de 45 % la synthèse des protéines musculaires post-effort, compromettant ainsi la récupération.
- Par ailleurs, l’alcool diminue la qualité du sommeil profond de près de 20 %, or ce dernier est crucial après un ultra ou une course en dénivelé.
- Enfin, une recherche de l’Université de Massey (Nouvelle-Zélande) a démontré qu’un taux d’alcoolémie de seulement 0,02 % suffit à altérer l’équilibre et les réflexes, augmentant le risque de chute… un détail non négligeable sur des sentiers techniques.
FAQ – Alcool et sport : ce que les traileurs doivent vraiment savoir
Boire une bière après une course, c’est grave docteur ?
Pas forcément, mais ce n’est pas idéal. Après une course, le corps est déshydraté, les reins sont sollicités, et l’alcool peut amplifier la fatigue, perturber la récupération musculaire, augmenter le risque de blessures… Une bière en fin de course n’est pas « interdite », mais elle ne doit pas être systématique ni précoce (et certainement pas à 9h du matin).
Pourquoi l’alcool est-il déconseillé après un effort intense ?
L’alcool agit comme un diurétique, il aggrave donc la déshydratation. Il diminue la synthèse des protéines musculaires (donc la régénération), favorise les microtraumatismes et nuit à la reconstitution des stocks de glycogène. Il altère aussi le sommeil profond, qui est clé pour la récupération. [Source : Journal of the International Society of Sports Nutrition]
L’alcool fait-il baisser la performance ?
Oui, même en petite quantité. Une étude de 2010 publiée dans le British Journal of Sports Medicine montre qu’un taux d’alcoolémie aussi bas que 0,02 % peut réduire la coordination, la capacité à réguler sa température corporelle et la concentration — des paramètres essentiels en trail.
Peut-on dire que l’alcool « réhydrate » après une course ?
Non, c’est même l’inverse. L’alcool inhibe la sécrétion d’ADH (hormone antidiurétique), ce qui augmente la diurèse (perte d’eau). Autrement dit : vous urinez davantage, donc vous vous déshydratez encore plus.
Et les bières sans alcool alors ?
Les bières sans alcool (0,0 %) peuvent être une alternative acceptable, car elles contiennent de l’eau, un peu de sucre, parfois du sodium. Certaines études — notamment en Allemagne — ont même montré qu’elles pouvaient aider à la récupération si elles sont riches en polyphénols (effet anti-inflammatoire). Mais elles ne doivent pas remplacer une vraie hydratation post-effort (eau, électrolytes, etc.).
La loi Évin interdit-elle la bière à l’arrivée d’un trail ?
La loi Évin, en vigueur depuis 1991, interdit la publicité directe ou indirecte pour l’alcool dans les événements sportifs. Cela ne signifie pas qu’il est illégal de consommer de l’alcool après une course, mais communiquer dessus (photos, vidéos, publications Facebook) peut contrevenir à la loi, surtout si cela valorise cette consommation auprès d’un public non averti.
Les traileurs sont-ils particulièrement exposés ?
Oui, car le trail mêle sport de pleine nature, convivialité et parfois tradition festive (bières locales, ravitos terroir). Mais cela ne doit pas masquer les risques liés à une consommation inappropriée. D’autant plus que beaucoup de coureurs viennent avec des objectifs sérieux ou sont suivis par des enfants.
Alcool la veille d’un trail : bonne ou mauvaise idée ?
Clairement une mauvaise idée. L’alcool diminue la qualité du sommeil, perturbe la digestion, déshydrate, augmente la variabilité cardiaque et peut perturber la glycémie. Il n’y a aucun bénéfice à consommer de l’alcool la veille d’un effort long, surtout s’il est technique ou sous forte chaleur.
Un coureur peut-il être disqualifié pour consommation d’alcool ?
Ce n’est pas le cas dans les règlements classiques (comme ceux de l’UTMB ou de la FFA), mais des événements peuvent avoir leur propre règlement intérieur. Par ailleurs, en cas de comportement inapproprié (état d’ivresse, trouble du comportement), l’organisation peut toujours exclure un coureur pour raisons de sécurité.
Y a-t-il un effet placebo du petit verre ?
Oui, certains coureurs disent se sentir « relâchés » ou plus heureux après une bière. Mais cet effet est psychologique, et peut être obtenu autrement (boisson sucrée, musique, finisher beer sans alcool, etc.). Il ne compense pas les effets négatifs sur le corps.
Une bière vaut-elle un gel ?
Non, absolument pas. Une bière (même sans alcool) n’apporte pas les glucides complexes, les acides aminés, les électrolytes ou les minéraux dont le corps a besoin après un effort prolongé. C’est un « plus festif », pas un aliment de récupération.
Sources scientifiques
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Récupération musculaire : une étude de Parr et coll. (2014) dans PLOS ONE démontre que l’ingestion d’alcool (environ 1,5 g/kg, soit ~12 verres) après un entraînement réduit la synthèse des protéines musculaires de 24 % à 37 % comparé à un apport en protéines seul
researchgate.net
journals.plos.org -
Qualité du sommeil : une étude randomisée (menée en 2022) montre qu’une dose d’alcool d’environ 1,0 g/kg provoque une augmentation de la fréquence cardiaque et une diminution du temps de sommeil total ainsi que de l’efficacité du sommeil . Une méta-analyse de 2025 confirme qu’une dose supérieure à 0,85 g/kg (5 verres) raccourcit le temps d’endormissement de 6 min et allonge de 18 min l’arrivée du sommeil paradoxal (REM)
researchgate.net -
Architecture du sommeil : la consommation d’alcool avant le coucher augmente le sommeil léger (N2), mais perturbe ensuite le sommeil profond et augmente la fragmentation du sommeil
wikipedia
Source Patrick Montel
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Image extraite d’une vidéo publique postée sur la page Facebook officielle de Patrick Montel. Conformément au droit à l’information (article 9 du Code civil), cette capture d’écran est utilisée dans un cadre de traitement journalistique, sans but commercial.
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Cet article a une visée de sensibilisation à la santé dans le cadre de la pratique du trail running. Il ne remet nullement en cause l’intégrité des personnes filmées ou de Patrick Montel, dont le travail de terrain est salué. Le contenu analyse simplement les enjeux de santé publique liés à l’alcool et au sport, à la lumière des recommandations scientifiques et du cadre légal.