À ses débuts sur l’UTMB, personne ne connaissait Mathieu Blanchard. Avant sa nouvelle préparation mentale, , la pression médiatique l’épuisait avant même le départ.
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Qui est Mathieu Blanchard et de quoi parle-t-on ?
Mathieu Blanchard est l’un des visages forts du trail moderne. Franco-québécois, il s’est révélé sur l’UTMB, l’épreuve de référence autour du Mont-Blanc, où il est devenu le premier Français à passer sous les 20 heures, et il a aussi remporté la Diagonale des Fous à La Réunion, course réputée pour sa difficulté.
Dans cet article, il raconte le passage d’un statut d’inconnu — courir « incognito » sans attentes — à celui de favori observé par les médias, et comment la préparation mentale l’aide désormais à gérer cette pression avant même le départ.
Si vous découvrez le trail, retenez que ces courses de très longue distance se jouent autant dans les jambes que dans la tête : apprendre à transformer le stress en énergie fait souvent la différence quand la nuit tombe et que les sentiers se durcissent.
Mathieu Blanchard, l’âge de l’incognito : courir léger, décider juste
La liberté d’un départ sans attentes
Au début, il se glissait dans le sas élite sans attirer l’œil. L’anonymat allégeait l’esprit et autorisait des choix simples, dictés par le terrain et les sensations. Dans cet état, on ose sans crainte de décevoir, on garde la tête claire quand la nuit tombe et que la montagne ne juge pas.
« Tout à gagner, rien à perdre »
Cette dynamique nourrit l’ultra. Tant que personne n’attend un résultat, le stress reste moteur. La charge mentale est minime, la lucidité maximale, et l’énergie disponible pour résoudre les problèmes en course demeure intacte.
La bascule de la notoriété : quand la charge mentale s’invite
Du statut de rookie au rang de favori
À force de résultats, le coureur attendu remplace le coureur incognito. Il faut répondre aux sollicitations, assumer un statut, porter une attente collective. Ce déplacement du regard extérieur change la course avant même le coup de feu.
Quand l’amont de course vide l’athlète
Sur un UTMB marquant, l’accumulation de pression a entamé la performance dès l’avant-course. Ce n’était pas une défaillance de courage, mais une surchauffe émotionnelle qui brouille les sensations et grippe la mécanique.
Apprivoiser la pression : la préparation mentale comme outil pour Mathieu Blanchard
Nommer le doute, apprivoiser la peur, filtrer le stress
Le travail engagé consiste à reconnaître que doute, peur et stress sont normaux quand l’enjeu est grand. Les nommer, c’est les cadrer. Les travailler, c’est redevenir maître de leur intensité et les convertir en énergie utile.
Deux « mentaux » à orchestrer
Il distingue un mental de court terme, efficace dans l’imprévu et la douleur, et un mental de long terme, dédié à la gestion des émotions avant et après la course. C’est sur ce second plan que le progrès récent est le plus net.
Revenir au centre : transformer la pression en envie
Des rituels simples pour dédramatiser
Rire avec l’équipe, remettre une musique familière, pratiquer l’autodérision à l’heure du départ. Ces gestes ramenent la course à son essentiel et recréent l’énergie de l’époque incognito, sans nier la lumière qui accompagne désormais chaque départ.
Retrouver l’esprit de l’anonymat, sans renier la lumière
Il ne s’agit pas d’idéaliser le passé, mais de cultiver l’esprit qu’il incarnait : faire baisser le bruit, rendre la place aux sensations, remettre l’aventure devant l’injonction. C’est la condition silencieuse pour décider mieux et courir plus juste.
L’ultra moderne : des jambes fortes, une tête qui règle le débit
Le terrain de course dépasse les sentiers
Conférences de presse, réseaux, partenaires, famille : les attentes élargissent le champ de bataille. Préserver un noyau de jeu au milieu de tout cela devient le vrai travail. Accepter le prix de la notoriété, puis apprendre à l’acquitter sans s’y dissoudre, voilà l’enjeu.
L’objectif : laisser la montagne décider
En fin de compte, retrouver la joie première qui donne sens à l’ultra. Partir courir avec une tête claire, et laisser la montagne décider de ce que l’on vaut ce jour-là.
La préparation mentale, colonne vertébrale du trail moderne
Vision générale sur la préparation mentale en trail
En trail, les jambes portent, mais la tête règle le débit. Plus la course est longue et exposée, plus la charge mentale devient déterminante. La préparation mentale ne consiste pas à supprimer le doute ou la peur, mais à les rendre utiles. Elle fixe un cap clair, apprend à décoder les signaux internes, installe des routines qui stabilisent avant le départ et des réflexes qui résolvent les problèmes en mouvement. Travailler ce socle permet d’économiser de l’énergie avant la course, de décider plus vite pendant, et de progresser plus juste après.
Méthodes concrètes pour traileurs et ultra-traileurs
La première brique, c’est l’hygiène mentale de base : une « diète médiatique » les jours clés, un planning de sollicitations limité, des fenêtres sans écran, et un sommeil réellement protégé.
Viennent ensuite les routines de centrage : respiration contrôlée ou cohérence cardiaque avant l’échauffement, ancrage sensoriel simple comme un contact main-poitrine, et une visualisation courte du premier segment de course pour entrer dans l’action sans surchauffer. Le langage intérieur se prépare lui aussi : des phrases brèves et spécifiques à répéter quand ça tangue, par exemple « je reviens au souffle », « je mange et j’avance », « une côte à la fois ».
La course se gagne souvent dans la gestion fine des imprévus.
Découper le tracé en sections avec des « mini-objectifs » réduit l’ampleur mentale de l’ultra. Un plan A réaliste, un plan B en cas de coup de mou, et un plan C de repli évitent la panique décisionnelle. Le « briefing nutritionnel » écrit, avec horaires et volumes, sert de pilote automatique quand la lucidité décroît. Le « scan corporel » périodique, toutes les trente à quarante-cinq minutes, repère tôt les signaux faibles : frottements, débuts de crampe, baisse d’envie de manger, et déclenche des réponses simples et ritualisées.
À l’entraînement, on installe ces réflexes en contexte.
Des sorties spécifiques simulent le stress : départ volontairement trop rapide à contrôler, nuit et météo capricieuse, sections techniques en fin de séance pour travailler la tête fatiguée. Des séances sans montre apprennent à faire confiance aux sensations, quand le GPS devient imprécis ou anxiogène. Un journal de bord, rempli à chaud après les sorties et les courses, transforme l’émotion en information et nourrit les ajustements de la semaine suivante.
Selon les profils, des approches guidées complètent le dispositif. La pleine conscience et l’ACT aident à accepter l’inconfort sans le combattre inutilement. La sophrologie et l’hypnose ericksonienne installent des ancrages rapides au départ et dans les moments creux. Le biofeedback, via la variabilité de la fréquence cardiaque, affine la récupération et la gestion du stress pré-course. Un travail court en thérapie cognitivo-comportementale aide à dégonfler les croyances qui happent l’énergie, comme l’obligation de « faire mieux que la dernière fois ».
Au final, la préparation mentale ne cherche pas à rendre invulnérable. Elle vise à rendre disponible : disponible pour le terrain, pour les sensations, pour les décisions utiles. Le jour J, cette disponibilité fait la différence quand la nuit tombe, que la météo change et que le monde extérieur bruite. Dans ces moments, la tête calme permet aux jambes d’exprimer tout le reste.
Sources et minutage — citations exactes
« je suis même pas invité aux conférences de presse athlète élite. il y a personne qui me connaît… » (37:02–37:08).
« tu as tout à gagner. tu as rien à perdre. » (37:15–37:20).
« ensuite… tu as plus à perdre qu’à gagner puisque tu as déjà gagné. » (37:27–37:35).
« si tu fais moins bien, tu perds. » (37:35–37:41).
« en septembre 2024, j’ai commencé à faire de la préparation mentale… » (30:17–30:27).
« le corps est adaptatif et le cerveau est prédictif. » (30:58–31:04).
« une des causes de mon échec [à l’utmb], c’est aussi lié à une mauvaise gestion du stress en amont de course. » (38:27–38:33).
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Source principale : podcast « Dans la Tête d’un Coureur », hors série mental avec Mathieu Blanchard et Marianne Hogan, octobre 2025.