Depuis que je cours, j’entends sans cesse parler d’esprit trail. Vendu à toutes les sauces et régulièrement teinté d’une certaine arrogance, ce concept galvaudé par son côté fourre-tout veut tout et rien dire à la fois. Tantôt il m’effraie, tantôt il me donne envie de vomir.
Si l’on essaie de brosser un peu le portrait de l’esprit trail en questionnant la toile, on retrouverra souvent des valeurs comme la solidarité, voire la fraternité (aider quelqu’un qui est tombé à se relever, donner quelque chose à quelqu’un dans le dur, etc…), un rapport particulier à la nature (surtout quand on voit ce que certains traileurs peuvent y laisser)… ou encore un égalitarisme face à l’adversité.
Alors oui, ce sont de belles valeurs, mais en quoi sont-elles inhérentes au trail ? Au risque d’en décevoir certains, je n’ai jamais remarqué moins de solidarité sur du bitume que sur des sentiers. Et s’il est vrai qu’un DRH sera égal à un rempailleur de chaises sur la ligne de départ, est-ce que ce n’est pas aussi le cas au départ d’un marathon ? Et plus généralement, j’espère qu’il ne faut pas être traileur pour être bienveillant…
En toute honnêteté, je pense plutôt que c’est la personnalité qui fait l’esprit, pas sa pratique. Je m’explique; si un traileur vous accompagne pour marcher pendant que vous êtes dans le dur, c’est parce que c’est quelqu’un de bien qui utilise sa bonté en toute occasion, pas parce que c’est un traileur.
De même, un marathonien qui vous dépasse avec un petit sourire en coin pendant que vous traînez un peu la patte, ce n’est pas parce que c’est un marathonien, c’est juste que c’est un sale con qui mérite un coup de clé anglaise dans l’arcade.
Egalement, que l’on soit sur trail ou marathon, si un coureur nous vient en aide (et que grâce à lui, on va beaucoup mieux) et qu’une fois la ligne d’arrivée en visuel, on se demande si on le laisse passer devant nous, ce n’est pas notre pratique qui dictera nos choix, mais plutôt notre éthique personnelle et notre rapport à la compétition. Se comporter avec les autres comme on voudrait qu’ils se comportent avec nous n’est pas un credo de traileur, mais juste d’une personne qui a un minimum d’éthique et de respect de l’Autre.
Et proportionnellement au nombre de pratiquants des deux disciplines, je ne pense vraiment pas qu’il y ait les gentils traileurs écolos d’un côté et les méchants bouffeurs de bitume de l’autre, contrairement à ce que les pseudo-théoriciens du concept trop manichéen d’esprit trail voudraient nous faire croire.
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