Il fut un temps où Strava incarnait l’avenir du sport connecté.
Une plateforme ouverte, intuitive, qui rassemblait les coureurs, les cyclistes et les triathlètes du monde entier autour d’une passion commune : partager ses efforts, suivre ses progrès et se mesurer aux autres, dans une ambiance bienveillante et ludique. Aujourd’hui, ce rêve s’effrite. Strava semble perdu. À force de décisions mal comprises, de fermetures techniques et de revirements juridiques, l’entreprise donne le sentiment de s’être coupée de ce qui faisait sa force : sa communauté.
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Strava, de la révolution connectée à l’impasse stratégique : SES ÉCHECS
Strava a grandi grâce à une promesse simple : peu importe l’appareil que vous utilisiez pour courir, pédaler ou nager, vous pouviez centraliser vos données sur une seule interface. Mieux encore : cette interface était un lieu de vie. Vous y retrouviez vos amis, les sorties de vos clubs, des segments pour vous challenger, des cartes pour découvrir de nouveaux parcours.
Mais cette dynamique s’est heurtée à une réalité économique. Pour survivre, Strava devait monétiser. Et plutôt que d’ajouter de la valeur, la plateforme a commencé à retirer ce qui la rendait unique… pour le faire payer.
Faire payer ce qui était gratuit : le pari perdant
En 2020, Strava décide de basculer ses fonctionnalités phares — segments, comparaisons, planificateur de parcours — derrière un abonnement. Ce choix brutal est vécu comme une trahison. Non seulement l’entreprise ne propose pas d’innovation majeure, mais elle déshabille la version gratuite, au risque de perdre les utilisateurs les plus investis.
Certes, l’abonnement peut se justifier. Mais sa mise en œuvre a brisé un équilibre fragile entre gratuité, utilité et engagement communautaire. Et surtout, elle a révélé une difficulté plus profonde : Strava ne sait plus comment se différencier.
L’échec de l’intelligence artificielle
En 2024, l’entreprise tente un retour par la technologie : elle annonce fièrement l’arrivée de l’« Athlete Intelligence », un outil d’IA censé décrypter vos données d’entraînement. Sauf que personne n’est convaincu. Les utilisateurs expérimentés trouvent l’analyse trop basique, les novices n’y comprennent rien, et le tout finit par être tourné en dérision sur les réseaux.
Encore une fois, cette fonctionnalité est réservée aux abonnés. Mais au lieu de créer de l’envie, elle nourrit la frustration. Strava semble avancer à l’aveugle, comme si l’entreprise ajoutait des couches de complexité pour masquer l’absence de vision claire.
Fermeture de l’API : le coup de grâce
La force de Strava, historiquement, c’était son écosystème. Des centaines d’applications tierces, de sites d’analyse ou de planification, venaient s’y connecter via une API ouverte. Cela permettait aux utilisateurs de bâtir leur environnement sportif idéal, entre leur montre GPS, leurs outils de suivi et leurs communautés.
Mais fin 2024, tout change : Strava restreint brutalement son API. Désormais, une app externe ne peut afficher que les données de l’utilisateur qui s’y connecte. Finis les tableaux partagés, les comparaisons croisées, les outils avancés comme Veloviewer. Le message est clair : Strava ne veut plus être un carrefour, mais un terminal. Et tant pis pour ceux qui y avaient trouvé un terrain d’expérimentation.
Le procès contre Garmin, un échec de plus
Dans cette logique de repli, Strava s’en prend à Garmin. L’entreprise refuse que le géant américain impose l’affichage de son logo sur toutes les activités importées depuis ses montres. Strava crie à la publicité forcée, attaque en justice… puis abandonne. En quelques jours, le procès est clos. Garmin impose son logo. Et Strava obéit.
Le plus grave n’est pas tant l’échec judiciaire que le message envoyé aux utilisateurs : la plateforme ne maîtrise plus son propre environnement. Elle se présente comme le défenseur de vos données… tout en empêchant leur transfert vers d’autres outils. Une position intenable, surtout quand les réactions des utilisateurs sur Reddit et autres forums se font de plus en plus critiques.
UNE RÉUSSITE avec le vrai cœur de Strava : la dimension sociale
Il reste pourtant un pilier solide : l’aspect communautaire. Les kudos, les commentaires, la visibilité des activités restent la drogue douce de millions d’utilisateurs. C’est là que Strava conserve sa force. Le problème, c’est que cet aspect social ne rapporte rien. Pas de publicité, pas de monétisation directe. Et les abonnements ne suffisent pas à financer un modèle devenu trop lourd.
Alors, que faire ? Continuer à verrouiller ? Lancer de nouveaux outils gadgets ? Ouvrir la porte à la pub ? Strava semble hésiter à chaque carrefour, comme si l’entreprise ne savait plus si elle devait être un outil de performance, un réseau social, ou une boutique fermée à double tour.
En résumé, Strava n’a pas encore perdu sa base.
Mais elle a perdu sa réputation. Elle a perdu l’élan. Et peut-être, à force de verrouiller, elle finira par perdre ce qui faisait d’elle une marque unique dans l’univers du sport connecté.
Il est encore temps de redresser la barre. Mais pour cela, il faudra plus que des correctifs techniques. Il faudra une vision. Une vraie.
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