Courir un ultra, c’est déjà une épreuve. Mais réussir à s’inscrire à un trail, en 2025, relève presque du miracle. 
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La scène est devenue classique : des coureurs connectés fébrilement à midi pile, le doigt suspendu au-dessus de la souris, espérant ne pas être rejetés par la file d’attente ou par un bug. Le trail est devenu populaire, et avec lui, les inscriptions sont devenues… absurdes.
En ligne de mire ? L’Ultra Marin®, mais aussi les grands noms du calendrier trail français. Désormais, il ne suffit plus d’un PPS et d’une carte bancaire. Il faut aussi une bonne connexion, une chance insolente au tirage au sort, et parfois… poser un jour de congé pour cliquer au bon moment. C’est la course avant la course.
Le trail a changé.
Autrefois sport de niche, il est devenu une tendance grand public. Les événements s’ouvrent à des milliers de coureurs, les influenceurs s’en mêlent, les réseaux sociaux valorisent chaque dossard comme un trophée. Résultat : la demande explose. Mais l’offre, elle, reste limitée.
Les parcours sont contraints par la nature, les autorisations préfectorales, les normes de sécurité. Impossible de doubler les participants sur un single technique ou dans une réserve naturelle. Alors on filtre. Et plutôt que de désigner arbitrairement, on tire au sort. En théorie, c’est juste. En pratique, c’est kafkaïen.
Le trail n’est plus un sport de niche
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En 2025, on recense plus de 1 million de pratiquants en France, pour environ 4 200 courses organisées chaque année dans l’Hexagone. À l’échelle mondiale, la discipline connaît une croissance annuelle de +12 % depuis plus de dix ans, avec un marché du trail running (équipements inclus) estimé à près de 8 milliards de dollars. Cette explosion de la demande rend les inscriptions de plus en plus tendues, alors même que l’offre reste limitée pour des raisons écologiques, logistiques et réglementaires.
Pour garantir un processus d’inscriptions “équitable”, certaines organisations ont mis en place des procédures dignes d’un concours d’administration.
Avec des horaires à la minute, des connexions obligatoires à des créneaux précis, des files d’attente virtuelles et des temps limités pour valider son inscription.
Prenons le cas emblématique de l’Ultra Marin®, l’un des événements majeurs de Bretagne. Voici comment ça se passe pour le trail de 2026 :
Du mardi 2 au jeudi 4 décembre, chaque jour correspond à une ouverture d’inscriptions par course, à deux horaires clés : midi et 20 h. Par exemple, le 100 km s’ouvre le mercredi 3 à 12 h pour la moitié des dossards, puis à 20 h pour l’autre moitié.
Mais attention : il ne suffit pas de se connecter à midi.
Pour avoir une vraie chance, il faut :
- se connecter entre 11 h 30 et 11 h 59 pour se pré-enregistrer,
- attendre ensuite le tirage au sort à 12 h, qui attribue une position dans une file d’attente,
- ne surtout pas rafraîchir la page,
- puis, lorsque son tour arrive, remplir le formulaire en moins de 7 minutes.
Un oubli ? Un champ mal rempli ? Trop lent ? Vous repartez en fin de file.
Si vous vous connectez à 12 h pile ou après ? Vous êtes placé automatiquement en queue de file, sans chance réelle. Et si vous êtes encore au boulot à ce moment-là… tant pis pour vous. D’où les messages amusés (ou résignés) sur les réseaux : « Bac +5 requis pour l’inscription », « On dirait Parcoursup » ou « Vive la RTT pour avoir un dossard ».
Derrière cette usine à gaz se cache une volonté : éviter les bugs massifs et répartir les flux.
Car quand 10 000 coureurs veulent le même dossard au même instant, les serveurs de Klikego ne tiennent pas. Alors on répartit, on filtre, on trie.
Mais ce système favorise aussi les plus disponibles : les télétravailleurs, les indépendants, les chanceux du tirage. Et il frustre tous les autres : profs en cours, ouvriers sur chantier, soignants en garde. Sans parler des couples ou amis qui veulent courir ensemble, mais se retrouvent séparés par la loterie.
Sur Facebook, les témoignages pleuvent. Certains râlent, d’autres ironisent : « C’est plus compliqué que la course elle-même », « Merci la NASA pour le process », ou encore « Joyeux Hunger Games, puisse le sort vous être favorable ».
Et un commentaire résume l’ambiance :
Le trail est devenu un sport structuré, organisé, professionnalisé. Les bénévoles se professionnalisent, les inscriptions se digitalisent, les marques s’invitent partout. Mais cette transformation a un prix : celui de l’accessibilité.
L’aventure commence désormais bien avant la ligne de départ. Et elle passe par une bataille numérique où l’on doit savoir lire un tutoriel d’inscription, anticiper les horaires, gérer des comptes Klikego distincts, éviter les doublons, et espérer que sa page ne plante pas au mauvais moment.
Est-ce encore l’esprit trail ?
Chacun aura sa réponse. Mais une chose est sûre : plus les courses gagnent en notoriété, plus les inscriptions deviennent techniques. Au point que certains coureurs jettent l’éponge, et choisissent des épreuves moins connues, plus simples, parfois plus belles aussi.
Alors oui, en 2025, il faut peut-être poser une journée de congé pour s’inscrire à un trail. Et ça interroge.
Le trail se voulait libre, sans dossard, sans chrono. Il devient une industrie où même l’inscription ressemble à un test d’endurance. Si on peut comprendre les contraintes logistiques, on peut aussi regretter la complexité croissante, l’aspect aléatoire, la déconnexion progressive entre coureurs et organisation.
La course commence avant la course. Et certains en ont déjà marre avant même de chausser leurs baskets.
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