Au Québec, les traileuses disposent de kits menstruels complets sur les ravitos. Une différence culturelle frappante avec la France, où ces questions restent taboues.
Cette année, l’UTMB a fait la une des réseaux sociaux pour avoir installé quelques protections périodiques sur ses ravitaillements. Une initiative saluée, mais qui en disait long sur le retard français. Pendant ce temps, au Québec, les kits menstruels complets sont déjà la norme sur certaines courses. À l’image de l’UTHC, où le projet « La Parfaite menstruée » a été conçu dès le départ pour offrir aux coureuses dignité, confort et sécurité. Deux visions du trail. Deux réalités. Deux vitesses.
En France, un petit pas pour l’UTMB… et une communication XXL
Lors de l’édition 2023, l’UTMB avait annoncé fièrement la mise à disposition de serviettes hygiéniques et de tampons sur certains ravitaillements. Une première qui avait déclenché un grand nombre de commentaires, entre soulagement et sarcasme. Beaucoup de femmes saluaient ce pas dans la bonne direction, d’autres rappelaient que cette mesure basique aurait dû être en place depuis longtemps.
La mise en scène de cette avancée soulignait surtout un retard structurel dans la prise en compte des besoins spécifiques des femmes en ultra-trail. Les serviettes, bien visibles sur les tables, devenaient presque un objet de communication : preuve que le sujet reste tabou, voire spectaculaire, en France.
Au Québec, une approche plus simple, plus humaine, plus efficace
À l’Ultra-Trail Harricana du Canada, pas besoin de projecteurs. Depuis plusieurs éditions, les kits menstruels sont une évidence. Baptisé « La Parfaite menstruée », ce projet est porté par Véronique, infirmière de métier et fondatrice de la clinique Eliv. Elle a imaginé une trousse complète avec serviettes hygiéniques, tampons, lingettes, disponible au départ, sur tous les ravitos, et clairement signalée par un logo reconnaissable.
Cette idée est née de l’expérience personnelle de Véronique : celle de courir avec ses règles, sans rien sous la main, et de devoir chercher à la dernière minute un dépanneur ou un plan B. Un stress que toutes les coureuses connaissent. En créant cette solution, elle a simplement voulu rendre la course plus sereine, plus digne, plus inclusive. Et elle l’a fait sans tambour ni trompette. Juste parce que c’est nécessaire.
Une différence culturelle profonde
D’un côté, une organisation qui annonce timidement une mesure tardive. De l’autre, une communauté qui agit de façon concrète, sans en faire un slogan. Ce décalage culturel illustre à lui seul la différence d’approche entre la France et le Québec dans le trail.
Il ne s’agit pas seulement d’un kit. Il s’agit de la place qu’on accorde aux femmes dans l’univers de l’ultra. En France, elles représentent à peine un quart des participants. Au Québec, elles sont majoritaires sur certaines distances, comme le 60 km de l’UTHC avec 62 % de femmes au départ. Ce n’est pas un hasard. Quand on pense l’organisation à hauteur de femme, les femmes viennent. Et reviennent.
Penser l’inclusivité, ce n’est pas juste cocher une case
L’initiative de Véronique et de l’UTHC n’a rien de gadget. Elle reflète une philosophie du trail profondément inclusive, où chaque détail compte pour que toutes les coureuses puissent prendre le départ sans stress superflu. En France, on en est encore à applaudir ce qui devrait être la norme.
Il est temps de dépasser les effets d’annonce pour s’inspirer de ce qui fonctionne ailleurs. Le trail est un sport exigeant, mais il ne doit pas être excluant. Et parfois, un simple kit menstruel bien pensé peut faire toute la différence.
Résumé
Alors que la France célèbre timidement l’arrivée de protections périodiques sur les ravitaillements de l’UTMB, le Québec, lui, agit depuis plusieurs éditions. À l’Ultra-Trail Harricana, les kits menstruels complets sont disponibles partout sur le parcours, grâce à l’initiative d’une infirmière, Véronique, qui a mis son expérience de terrain au service des coureuses. Cette différence révèle un écart plus profond : au Québec, la course en sentier est pensée pour être inclusive, avec une culture sportive plus bienveillante, une approche moins élitiste, et une meilleure intégration des besoins féminins. Résultat : les femmes y participent en masse, jusqu’à représenter 62 % du peloton sur certaines distances. En France, on découvre à peine ce qui, ailleurs, est déjà une évidence.
FAQ
Le Québec est-il réellement en avance sur la France dans l’organisation des trails pour les femmes ?
Oui, clairement. Que ce soit en matière de participation féminine, de prise en compte des besoins spécifiques des femmes (comme les règles), ou de discours public autour de l’inclusivité, le Québec agit là où la France commence à peine à nommer les choses. L’UTHC 2025 en est un exemple emblématique : des kits menstruels complets sont disponibles sur tous les ravitos, sans polémique, sans mise en scène. C’est juste normal.
Cette avance québécoise vient-elle d’une culture plus féministe ?
En partie, oui. Le Québec est historiquement traversé par des mouvements féministes plus ancrés dans les politiques publiques et dans le tissu associatif. Les questions de parité, de santé des femmes, de charge mentale ou d’accessibilité sont abordées plus frontalement, sans autant de frilosité que dans le débat public français. Cela se traduit jusque dans la course en sentier, qui est pensée comme un espace partagé, pas comme un sanctuaire réservé aux plus durs.
Est-ce une différence dans la culture sportive ?
Absolument. La culture sportive québécoise est souvent moins élitiste, moins centrée sur la performance brute. Elle valorise davantage l’engagement, le dépassement personnel, et la communauté. Cela crée des courses où chacun·e a sa place, où les organisateurs pensent aussi aux coureurs de fond de peloton, aux marcheurs, et aux femmes, avec des services réellement adaptés. En France, le trail est encore souvent perçu comme une épreuve virile, exigeante, presque initiatique.
Y a-t-il une différence dans la manière dont les courses sont organisées ?
Oui. Au Québec, beaucoup d’événements sportifs sont organisés par des équipes locales à forte diversité de profils (infirmières, éducateurs, mères de famille, kinés, enseignants, etc.), ce qui change profondément les priorités. On pense à l’humain d’abord. En France, l’organisation est parfois plus industrialisée ou standardisée, surtout sur les gros événements comme l’UTMB, avec un focus très fort sur le réglementaire, le sponsoring, la logistique de masse… au détriment parfois du détail humain.
Et les mentalités des coureuses et coureurs eux-mêmes ?
La parole est plus libre au Québec. Les femmes parlent plus facilement de leurs règles, de leurs inconforts, de leurs besoins. Les coureurs hommes aussi sont souvent plus ouverts, moins portés sur la moquerie ou la gêne face à ces sujets. Il y a donc moins de tabou, moins de honte, et donc plus de solutions concrètes qui émergent naturellement, sans avoir besoin d’attendre des années de débat.
La France peut-elle rattraper ce retard ?
Oui, à condition de changer de paradigme. Il faut arrêter de traiter l’inclusivité comme une obligation de communication ou un bonus. Il faut repenser l’organisation des trails à partir des réalités vécues par toutes et tous : douleurs, logistique, hygiène, sécurité, accessibilité. Le Québec n’a pas réinventé le trail, il l’a simplement ouvert. Et il prouve que quand on le fait, la participation féminine explose. En France, les chiffres parlent : on reste encore à 20–25 % de femmes sur la majorité des courses.
Source de cette information sur « course en sentier femmes Québec »
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