Dopage technologique….. Nike : comment expliquer l’hystérie collective ?
Récemment, et ça n’a échappé à personne, Eliud Kipchoge a franchi à Vienne la barre mythique des 2h00 sur marathon.
Entre les gogos aveuglés par la performance, convaincus qu’on n’avait jamais vu quelque chose d’aussi impressionnant dans toute l’histoire du sport (Usain Bolt appréciera) et les pisse-froids, convaincus au contraire que c’était seulement un coup de comm’ bien orchestré par Nike pour une nouvelle paire de chaussures, on s’est retrouvés face à deux blocs de pensées qui se regardaient (et se regardent encore) en chien de faïence. Les premiers sont moqués par les seconds pour leur admiration dépourvue de toute critique et pour leur incapacité à remettre un minimum les choses dans leur contexte. Les seconds sont quant à eux moqués par les premiers du fait qu’ils ne seraient jamais contents, et que de toute façon, “si on n’est pas capable de faire aussi bien, alors on n’a qu’à se taire”. Alors, personnellement, dans ce cas, j’invite les premiers à se taire à tout jamais. Mais ce n’est pas le sujet.
Comment comprendre, ou du moins trouver une tentative d’explication, au fait qu’on s’est retrouvés au coeur d’une espèce d’hystérie collective entre deux blocs extrémistes convaincus d’avoir raison ? L’idée ici ne sera pas d’essayer de rapprocher les points de vus. Ce serait peine perdue.
Très rapidement, suite au record de Kipchoge, on a expliqué le succès par la qualité de ses chaussures, et le dopage technologique a été assez rapidement évoqué. Le groupe des sceptiques s’en est emparé peut-être un peu vite et l’a brandi un peu facilement pour dénigrer la performance. Parallèlement, le groupe des Nikophiles a balayé tout ce qui pouvait constituer la moindre remise en question en mettant ça sur le compte de la jalousie.
Alors, je fais un petit aparté à ce niveau; une bonne fois pour toutes, bande de gogos, mettez-vous bien dans la tête que ce n’est pas parce qu’on prend un peu de recul et qu’on se pose des questions qu’on n’est pas moins admiratifs ou qu’on est jaloux. Je sais que personnellement, jamais je ne descendrai sous les deux heures au marathon. Je n’en ai ni l’ambition, ni les moyens. Et devinez quoi, je m’en tamponne l’oreille avec une babouche. Voir quel type de personnes s’énerve quand je suis sceptique me fait penser que j’ai raison de le faire.
Ce n’est pas la première fois dans l’histoire du sport que le dopage technologique entre en ligne de compte. Le débat a eu lieu quand Oscar Pistorius a été autorisé à courir avec les valides (avant qu’il ne devienne champion du monde de tir sur cible sexy). On trouvait ça bien, mais on se disait qu’au fur et à mesure que la technologie évoluerait, les athlètes handi finiraient par aller plus vite. Mais ça restait constructif.
Il y a quelques années, en natation, il y a eu toute une polémique ; une quantité de records ont été battus, voire littéralement explosés. On en est arrivés à la conclusion que l’évolution technologique dans la constitution des maillots allait complètement déshumaniser l’effort (et donc le sens même du sport), on a alors fini par interdire cette nouvelle technologie, on est revenus en arrière, et ça n’a pas généré autant de conneries sur les réseaux sociaux.
Enfin, revient occasionnellement dans le cyclisme la question des moteurs miniatures dans les vélos. Pareil qu’ici, ça génère des fantasmes et des craquages, mais rien de bien constructif encore…
Pistorius, Cancellara et les nageurs n’ont pas été autant instrumentalisés que Kipchoge. Mais pourquoi ? Personnellement, je pense que
c’est principalement lié au fait que le record sur marathon a été battu hors compétition, à l’occasion d’un événement principalement dédié à ça. Je suis convaincu que si le record était tombé en compétition officielle (même à Berlin, celui-ci aurait moins déchaîné les passions, car il n’aurait souffert d’aucune contestation possible.
Là, il ne sera jamais homologué, donc, en soi, il existe sans exister. C’est peut-être ici le coeur du problème. Les gogos se limitent au fait que le record existe et les pisse-froid se limitent au fait que le record n’existe pas.
Et vu qu’avec les réseaux sociaux, chacun se croit plus intelligent qu’il ne l’est, on se retrouve dans des débats entre blaireaux se pensant plus malins que leurs interlocuteurs respectifs. Non contents de penser qu’ils ont raison, ils ne parviennent même pas à concevoir qu’on puisse avoir une autre idée que la leur, et que celle-ci puisse être un peu pertinente.