On l’attendait dans le top 5, certains le voyaient même jouer la gagne après sa victoire surprise à l’UTMB 2024. Pourtant Vincent Bouillard a quitté la Western States 100 au 128ᵉ kilomètre, dans la montée de Green Gate, visage cireux, regard absent. Difficile pour ses fans de comprendre comment l’un des coureurs les plus en vue de l’ultra français a pu passer de l’espoir de podium à l’abandon. Pour saisir son « vrai » niveau, il faut regarder au-delà de ce DNF.
Vincent Bouillard
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Vincent Bouillard, 31 ans, possède un palmarès court mais spectaculaire
Vainqueur de l’UTMB dès sa première tentative, 2ᵉ à la Diagonale 2023, 3ᵉ au Chianti Ultra 2025. Ses réussites ont un dénominateur commun : des parcours alpins techniques, où ses qualités de grimpeur farouche et sa capacité à encaisser de longues descentes pierreuses font merveille. La Western States est tout l’inverse : un tracé roulant, avec 70 % de sentiers quasi « routiers », des longues descentes rapides, un mercure qui tutoie les 40 °C dans les canyons. Bouillard l’a reconnu avant le départ : il manquait de repères sur ce genre de terrain. Alors qu’Olson et Myers maintenaient une cadence proche de 8 min/km, le Français tournait plutôt à 8 min 30 s. Ce différentiel l’a obligé à relancer sans cesse, grignotant ses réserves.
À Foresthill (km 100) il pointe 13ᵉ, mais il est encore dans le match pour un top 10. L’erreur se joue peut-être dans la descente vers la rivière : il tente de combler son retard, explose ses quadriceps, puis affronte la chaleur du gué de Rucky Chucky déjà entamé. À Green Gate, son arrêt est sans appel : crampes, vertiges, impossibilité de s’alimenter.
Vincent Bouillard savait que ça serait dur
Malgré l’abandon, on ne peut pas dire que Vincent Bouillard avançait à l’aveugle : dans l’interview accordée à 20 Minutes la veille du départ, il reconnaissait déjà « y aller encore plus avec la casquette de débutant » et redoutait la chaleur sèche de la Sierra Nevada, très différente de l’humidité alpine de l’UTMB. Il savait aussi qu’il n’avait couru que deux « 100 miles » en carrière et qu’il manquait d’expérience sur un tracé rapide et poussiéreux. Autrement dit, il avait conscience de la difficulté ; il avait même passé trois semaines sur place pour s’acclimater. Mais adapter son entraînement sur le papier et survivre à 45 °C dans les canyons sont deux réalités bien différentes : le mental était prêt, les quadriceps et le système digestif, eux, ont fini par céder dans la montée de Green Gate.
Pour mesurer le chemin qu’il reste à Vincent Bouillard, il suffit de regarder le trio du podium
Caleb Olson, 29 ans, jeune papa, adepte du volume régulier et des séances canicule sur tapis chauffé ; Chris Myers, même âge, ex-coureur de piste reconverti, capable de tenir 3 h au seuil sur terrain roulant ; Kilian Jornet, 37 ans, maître du pacing, qui protège ses quadriceps par un travail systématique de descente longue et affine sa nutrition depuis quinze ans. Trois profils différents, mais un même socle : vitesse spécifique sur chemin coulant, méthode scientifique, et une adaptation méticuleuse à la chaleur extrême. Autant de leviers que Bouillard devra intégrer s’il veut un jour transformer son talent de montagnard en prétendant sérieux sur la Western States.
Faut-il en conclure qu’il « n’a pas le niveau » ? Certainement pas. Sa saison 2024-2025 prouve qu’il figure parmi les grimpeurs les plus solides du circuit. Mais son abandon rappelle qu’un champion doit adapter son entraînement au profil de la course : vitesse soutenue, sessions canicule, descentes longues à cadence constante. Bouillard l’apprendra comme d’autres avant lui. Son vrai niveau reste celui d’un vainqueur UTMB ; simplement, la Western States n’était pas son terrain de prédilection cette année.
Résumé
Vainqueur surprise de l’UTMB 2024, Vincent Bouillard était très attendu sur cette Western States 100. Mais pour son troisième 100 miles, le Français n’a pas pu concrétiser. Longtemps en embuscade dans le top 15, il a abandonné dans la montée vers Green Gate, au 128e kilomètre, visiblement à bout de forces. Ce coup d’arrêt relance les débats autour de son véritable niveau sur le circuit mondial, entre coup d’éclat, apprentissage et réalité du très haut niveau.
FAQ
Pourquoi Vincent Bouillard a-t-il abandonné ?
Il a quitté la course au 128e km (mile 80), peu après la traversée de la rivière. Il semblait physiquement très entamé, avec le visage fermé et le regard vide. L’accumulation de chaleur, la fatigue et peut-être une difficulté à s’adapter au rythme rapide imposé en début de course ont pesé lourd.
Était-il en position de jouer le podium avant son abandon ?
Non. Bouillard pointait 13e au 100e km, puis au-delà du top 15 à Rucky Chucky. Il n’a jamais semblé capable d’accrocher les leaders. Son passage à Green Gate n’a même pas été enregistré, signe d’un arrêt brutal avant le pointage.
Avait-il conscience de la difficulté de cette course ?
Oui, dans ses interviews pré-course, il insistait sur la nouveauté du format (3e 100 miles seulement), la chaleur très différente de ce qu’il connaît en Europe, et l’humilité nécessaire. Il disait même vouloir aborder cette course comme un débutant. La lucidité n’a donc jamais fait défaut.
Est-ce un échec ou une leçon ?
Plutôt une étape. Son abandon rappelle que même les meilleurs peuvent connaître un jour sans, surtout sur une course aussi spécifique que la Western States, où la gestion thermique est déterminante. Bouillard reste un jeune athlète en apprentissage, avec un immense potentiel.
Quel est son bilan sur les 100 miles à ce jour ?
1re place au Kodiak Ultra Marathon (2023), 1er à l’UTMB (2024), abandon à la Western States (2025). Deux succès majeurs et un revers. Une trajectoire atypique, encore difficile à situer de manière définitive.
Qui a gagné cette édition 2025 ?
Caleb Olson en 14h11, à seulement 90 secondes du record de Jim Walmsley. Il devance Chris Myers (2e) et Kilian Jornet (3e). Trois profils très différents, tous parfaitement acclimatés au terrain et à la chaleur californienne.
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