Un argument récurrent, mais mal posé


À chaque accident de chasse médiatisé, le même raisonnement revient.
Les accidents de chasse seraient rares, statistiquement faibles, et sans commune mesure avec ceux observés dans d’autres activités de pleine nature comme le trail, l’alpinisme, le parapente ou le ski.
Les chiffres sont alors mobilisés pour relativiser, comparer, parfois minimiser.

Le problème est que les situations comparées ne sont pas de même nature.
Quand on court, skie ou fait du vélo, le risque est choisi
Comparer le nombre d’accidents de chasse à celui d’autres sports suppose que les risques en jeu soient équivalents. Or ce n’est pas le cas.
Dans les sports de pleine nature, le risque est intrinsèque à la pratique. Le pratiquant s’engage volontairement dans une activité qu’il a choisie, en connaissance de cause, avec ses dangers propres. Lorsqu’un accident survient, il concerne le plus souvent le pratiquant lui-même, ou d’autres personnes engagées dans la même activité, exposées au même type de risque volontaire.
Dans ce cadre, le chiffre a du sens, car il permet d’évaluer un niveau de danger accepté par ceux qui pratiquent.
Quand on est touché par la balle d’un chasseur, ce n’est pas un risque que l’on a choisi.
La comparaison devient trompeuse dès lors que des tiers sont impliqués.
Dans les accidents de chasse qui touchent des non-chasseurs, le risque ne découle pas d’un engagement volontaire dans la pratique concernée. Il est extérieur, subi, et parfois mortel, sans que la personne touchée n’ait choisi de s’exposer à cette activité.
Le promeneur, le coureur, le vététiste, le riverain ou l’animal domestique ne participent pas à la chasse. Ils n’acceptent pas ses règles ni ses dangers. Ils se retrouvent pourtant exposés à ses conséquences.
C’est précisément cette différence qui rend la comparaison statistique avec d’autres sports inopérante.
Ne pas aller courir s’il y a chasse ne signifie pas avoir choisi de se faire tirer dessus.
Les chemins, sentiers, forêts et espaces naturels concernés sont, dans leur immense majorité,
légalement accessibles au public.
Y circuler n’est ni une provocation, ni une prise de risque volontaire, mais l’exercice d’un droit d’accès autorisé.Contrairement à ce qui est souvent avancé, la présence de chasseurs ne transforme pas automatiquement un espace public
ou privé ouvert en zone interdite aux autres usages. Courir, marcher ou se promener dans ces lieux ne revient donc pas
à accepter les risques de la chasse, mais à utiliser un espace auquel l’accès est autorisé.Autrement dit, le fait d’être présent dans un espace accessible ne vaut pas consentement à un danger armé exercé par des tiers.
C’est précisément cette dissociation entre accès légal et exposition involontaire au risque qui rend la comparaison
avec les autres sports inopérante.
Le cœur du débat n’est pas quantitatif, mais structurel
La question n’est donc pas de savoir si les accidents de chasse sont plus ou moins nombreux que ceux du trail ou de l’alpinisme.
La question est de savoir qui supporte le risque, et dans quelles conditions.
Comparer des accidents issus d’activités où le risque est choisi à des accidents où il est imposé revient à mélanger deux logiques incompatibles.
Les chiffres peuvent rassurer, mais ils ne répondent pas à la question centrale.
Le débat porte sur la nature du risque, pas sur son volume.
Si l’argument statistique revient aussi souvent, c’est parce qu’il permet de déplacer le débat.
En parlant de pourcentages, on évite de parler de responsabilité, de consentement et d’exposition involontaire.
Pourtant, tant que des personnes non engagées dans la chasse peuvent être concernées par ses accidents,
la comparaison avec d’autres sports restera un faux débat.
Elle ne dit rien de ce qui interroge réellement l’opinion publique.
En résumé, rappeler cette distinction fondamentale n’est pas être anti-chasse.
Ce n’est pas attaquer des individus ni nier la légalité d’une pratique.
C’est simplement refuser une comparaison qui ne repose pas sur des bases équivalentes.
Le débat existe parce que le risque n’est pas réparti de la même manière.
Tant que cette asymétrie persistera, comparer les accidents de chasse à ceux des autres sports restera une manière de passer à côté du sujet.
Informer sur cette différence n’est pas militant. C’est poser correctement le problème.
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