« C’est encore Nicolas qui paie ! » *
Avec un chrono exceptionnel de 1h48’29 sur les pentes du Mont-Ventoux, Manon Coste a survolé le semi-marathon. Mais derrière cette performance sportive impressionnante, une polémique inattendue a surgi : certains commentateurs n’acceptent pas qu’une professeure d’EPS puisse dominer ainsi, insinuant que sa profession lui donne un avantage « injuste ». Une réaction révélatrice des clichés persistants sur les métiers… et des frustrations dans le monde amateur du running.
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Une victoire indiscutable… mais discutée
11,9 km/h de moyenne pour 21,6 kilomètres avec 1610 mètres de dénivelé positif : la performance est bluffante. Manon Coste ne s’est pas contentée de gagner, elle a écrasé la concurrence avec plus de 6 minutes d’avance à l’arrivée. Un exploit que la majorité des suiveurs a salué, mais qui a aussi déclenché des commentaires venimeux sur les réseaux.
En cause ? Son métier de professeure d’éducation physique. Selon certains, ce statut lui offrirait trop de temps libre pour s’entraîner, et donc une « forme de triche » déguisée. Une rhétorique bien connue, souvent recyclée à chaque fois qu’un fonctionnaire brille en compétition.
« Elle est prof d’EPS, normal qu’elle gagne » : un raccourci injuste
Ce genre de remarques, derrière leur apparente légèreté, traduisent une certaine jalousie — mais aussi une incompréhension profonde du sport de haut niveau amateur. Car s’entraîner dur, gérer sa récupération, et performer sur une montée comme celle du Ventoux, cela ne s’improvise pas, même avec des horaires souples.
Être prof d’EPS ne signifie pas passer ses journées à courir autour d’un stade. Cela signifie jongler entre la fatigue nerveuse, la gestion de classes souvent turbulentes, et parfois des heures de trajet entre établissements. Et s’il est vrai que certains emplois du temps facilitent une meilleure organisation de l’entraînement, cela ne remplace ni la discipline, ni le talent.
Réactions en chaîne et débat public
Sur Facebook, les commentaires ont fusé : certains dénoncent le mépris envers les métiers physiques ou en horaires décalés, d’autres défendent le mérite de Manon en soulignant que tout le monde a la possibilité de s’engager dans la voie de l’enseignement.
Un intervenant ironise : « Si c’est si facile d’être prof d’EPS, pourquoi il manque autant de candidats aux concours ? » Une autre souligne : « Peu importe le métier, on ne court pas un semi-marathon avec 1600 D+ sans rigueur. »
Le plus absurde ? C’est que ce débat n’émerge jamais quand un vainqueur est ingénieur, commercial ou artisan. Mais quand une femme, qui plus est fonctionnaire, l’emporte, certains y voient une injustice.
Une femme, une sportive, un modèle
Le plus important reste pourtant la performance. En gagnant avec panache ce semi-marathon exigeant, Manon Coste devient une source d’inspiration pour toutes celles et ceux qui allient vie professionnelle et passion du sport. Elle n’a pas à s’excuser de bien faire son métier et de briller en course.
Quant aux rageux ? Ils sont libres de s’inscrire au concours de l’Éducation nationale, ou de s’entraîner plus dur. Mais ils devraient surtout apprendre à applaudir au lieu de dénigrer.
Résumé des résultats sportifs du semi-marathon du Mont-Ventoux
La 13e édition du semi-marathon du Mont-Ventoux a tenu toutes ses promesses avec un plateau relevé, des conditions idéales et un parcours toujours aussi exigeant. Cette année, l’épreuve a basculé dans une nouvelle dimension grâce à l’appui du sponsor titre Kookabarra et à la présence de coureurs de très haut niveau, venus se mesurer à l’un des tracés les plus redoutés du calendrier français.
Chez les hommes, la grande surprise est venue d’Emmanuel Roudolff-Levisse. Spécialiste du demi-fond et habitué des compétitions sur route, il a su parfaitement gérer son effort pour dominer les 21,6 kilomètres et les 1610 mètres de dénivelé positif. Avec un chrono impressionnant de 1h30’04, il s’impose après une attaque tranchante juste avant le Chalet Reynard, résistant ensuite au retour de Benjamin Polin, qui termine deuxième à seulement 18 secondes. Hassan Chahdi, vainqueur en 2024 et grand favori de l’épreuve, avait pourtant pris les devants en début de course. Mais il a rapidement compris qu’il n’avait pas les jambes de l’an dernier, admettant à l’arrivée avoir été moins bien préparé. Il doit se contenter de la troisième place, en 1h32’36, tout en reconnaissant la supériorité du vainqueur du jour.
Chez les femmes, la course a été littéralement survolée par Manon Coste. À 29 ans, la coureuse dijonnaise a réalisé une montée remarquable, bouclant l’épreuve en 1h48’29. Son rythme a été tel qu’elle s’est imposée avec plus de sept minutes d’avance sur ses deux poursuivantes, Julia Paduch (1h55’30) et Mélanie Lustremant (1h56’24). En se classant 35e au scratch, Manon Coste a démontré qu’elle faisait partie des meilleures spécialistes de la discipline. À l’arrivée, elle a salué une bonne gestion de course et a souligné les conditions parfois compliquées à cause du vent de face. Sa performance a fait l’objet de nombreux commentaires, autant pour sa qualité athlétique que pour son statut de professeure d’EPS, certains internautes cherchant à relativiser son mérite. Mais sur le terrain, aucun doute n’est permis : elle a dominé.
Cette édition a été unanimement saluée pour la qualité de son organisation, avec plus de soixante bénévoles mobilisés tout au long du week-end. Le semi-marathon du Ventoux confirme son statut de rendez-vous incontournable de la course de montagne française, attirant des coureurs toujours plus talentueux et offrant un spectacle sportif de haut niveau. Les débats autour du métier des vainqueurs, eux, sont restés au pied du sommet.
FAQ
*C’est quoi, “C’est Nicolas qui paie” ?
Il s’agit d’un slogan né sur les réseaux sociaux, devenu un mème politique. On y désigne un “bon Français” fictif, blanc, salarié, contribuable, qui serait toujours celui “qui paie pour les autres”. Derrière le ton faussement humoristique, ce hashtag masque un discours classiste et xénophobe, souvent relayé par l’extrême droite. Il oppose “Nicolas”, le méritant, aux “profiteurs” supposés du système.
Quel rapport avec la course à pied ?
Dans les commentaires autour des victoires sportives — comme celle de Manon Coste — on retrouve cette logique : si une personne réussit, c’est forcément qu’elle bénéficie d’un “système” avantageux. Être fonctionnaire, être prof, c’est alors vu non plus comme un métier, mais comme une tricherie déguisée. Comme si ces coureurs ou coureuses ne méritaient pas leur chrono. On sous-entend qu’ils ne sont pas “Nicolas”, donc qu’ils n’ont pas le droit de gagner.
Est-ce qu’un prof a plus de temps pour s’entraîner qu’un ouvrier ?
Parfois oui, souvent non. Ce qui est certain, c’est que chaque métier a ses contraintes : stress, fatigue, horaires. Le vrai privilège, c’est de pouvoir organiser sa semaine autour d’un objectif sportif — et ça, ce n’est pas réservé aux enseignants. Beaucoup d’entre eux sacrifient aussi des soirées, des week-ends et leur énergie mentale. Le raccourci “prof = tricheur du sport” est non seulement faux, mais méprisant.
Faut-il parler du métier des athlètes ?
Seulement si cela éclaire leur parcours. Une aide-soignante qui court la nuit, un enseignant qui cale ses séances entre deux cours, un artisan qui s’entraîne à 6h du matin : oui, c’est intéressant. Mais cela ne doit jamais servir à relativiser leur mérite ou à en faire des boucs émissaires. Derrière chaque dossard, il y a une personne — pas un cliché social.
Pourquoi voit-on autant de profs, kinés ou ostéos performer en trail ou en course à pied ?
Parce que ce sont des métiers proches du corps, qui favorisent une meilleure compréhension de la biomécanique, de l’effort, de la récupération. Ils n’ont pas plus de facilité, mais un rapport plus éclairé à l’entraînement. Ils savent souvent écouter les signaux faibles du corps, éviter les blessures, mieux planifier.
Est-ce que c’est un privilège ?
Ce serait trop simple de le dire ainsi. Oui, un kiné peut s’auto-masser. Oui, une diététicienne sait mieux équilibrer ses glucides. Mais ces compétences, ils les ont acquises avec des années d’étude et de pratique. Ce n’est pas de la triche, c’est du travail. Comme un ingénieur en data pourrait optimiser son plan d’entraînement avec des tableaux Excel très poussés.
Et les médecins du sport ?
Même chose : ils ont des connaissances solides, mais doivent aussi jongler avec des gardes, du stress, et une pression mentale énorme. Ceux qui performent malgré cela le font au prix de sacrifices personnels réels. Là encore, la réussite est souvent moins une question de métier que de discipline et d’organisation.
Faut-il interdire les professions du sport dans les courses amateures ?
Bien sûr que non. Ce genre de débat n’a pas de sens. Il n’existe pas de “ligue des non-professionnels du soin corporel”. La course à pied reste un espace libre, où tout le monde peut s’exprimer à la hauteur de ses moyens. Et parfois, ceux qui ont choisi un métier lié au sport ont juste plus de cohérence entre leur passion et leur profession. C’est une chance, pas une injustice.
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Cet article traite d’un événement sportif relayé sur les réseaux sociaux. Il inclut des citations publiques et des réactions accessibles au grand public dans un but informatif et d’intérêt général. Les opinions rapportées ne reflètent pas nécessairement celles de la rédaction.
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source : ici