Le premier accident de chasse mortel de la saison relance le débat de l’âge limite de la chasse.
Pourquoi peut-on encore chasser à 83 ans ? C’est la question qui surgit après le drame survenu à Laparade, dans le Lot-et-Garonne. Un chasseur de 64 ans a été tué par balle lors d’une battue. Le tireur présumé, âgé de 83 ans, participait lui aussi à l’opération. L’accident s’est produit dans un cadre déclaré, encadré, sécurisé. Et pourtant, il a viré à la tragédie. Quand même les chasseurs sont en danger, qu’en est-il des traileurs et randonneurs qui croisent leur route sur les mêmes sentiers ?
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Accident de chasse mortel à Laparade, rappel des faits
Lors d’une battue aux sangliers à Laparade, dans le Lot-et-Garonne, un homme de 64 ans a été mortellement touché par balle. Le tir proviendrait d’un autre chasseur, âgé de 83 ans, également participant à la battue. Ce drame, survenu un dimanche matin dans un cadre encadré et déclaré, interroge profondément. Si un chasseur expérimenté peut être victime d’un tir, qu’en est-il des coureurs, randonneurs ou vététistes qui partagent les mêmes forêts ? Et surtout, faut-il désormais envisager une limite d’âge pour la pratique de la chasse ?
Une pratique sans limite d’âge
En France, la réglementation de la chasse ne prévoit aujourd’hui aucune limite d’âge maximale. La loi fixe un âge minimum pour obtenir le permis, mais rien n’encadre l’âge à partir duquel il conviendrait d’arrêter. Il est possible de passer le permis de chasser dès 15 ou 16 ans selon les conditions, et de pratiquer la chasse accompagnée à partir de 15 ans après une formation spécifique. L’entrée dans cette pratique est donc encadrée, mais sa sortie, elle, ne l’est pas. Aucun texte n’impose un âge maximal ni un contrôle régulier des aptitudes physiques ou sensorielles.
Quand l’âge devient un facteur de risque à la chasse
La question n’est pas de stigmatiser les chasseurs âgés, mais de reconnaître que certaines facultés essentielles — la vue, l’ouïe, la réactivité, la coordination — déclinent naturellement avec le temps. Dans une battue où plusieurs personnes, des chiens et du gibier évoluent en même temps, la moindre erreur d’évaluation peut avoir des conséquences irréversibles. L’accident de Laparade en est l’illustration la plus dramatique : malgré une organisation structurée, un tir a frappé mortellement un participant. Si un chasseur expérimenté peut succomber à un tir dans un cadre contrôlé, qu’en est-il pour ceux qui passent sur un sentier à quelques mètres de là ?
Ce constat soulève aussi la question de la responsabilité collective.
L’absence de limite d’âge laisse à chacun le soin de s’auto-évaluer, ce qui n’est pas toujours suffisant lorsqu’il s’agit de manier une arme à feu en milieu naturel. L’instauration de contrôles médicaux réguliers pourrait pourtant renforcer la prévention, comme c’est déjà le cas pour la conduite automobile au-delà d’un certain âge dans certains pays européens.
Les sentiers du trail en première ligne
Chaque automne, les traileurs et les randonneurs partagent les forêts avec les chasseurs. C’est une cohabitation fragile. Le changement de saison, la végétation dense et la luminosité variable rendent parfois la visibilité difficile. Les coups de feu résonnent souvent à proximité de chemins balisés, et la peur s’installe. Lorsque même un chasseur formé et équipé devient victime, cela souligne la nécessité d’une vigilance accrue pour tous les pratiquants de sports nature.
De nombreux clubs de trail adaptent désormais leurs sorties en fonction des jours de battue. Certains départements publient des cartes interactives pour signaler les zones de chasse, mais leur mise à jour reste aléatoire. D’autres territoires interdisent purement et simplement les battues pendant les week-ends touristiques. Ces initiatives locales vont dans le bon sens, mais elles ne remplacent pas un cadre national clair sur les conditions d’exercice de la chasse à un âge avancé.
Vers une régulation de l’âge ?
Face à la répétition des drames, plusieurs pistes sont évoquées par les associations de sécurité et les observateurs du monde rural. Certains suggèrent d’instaurer un contrôle médical obligatoire à partir de 70 ou 75 ans pour vérifier les capacités visuelles, auditives et motrices des chasseurs. D’autres estiment qu’il faudrait fixer une limite d’âge symbolique pour l’exercice du tir en battue, par exemple 80 ans, au-delà de laquelle seule la chasse à l’affût ou l’accompagnement seraient autorisés.
Ces mesures, si elles étaient adoptées, permettraient de préserver la dignité des chasseurs âgés tout en réduisant le risque d’accidents. Elles seraient aussi un signal fort envoyé aux pratiquants de sports nature, souvent inquiets à l’idée de croiser des fusils sur leur parcours.
Comment on obtient et conserve son permis de chasse en France
Pour chasser légalement, il faut obtenir le permis de chasser délivré par l’Office Français de la Biodiversité (OFB). L’examen comporte une partie théorique (réglementation, sécurité, reconnaissance des espèces, maniement des armes) et une partie pratique avec des mises en situation sur le terrain. Il peut être passé dès 15 ou 16 ans, selon les cas, et permet une première phase de chasse accompagnée avant d’être totalement autonome.
Une fois le permis obtenu, le chasseur doit chaque année le valider auprès de la Fédération départementale des chasseurs.
Cette validation annuelle inclut une assurance obligatoire et le paiement d’une redevance nationale et départementale. Sans cette démarche, le permis reste valable administrativement mais n’autorise plus la pratique de la chasse.
Contrairement à une idée reçue, le permis de chasser, comme le permis de conduire, n’impose aucun contrôle médical régulier.
Il reste valable à vie, sauf retrait administratif ou judiciaire. En cas d’accident grave ou de faute caractérisée, un juge peut suspendre ou retirer ce droit, mais aucune limite d’âge ni vérification d’aptitude physique ou visuelle n’est prévue.
Pour aider les chasseurs, de nombreuses fédérations départementales mettent désormais en ligne des tutoriels vidéo pour la validation ou le renouvellement du permis de chasser. Ces vidéos, disponibles sur YouTube ou directement sur les sites des fédérations (comme la FDC 04 ou la FDC 69), expliquent comment effectuer sa validation annuelle depuis le portail Guichet Unique ou imprimer son titre chez soi. La Fédération Nationale des Chasseurs centralise également les liens et les démarches sur son site officiel : chasseurdefrance.com.
Courir ou chasser, la même forêt, des règles différentes
Pour les traileurs, la forêt doit rester un espace de liberté et de sérénité. Pourtant, chaque année, la peur refait surface. On court entre deux coups de feu, on change d’itinéraire, on évite certains créneaux horaires. La cohabitation entre chasse et trail devient un exercice d’équilibre, où chacun tente d’exister sans empiéter sur l’autre. Mais à mesure que les drames se répètent, la tolérance s’effrite. Si un chasseur peut mourir d’une balle perdue, qu’est-ce qui protège les autres ?
Réponse à “il y a plus de morts sur la route”
Comparer la route et la chasse n’a aucun sens. La route est un espace public nécessaire, encadré et contrôlé en permanence. Les conducteurs passent des examens, subissent des retraits de points, des contrôles d’alcoolémie et de vitesse. C’est une infrastructure collective indispensable, régulée par l’État.
La chasse, au contraire, est une activité de loisir facultative, pratiquée dans des espaces partagés avec des coureurs, des randonneurs et des familles. Personne n’est obligé d’y participer, et ceux qui l’entendent ne devraient pas mettre les autres en danger.
Rappeler les risques de la chasse n’est pas être “anti-chasse”
C’est défendre la sécurité de tous ceux qui vivent, marchent ou courent dans les mêmes forêts. Les traileurs ne demandent pas la fin de la chasse : ils demandent simplement que leur sécurité soit respectée.
En résumé, le drame du Lot-et-Garonne met en lumière une faille du système : l’absence totale de limite d’âge pour pratiquer la chasse.
À 83 ans, on peut toujours manier une arme létale sans évaluation médicale spécifique. Cette liberté, si elle peut sembler légitime, entre en conflit avec la sécurité collective. La nature n’appartient à personne, mais elle engage la responsabilité de tous. Pour les coureurs, les randonneurs et les habitants, ce drame est un rappel brutal : la forêt n’est pas seulement un terrain de jeu, c’est aussi un espace où la vigilance doit être permanente.
Il est temps de rouvrir le débat, calmement mais fermement. Car courir dans les bois ne devrait jamais signifier risquer sa vie à cause d’un tir trop rapide ou d’un œil fatigué.
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Mention éditoriale de prudence : Cet article a été rédigé dans un objectif d’information et de sensibilisation autour de la sécurité des sentiers et de la cohabitation entre chasseurs, randonneurs et traileurs. Il ne comporte aucune intention de dénigrement à l’égard des chasseurs, des fédérations ou de toute autre partie concernée. Les faits rapportés reposent sur des sources publiques et vérifiées, mais uTrail reconnaît que des erreurs ou imprécisions peuvent toujours survenir dans le traitement d’une actualité en évolution.
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