Débalisage
Trente heures de travaux d’intérêt général, 900 euros d’amende et 3 000 euros de dommages et intérêts : la justice ne plaisante plus avec la sécurité des coureurs.
Acheter un livre
Le post des Grands trails d’Auvergne au sujet du débalisage
Le débalisage d’un trail n’a rien d’anodin.
Quand un coureur s’élance sur les sentiers, il met sa sécurité entre les mains de l’organisation. Un fanion déplacé, un panneau retiré, et le balisage s’effondre. Derrière, c’est tout un système qui peut vaciller : risques d’accidents, retards d’intervention, paniques sur le parcours… En octobre 2024, les Grands Trails d’Auvergne en ont été victimes. Mais cette fois, l’histoire s’est terminée au tribunal — et le verdict est sans appel.
Un flagrant délit… et une mamie de 89 ans
Tout commence à Vollore-Montagne, dans le Puy-de-Dôme, trois jours après le début du balisage officiel de l’épreuve. Catherine G. et sa mère Irène, 89 ans, repèrent deux individus en train de retirer les panneaux de sécurité et d’arracher les fanions. Ni une ni deux, elles photographient le véhicule, un pick-up blanc, et notent la plaque d’immatriculation. Grâce à ce réflexe, la plainte est déposée avec preuves à l’appui. Et cette fois, la procédure judiciaire est rapide.
Le 3 juin 2024, l’un des auteurs, André P., est convoqué devant le tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand. Il refuse de livrer l’identité de son complice, mais ne peut esquiver sa responsabilité. Il est condamné à trente heures de travaux d’intérêt général, une amende de neuf cents euros et doit verser trois mille euros à l’organisateur, l’association Auvergne Rhône-Alpes Trail Nature Team.
Une peine exemplaire… et solidaire
Fait rare dans ce genre d’affaire : les trois mille euros de dommages et intérêts ne resteront pas dans les caisses de l’organisation. L’association a annoncé vouloir les reverser intégralement à une structure caritative venant en aide aux enfants malades et à leurs parents. Un geste fort, symbole d’un sport qui reste humain, solidaire et profondément ancré dans les valeurs de respect.
Mais au-delà de ce bel élan, ce jugement envoie un signal clair : débalisage ne rime plus avec impunité.
Une affaire loin d’être isolée
Déjà en 2022, une condamnation similaire avait eu lieu sur la commune d’Augerolles. Et cette année encore, plusieurs organisations de trail en France signalent des cas de vandalisme : panneaux volés, fanions arrachés, parcours détournés. Chaque fois, les organisateurs doivent mobiliser des bénévoles supplémentaires pour sécuriser à nouveau les sections touchées, souvent en urgence, parfois la veille de l’épreuve.
À Millau, dans le Jura, en Bretagne, les récits se répètent : des pick-up repérés, des personnes âgées hostiles, des randonneurs “zélés” ou même des actes bien plus dangereux, comme des fils tendus au niveau des jambes.
Pourquoi tant de haine ?
À la barre, André P. n’a pas donné d’explication. Pas d’idéologie, pas de protestation. Juste un silence. Et c’est peut-être ce qui choque le plus. Car derrière ces gestes, il y a souvent une forme de ressentiment diffus : contre le bruit, contre le monde, contre une jeunesse qui court dans « leurs chemins ». Comme le résume un bénévole : “certains n’aiment pas les quads, d’autres les traileurs, d’autres encore les VTT… et parfois, ils passent à l’acte.”
La réponse des coureurs : la solidarité
Cette affaire a aussi mis en lumière la force du collectif trail. Bénévoles, coureurs, riverains engagés, comme Irène et sa fille Catherine : tous réaffirment que la montagne est un espace de partage. Les messages de soutien affluent, les engagements se renforcent, les inscriptions continuent. À deux semaines de la prochaine édition, les organisateurs tiennent bon.
“Nous ne lâcherons rien”, écrit Luc Aubert, président du club organisateur. “Pour nous, pour tous les autres, et pour notre territoire.”
La condamnation d’un débalisage n’est pas une anecdote. C’est une première pierre posée pour sanctuariser l’espace de jeu et de vie des traileurs. Et c’est aussi un hommage à tous les bénévoles anonymes, qui plantent, tendent, posent et vérifient — souvent sous la pluie, souvent dans l’ombre.
Alors non, débalisage ne sera plus synonyme d’impunité.
Lire aussi
- Suisse : vandalisme sur le Swiss Canyon Trail, la sécurité des coureurs menacée(S’ouvre dans un nouvel onglet)
- 4 solutions pour éviter le débalisage des trails(S’ouvre dans un nouvel onglet)
- Cette pratique menace la sécurité des coureurs : attention au débalisage pendant les courses de trail !(S’ouvre dans un nouvel onglet)