Fin de States of Elevation
Les chaussures utilisées par Kilian Jornet
Les chaussures utilisées par Kilian Jornet
Kilian Jornet a fini States of Elevation, 72 sommets en 31 jours
Du Longs Peak au Mount Rainier, Kilian Jornet a bouclé un projet hors norme reliant 72 sommets américains de plus de 14 000 pieds. Retour sur une odyssée unique dans l’histoire du trail.
31 jours. 72 sommets. Une ligne continue tracée à la seule force humaine à travers l’Ouest américain.
Kilian Jornet vient d’achever States of Elevation, son projet le plus ambitieux depuis sa traversée de l’Himalaya. Du Colorado au Washington, en passant par l’Utah, la Californie et l’Oregon, il a gravé les 72 « fourteeners » – ces sommets emblématiques américains culminant à plus de 14 000 pieds, soit environ 4267 mètres. Un exploit hors norme, sans assistance motorisée, qui mêle ultra-endurance, alpinisme, cyclisme et esprit de liberté. Voici le récit complet.
Qu’est-ce que States of Elevation ?
States of Elevation est un projet à la fois simple et fou : relier, en une seule fois, les 72 sommets de plus de 14 000 pieds de l’Ouest américain. Il ne s’agit pas d’un challenge officiel, ni d’un FKT homologué, mais bien d’une création de Kilian Jornet lui-même. L’idée ? Explorer l’espace entre les montagnes, traverser les États-Unis à la seule force de ses jambes, en courant, grimpant, et pédalant.
Son point de départ : le Longs Peak, dans le Colorado. Son point d’arrivée : le mythique Mount Rainier, dans l’État de Washington. Entre les deux, un itinéraire démentiel entre crêtes, routes, sommets, glaciers, tempêtes, bivouacs, rires et galères.
Un projet physique hors du commun
States of Elevation, c’est plus de 2000 kilomètres à pied et à vélo. Plus de 100 000 mètres de dénivelé positif cumulé. Près de 260 heures de mouvement. Huit jours de pluie. Des dizaines de nuits dehors. Une fatigue extrême.
Mais aussi une incroyable maîtrise du corps, une gestion exemplaire de l’énergie et une connaissance parfaite de la montagne. Là où d’autres exploseraient en vol au bout de cinq jours, Kilian a tenu un mois, sans un seul vrai jour de repos, enchaînant chaque jour plusieurs sommets, des liaisons à vélo de plusieurs centaines de kilomètres, et parfois des ascensions en neige, en tempête ou sous un soleil écrasant.
Une éthique pure et engagée
Comme à son habitude, Kilian Jornet a mené ce projet sans moteur, sans hélicoptère, sans assistance mécanique. L’objectif : découvrir et connecter les sommets par les moyens les plus sobres possibles.
Pas question d’enchaîner les sommets par segments, ou de prendre l’avion entre deux massifs. States of Elevation, c’est avant tout un hommage au mouvement humain, à la lenteur, à l’engagement et à la beauté brute des espaces sauvages américains.
Pourquoi c’est symbolique
Le final au Mount Rainier, 4392 mètres, est hautement symbolique. C’est le sommet iconique du nord-ouest américain. C’est aussi une montagne glaciaire difficile, où les crevasses et les conditions météo peuvent rendre chaque tentative périlleuse. En y mettant un point final, Kilian boucle une ligne qu’il a rêvée : celle d’une diagonale sauvage et poétique à travers l’Amérique.
Dans ses mots, « this was never about the numbers ». Ce n’était pas une affaire de chiffres. C’était une affaire d’émotions, de crêtes, de solitude, de beauté. Il parle de « riding the spaces in between » : chevaucher les espaces entre les sommets. C’est là tout le sens de ce projet. Le dénivelé n’est qu’un prétexte. Les chiffres, une excuse. Le vrai but était d’être en osmose avec la nature, et avec les autres.
Une performance historique
Dans le monde du trail et de l’alpinisme, States of Elevation s’inscrit déjà comme un jalon historique. Rares sont les projets aussi engagés, aussi longs, aussi cohérents et portés par une telle intégrité. Kilian n’a pas cherché le record. Il a cherché la ligne, le fil, la pureté. Il a repoussé les limites de ce qu’un corps humain peut encaisser en montagne, tout en gardant sa poésie intacte.
Pour les néophytes, c’est l’occasion de découvrir une forme de sport où l’objectif n’est pas de battre un adversaire, mais de relier des points sur une carte. Pour les initiés, c’est un sommet d’inspiration et d’humilité.
En résumé, l’essentiel n’est pas le sommet
States of Elevation est terminé. Mais le message reste. Dans un monde obsédé par les résultats, les likes, les classements, Kilian Jornet nous rappelle que l’essentiel est ailleurs. Dans l’espace entre les sommets. Dans le désir de mouvement. Dans l’envie d’explorer.
Ce projet restera comme l’un des plus grands de sa carrière. Non pas pour les chiffres, mais pour la ligne qu’il a tracée, à travers les montagnes, et dans nos imaginaires.