Il court des centaines de kilomètres en haute altitude, sans filtration d’eau, mais avec… des sacs à crottes dans son sac. Derrière ce détail improbable se cache une révolution invisible du trail : le microbiote.
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Kilian Jornet n’a jamais fait comme tout le monde. Il court plus haut, plus longtemps, avec moins de matos et plus de rigueur. Mais ce qu’on sait moins, c’est que depuis plusieurs années, il ramène ses selles de montagne. Non pas par fétichisme ou par contrainte sanitaire, mais pour les analyser, en partenariat avec des laboratoires spécialisés.
Son objectif : comprendre ce que devient son microbiote intestinal en conditions extrêmes.
Oui, même là où aucun GPS ne passe, il pense à ses bactéries. Et si c’était là, dans ce lien avec son intestin, que résidait le secret de sa longévité sportive ?
Un projet scientifique embarqué dans les sacs à dos
Tout commence avec une idée simple : le corps n’est pas une machine, et les performances en ultra ne dépendent pas que des jambes ou du mental. L’intestin joue un rôle crucial dans l’immunité, la gestion du stress, l’assimilation des nutriments… et donc dans la capacité à résister à l’effort extrême. C’est ce qu’on appelle le microbiote, cet écosystème de bactéries qui peuplent notre système digestif. Depuis plusieurs années, Kilian participe à des études scientifiques sur la flore intestinale des sportifs d’endurance, en lien avec des universités et des instituts de recherche. Pendant ses aventures au long cours, il prélève régulièrement des échantillons de selles et les conserve dans des contenants spécifiques, protégés du gel et des chocs. À son retour, ces échantillons sont analysés en laboratoire, pour observer les variations du microbiote en fonction de l’altitude, de l’effort, du sommeil, du stress et de l’alimentation.
Des probiotiques comme carburant caché
Au fil des années, Jornet a appris à manipuler ses bactéries comme d’autres peaufinent leur VO₂ max. Il utilise des probiotiques ciblés, en particulier des souches de lactobacillus, connues pour leurs effets bénéfiques sur l’endurance, la récupération, la digestion et même le moral. Lorsqu’il n’a pas accès à des aliments fermentés naturels comme le kimchi, le yaourt ou le kéfir, il emporte des gélules ou des sachets de compléments spécifiques, notamment de la marque Lyvecap, qui développe des probiotiques premium pour sportifs de haut niveau. Ces bactéries ne sont pas des gadgets : elles permettent de mieux absorber les calories, de réduire les inflammations et même de limiter certains effets du mal des montagnes. C’est un levier de performance invisible… mais fondamental.
Le plus surprenant, c’est la conclusion que Kilian tire de toute cette démarche.
Selon lui, un microbiote bien nourri et équilibré devient un bouclier naturel, capable de faire face aux bactéries qu’on trouve dans l’eau non traitée. Résultat ? En pleine montagne, il ne filtre plus son eau. Il boit directement dans les torrents, les lacs, les névés.
« Je n’ai jamais eu de problème. Si ton système digestif est fort, il sait se défendre », affirme-t-il.
Une approche qui fait évidemment débat, et que personne ne devrait imiter sans précautions, notamment en France où les parasites comme les giardia peuvent entraîner de graves infections. Mais pour Kilian, cette autonomie digestive est aussi une autonomie tout court : moins de filtres, moins de poids, moins de dépendance au matériel.
Le trail de demain se joue dans le ventre
L’intestin est souvent considéré comme notre “deuxième cerveau”. Dans le cas de Kilian Jornet, c’est peut-être le premier poste de commandement. Il a compris avant les autres que l’endurance n’est pas seulement une affaire de muscles ou de VO₂ max, mais aussi de symbiose avec son environnement intérieur. En traquant l’évolution de son microbiote, il cherche à optimiser sa capacité à encaisser, à digérer, à résister. Cela explique pourquoi il est capable de supporter plusieurs semaines de trail intensif, à haute altitude, sans tomber malade, sans puiser dans ses réserves mentales. Et cela ouvre aussi une porte fascinante pour les traileurs amateurs : et si votre prochain palier de progression ne passait pas par plus de kilomètres, mais par une meilleure alimentation intestinale ?
Ce que vous pouvez retenir (et faire)
Non, vous n’avez pas besoin d’envoyer vos selles en laboratoire avant votre prochain 50 km. Mais vous pouvez vous inspirer de cette démarche :
- Favorisez les aliments fermentés naturels dans votre quotidien (yaourt non pasteurisé, kéfir, choucroute crue, miso…).
- Réduisez les antibiotiques et produits ultra-transformés, qui détruisent votre flore.
- Consultez un spécialiste si vous avez des troubles digestifs chroniques ou une récupération difficile.
- Envisagez les probiotiques, mais en ciblant les bonnes souches, adaptées à vos besoins (sport, stress, digestion…).
Et surtout, souvenez-vous que le trail, ce n’est pas que des jambes. C’est une aventure qui commence dans le ventre, là où tout votre équilibre se joue.






