Jirishanca : trois alpinistes critiqués pour avoir inventé un sommet
Quand l’ambition dépasse la réalité, la montagne remet vite les pendules à l’heure. C’est ce qui s’est passé sur les flancs du Jirishanca, un sommet andin redouté, où trois alpinistes chevronnés – Dani Arnold, Alexander Huber et Simon Gietl – se sont arrêtés avant le sommet officiel, tout en annonçant une ascension réussie… sur un sommet qui n’existe pas. Une polémique qui questionne l’éthique en haute montagne, mais qui parle aussi à tous ceux qui pratiquent les sports outdoor, du trail au ski-alpinisme.
Jirishanca, une ascension spectaculaire, mais incomplète
À 6 125 mètres d’altitude, le Jirishanca est un monstre de calcaire et de glace situé dans la cordillère Huayhuash, au Pérou. Le 15 juillet 2025, les trois grimpeurs annoncent fièrement avoir ouvert une nouvelle voie baptisée Kolibri (7a+ A2), qu’ils affirment avoir menée jusqu’au « sommet est » de la montagne.
Problème : ce sommet est… n’existe pas.
Aucun topo, aucun alpiniste passé par là ne mentionne une telle élévation secondaire. Le point culminant du Jirishanca, lui, reste bien plus haut, au bout d’une arête technique que les trois alpinistes n’ont pas empruntée.
Pourquoi cela choque le monde de l’alpinisme
En alpinisme, comme dans le trail longue distance, la ligne d’arrivée ne se négocie pas. C’est une règle tacite : ou bien l’on atteint le sommet, ou bien l’on s’arrête en cours de route. Et si l’on renonce, il n’y a aucune honte — tant que l’on l’assume.
Ce qui a mis le feu aux poudres ici, c’est cette tentative de redéfinir a posteriori un objectif. En désignant un simple replat comme un sommet à part entière, les alpinistes ont brouillé la lecture de leur exploit. Ils ne sont pas les premiers à rebrousser chemin dans des conditions périlleuses, mais rares sont ceux qui revendiquent une victoire en changeant la ligne d’arrivée.
Pourquoi ne pas juste dire : « On a renoncé » ?
Des figures respectées du milieu comme Josh Wharton ou Quentin Roberts, eux-mêmes familiers de cette montagne, n’ont pas mâché leurs mots. Le point atteint par Arnold et ses compagnons est selon eux un replat, situé à plusieurs longueurs techniques du sommet principal. Et ce n’est pas qu’une question de distance : la dernière section est un vrai morceau, avec de la neige instable et des pentes raides qui demandent une stratégie d’ascension bien rôdée.
Il ne s’agissait donc pas d’un sommet secondaire, mais d’une tentative avortée, ce qui aurait pu être tout aussi respectable… si elle avait été assumée comme telle.
L’alpinisme sous pression : ego ou sponsor ?
Ce genre de polémique résonne avec les dérives de notre époque : images retouchées, storytelling millimétré, et une pression constante pour « réussir » — même quand le terrain impose le contraire. Quand on est grimpeur pro, que l’on vit des sponsors et des expéditions, l’échec n’est pas bankable. D’où peut-être la tentation de transformer une tentative en sommet.
Mais au lieu d’être saluée, cette posture a généré un malaise. Elle envoie un signal confus aux jeunes générations d’alpinistes et d’outdoor addicts : faut-il réussir à tout prix ? Même au risque de tordre la réalité ?
Une leçon à tirer pour le trail et les sports d’endurance
Dans le monde du trail, on voit émerger des questions similaires. Doit-on valider un FKT si le parcours a été raccourci pour cause de météo ? Un coureur qui abandonne au 95e km sur 100 peut-il dire qu’il a « presque terminé » ? Ces dilemmes éthiques deviennent fréquents à mesure que les records, les performances et les publications Instagram prennent plus de poids que l’expérience vécue.
La réponse vient peut-être de l’alpiniste Colin Haley, qui écrivait dans un texte célèbre :
« Il n’y a pas de honte à échouer. Ce qui importe, c’est d’être honnête. »
Résumé
Trois alpinistes ont annoncé en juillet 2025 avoir gravi un nouveau sommet du Jirishanca au Pérou. En réalité, ils se sont arrêtés avant le sommet principal et ont renommé un replat « sommet est ». Une décision critiquée comme contraire à l’éthique de l’alpinisme.
FAQ – Comprendre la polémique du Jirishanca
Quel sommet ont gravi Arnold, Huber et Gietl ?
Ils ont atteint un replat situé sur l’arête est, bien en dessous du sommet principal du Jirishanca (6 125 m).
Existe-t-il un « sommet est » officiel ?
Non. Aucune carte ni aucun topo ne mentionne un sommet secondaire à cet endroit.
Pourquoi ne pas avoir continué ?
Les conditions de neige sur la partie sommitale étaient jugées trop dangereuses par la cordée.
Pourquoi cela suscite-t-il une polémique ?
Parce qu’en renommant un replat en sommet, la cordée a voulu faire passer une tentative incomplète pour une réussite, ce qui est mal perçu dans le monde de l’alpinisme.
Cela arrive-t-il dans d’autres disciplines ?
Oui, des controverses similaires existent dans le trail, le ski-alpinisme ou l’ultra-cyclisme, où la notion de ligne d’arrivée ou de « sommet » est aussi symbolique que concrète.
- source : ici
- Cet article repose sur des faits publics et des échanges rapportés dans la presse spécialisée. Il ne remet pas en cause les compétences techniques des alpinistes mentionnés, mais propose une réflexion sur l’éthique en montagne, dans un cadre journalistique et informatif. Toute demande de rectification ou de droit de réponse peut être adressée à la rédaction.
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