Il crée un short à 29 dollars, le porte à l’UTMB, et secoue toute l’industrie du trail
Alex King, coureur de l’ombre devenu entrepreneur
En septembre 2025, Alex King remporte au Canada l’Ultra-Trail Whistler by UTMB sur 100 km, avec plus de 3 000 m de D+. Il laisse son poursuivant à plus de 30 minutes. Mais ce jour-là, plus que sa victoire, c’est sa tenue qui attire l’attention. Short à 29 dollars, t-shirt à 22, sac d’hydratation à 84… Tout vient d’une marque qu’il a lui-même fondée un an plus tôt : Terignota.
King n’est pas une star. Il n’a jamais été sur les podiums de l’UTMB ou dans les campagnes marketing de Hoka ou Salomon. C’est un coureur discret, déterminé, qui a passé des années à essayer de percer. Jusqu’au jour où il a compris qu’il ne décrocherait probablement jamais le sponsoring rêvé. Alors, au lieu d’attendre qu’on lui tende la main, il a décidé de créer ses propres règles. Et ses propres vêtements.
Pourquoi créer une marque quand on court déjà en pro ?
L’idée ne vient pas d’un business plan. Elle naît d’un ras-le-bol. En 2024, Alex est à Boulder pour un stage d’entraînement. Il entre dans un magasin spécialisé pour acheter deux paires de chaussettes. Total : 50 dollars. « C’est du tissu, pas du métal précieux », pense-t-il en sortant. Ce moment le travaille. Il commence à dessiner ce que serait, pour lui, une bonne chaussette de trail : technique, solide, confortable, mais sans fioritures inutiles. Et surtout, abordable.
Il lance un premier prototype. Puis un deuxième. Les ventes suivent. Alors il continue : shorts, tee-shirts, casquettes, sacs. En parallèle, il court toujours. Mais plus avec l’idée de briller. Il court pour tester ses créations. Pour incarner son projet. Et très vite, les résultats lui donnent raison.
Des produits testés sur le terrain, par ceux qui en ont besoin
Fin 2024, il lance officiellement Terignota. La marque commence avec 4 produits : un short à 29 dollars, un tee-shirt à 22, une casquette à 19 et des chaussettes à 9,75 dollars. Aucune publicité, aucun revendeur, aucun budget communication. Seulement un site web, quelques publications Instagram, et beaucoup de bouche-à-oreille.
Un an plus tard, Terignota s’affiche sur les sentiers du Mont-Blanc. À l’UTMB 2025, Lauren Puretz, mère de famille de 42 ans et gynécologue à plein temps, termine 8e féminine. Elle court en short Terignota. Deux jours plus tôt, Claire DeVoe prend la 12e place de l’OCC, aussi en Terignota. Ni l’une ni l’autre n’est sponsorisée. Elles ont acheté leur tenue. Et elles l’ont portée sur toute la course, dans le froid et sous la pluie, sans jamais changer.
Une marque artisanale, pensée depuis un van
Aujourd’hui encore, Alex King gère tout seul l’intégralité de la marque. Il emballe les commandes, répond aux clients, gère les stocks… depuis deux chambres d’hôtel désaffectées à Leavenworth, dans l’État de Washington. Loyer mensuel : 700 dollars. Pas de show-room, pas de bureau design. Mais des cartons, un ordinateur, et une obsession : proposer le meilleur possible au prix le plus juste.
Sa méthode : une gamme volontairement courte, aucun renouvellement de collection, une seule version par produit, et zéro soldes. Ça évite les invendus, réduit les coûts, et surtout, ça garde une cohérence. Ce que Terignota vend, c’est du fiable. Pas du marketing.
Quand on entend « Terignota ! » crié depuis le brouillard sur les sentiers de l’UTMB, ce n’est pas du marketing. C’est une reconnaissance spontanée, née du terrain. Terignota incarne une envie de simplicité, une rupture avec le trail business, une manière de courir libre, sans se ruiner et sans frimer.
Éthique, transparence et engagement écolo
Mais Terignota ne s’arrête pas au prix. Tous les emballages sont sans plastique, les matières utilisées sont en passe de devenir 100 % recyclées. Et King prévoit de publier en 2026 un rapport complet sur les conditions de fabrication. Il travaille avec les mêmes usines que des géants comme Hoka ou REI. Mais il veut aller plus loin : tout montrer, tout dire, tout assumer.
Sur Instagram, il publie même ses marges, les coûts de production, et la répartition exacte du prix payé par le client. Une transparence rare, presque choquante dans un milieu habitué aux discours léchés et aux marges opaques.
Et après ?
Alex King ne prévoit pas de levée de fonds, ni de lancement dans les grands magasins. Il ne veut pas devenir « la nouvelle Patagonia du trail ». Il veut rester simple, utile, cohérent. Il sait qu’il devra peut-être recruter, agrandir l’espace de stockage, se payer un vrai salaire. Mais il refuse de perdre son cap. Ce n’est pas l’hyper-croissance qui l’intéresse. C’est la justesse.
En résumé Alex King n’a pas réinventé la roue. Il a juste posé une question simple : pourquoi faut-il payer aussi cher pour bien courir ?
Et il a construit la réponse, pas à pas, avec honnêteté et patience. Terignota n’est peut-être qu’au début de son histoire. Mais déjà, elle rappelle à tout un milieu que la performance ne dépend pas toujours du prix de l’étiquette. Et que le trail peut encore être une aventure où l’on choisit ses valeurs autant que ses sentiers.
Le site Terignota de Alex King
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