Quand même les petits événements deviennent inaccessibles
On connaissait l’engouement pour les grands trails médiatisés, les UTMB et autres Diagonales. Mais désormais, la fièvre du dossard touche aussi les petites organisations. En moins de deux minutes, les inscriptions à la randonnée nocturne des Nuits blanches du Pilat se sont envolées. Une performance qui en dit long sur l’état actuel du trail français : saturé, passionné, et avide de rendez-vous authentiques.
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Dimanche 16 novembre à 18 heures, les organisateurs des Nuits blanches du Pilat n’ont même pas eu le temps de cliquer sur « rafraîchir » que les 700 places de la « Rando hivernale féerique » étaient déjà parties.
Deux minutes plus tard, c’était complet. Plateforme saturée, bugs de connexion, participants prévoyants avec alarme sur téléphone : cette simple marche nocturne du Pilat, ouverte depuis 2016, a connu une ruée impressionnante.
Et ce n’est pas un cas isolé. Toutes les autres épreuves proposées par l’association « Sang pour sang sport » affichent complet. Trail, randonnées festives, soirées à thème ou hommages historiques, tout part en quelques jours… voire quelques minutes. Le trail principal, « La Nuit blanche du Pilat », accueillera cette année 1 500 coureurs, contre 1 700 en 2024, et là aussi les inscriptions n’ont pas traîné.
Pourquoi cet engouement si soudain pour un trail nocturne dans le massif du Pilat ?
Parce qu’il cumule tout ce que recherchent les traileurs et randonneurs hivernaux : une atmosphère unique, un départ de nuit sous les flocons, des fumigènes au départ, une ambiance familiale et chaleureuse à l’arrivée. Et bien sûr… une tartiflette géante pour conclure.
Les éditions passées ont forgé une réputation à part dans le calendrier hivernal. On ne parle pas ici d’un événement élitiste, mais bien d’un rendez-vous populaire, accessible et festif, où la frontale devient un outil de communion. L’organisateur, Michaël Bosc, le résume parfaitement : « Ce n’est pas la course qu’on fait tous les week-ends ».
Des randos thématiques, et une mémoire vivante
Les Nuits blanches du Pilat ne se contentent pas de courir ou marcher. Chaque événement propose une immersion dans un univers différent. Randonnée des Illuminés en clin d’œil à la Fête des Lumières de Lyon, Rando de la Saint-Patrick avec tireuses à bières au ravito, ou encore la Rando des Maquisards, qui rend hommage à des résistants polonais massacrés en 1944. À chaque fois, l’idée est de créer une expérience complète : sportive, culturelle et humaine.
Cette dimension mémorielle et locale, ajoutée à une logistique millimétrée (ravitos fluides, ambiance conviviale, accompagnants valorisés), donne au projet une âme rare. Et cela se ressent : certains participants reviennent d’année en année, souvent accompagnés d’amis conquis par le bouche-à-oreille.
Pourquoi même les « petits trails » saturent
On ne peut plus simplement s’inscrire « au dernier moment » à la course du village. Ce phénomène dépasse le simple effet de mode. Il est le reflet d’une transformation profonde de la pratique : multiplication des licenciés, banalisation de la frontale, explosion des inscriptions en ligne, et surtout envie d’évasion post-COVID qui ne retombe pas. Résultat : même les événements à taille humaine, avec peu de communication et une identité locale forte, se retrouvent pris d’assaut. Le trail devient une discipline sous tension, où l’inscription devient une épreuve en soi. À force de saturation, c’est l’esprit même du trail — liberté, simplicité, convivialité — qui risque de se diluer.
En résumé, les Nuits blanches du Pilat, c’est une organisation responsable… et victime de son succès
Le paradoxe, c’est qu’un événement pensé pour rester à taille humaine doit désormais gérer sa propre popularité. Les organisateurs refusent d’ouvrir les vannes trop largement, pour préserver la qualité d’accueil et éviter la saturation des sentiers. Résultat : certains restent sur le carreau. Pour eux, une plateforme de revente est désormais en place. Et d’autres idées sont à l’étude pour absorber cette demande croissante.
En attendant, les éditions à venir restent limitées : cinq événements hivernaux, pas un de plus. Une croissance maîtrisée, au service de l’expérience. Mais une chose est sûre : à l’image des plus grandes courses du calendrier, les « petits » trails n’en sont plus vraiment. Il faut désormais être aussi rapide au clic qu’en montée pour décrocher son dossard.
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