Depuis la fin du certificat médical obligatoire pour s’inscrire à une course, le sujet refait surface à chaque décès sur une épreuve.
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À chaque fois, les mêmes interrogations surgissent : la prévention a-t-elle été affaiblie ? Le système précédent n’était-il pas plus sûr ? Ces questions méritent une réponse fondée sur des faits, pas sur des impressions.
Le Parcours Prévention Santé (PPS), qui a remplacé le certificat médical, ne marque pas un recul du suivi médical. Il traduit un changement de logique : passer d’un contrôle administratif généralisé à une prévention individualisée, fondée sur la responsabilité et l’information.
Le certificat médical : un dispositif administrativement solide, médicalement fragile
Pendant près de deux décennies, tout coureur non licencié devait présenter un certificat de non-contre-indication à la pratique de la course en compétition. Sur le papier, l’intention était claire : assurer qu’un médecin avait vérifié l’absence de risque manifeste avant d’autoriser la participation. Dans la pratique, la réalité s’est progressivement éloignée de ce principe.
La consultation, censée être complète, se limitait souvent à un bref échange : quelques questions sur l’entraînement, la présence éventuelle de douleurs, parfois la tension artérielle mesurée à la hâte. Dans de nombreux cas, la signature était donnée sans examen clinique réel, parfois même sans rencontre. Les médecins du sport et les fédérations savaient que cette dérive était devenue la norme.
Cette situation avait deux conséquences. D’abord, elle entretenait une illusion de sécurité : le coureur, muni de son certificat, se croyait protégé. Ensuite, elle détournait l’énergie médicale vers un acte administratif, sans valeur préventive. Les données épidémiologiques le confirment : la fréquence des accidents cardiaques ou des morts subites à l’effort n’a jamais diminué durant la période où le certificat était obligatoire.
Les causes de ces accidents sont aujourd’hui bien identifiées.
- Avant 35 ans, il s’agit le plus souvent de cardiomyopathies génétiques ou de canalopathies : maladies du muscle cardiaque ou de la conduction électrique, souvent silencieuses, que l’examen clinique simple ne détecte pas.
- Après 35 ans, la majorité des décès relèvent d’une maladie coronarienne, parfois ignorée du sujet, dont le premier signe peut être l’accident lui-même.
Dans la grande majorité des cas, une visite médicale standard ne permettait pas de dépister systématiquement ces situations. Si le médecin était consciencieux, il cherchait des signes d’appel par un ensemble de questions posées (Existe-t-il des douleurs thoraciques à l’effort ? Un essoufflement inexplicable ? Des pathologies dans la famille ? Des facteurs de risque particuliers ? Etc.)
En cas de présence de ces signes d’appel, le médecin pouvait prescrire des examens complémentaires comme un électrocardiogramme, un test d’effort ou une coronarographie. Ces examens complémentaires pouvaient mettre en évidence certaines pathologies invisibles ou asymptomatiques jusqu’à là. Tant mieux. Mais même le meilleur examen complémentaire n’a pas la puissance nécessaire pour démasquer 100% des pathologies invisibles. On estime en moyenne qu’un test d’effort a par exemple une sensibilité de 75% environ pour un sportif.
Au total, on avait un système qui prenait énormément de temps aux médecins, qui ne protégeait pas à 100% et qui souvent apportaient une fausse réassurance aux gens. Ce constat a conduit les instances sportives et médicales à revoir le dispositif. L’objectif n’était pas de supprimer la médecine du sport, mais de recentrer son rôle : intervenir quand la situation l’exige, et non par réflexe administratif.
Le Parcours Prévention Santé : une méthode moderne et structurée
Le PPS, mis en place par la Fédération Française d’Athlétisme, s’appuie sur les recommandations conjointes de la Société Française de Cardiologie (SFC) et du Club des Cardiologues du Sport (CCS). Il repose sur une idée simple : informer d’abord, orienter ensuite. Plutôt que de vous envoyer systématiquement chez le médecin afin qu’il vous pose des questions afin de savoir s’il fallait faire des examens complémentaires, on vous pose directement les mêmes questions. Si c’est 100% bon : pas besoin d’aller chez le médecin. Par contre au moindre doute : consultation médicale.
Le parcours se déroule en ligne. Il dure une dizaine de minutes et comprend quatre séquences pédagogiques successives.
Identifier les risques cardio-vasculaires
Une première partie rappelle les symptômes qui doivent immédiatement conduire à consulter dans les heures ou jours qui suivent les symptômes :
- douleur thoracique à l’effort,
- palpitations inhabituelles,
- essoufflement disproportionné,
- malaise inexpliqué.
Ces signaux ne doivent jamais être ignorés. Leur présence peut être le signe d’une pathologie grave, potentiellement mortelle qui doit immédiatement être cherchée et traitée.
Reconnaître ses facteurs de risque
Le coureur évalue sa situation personnelle : âge, tabagisme, diabète, cholestérol, hypertension, antécédent familial de maladie cardiaque, pathologie chronique connue. En cas d’un seul facteur de risque, une consultation médicale s’impose avant toute compétition :
- Être une femme de plus de 45 ans ou un homme de plus de 35 ans reprenant le sport sans évaluation préalable ;
- Cumuler au moins deux facteurs de risque : âge ≥ 50 ans, tabagisme, diabète, cholestérol, hypertension ;
- Avoir un suivi pour une maladie chronique ;
- Avoir une pratique sportive intensive ou en compétition après 60 ans ;
- Avoir des antécédents familiaux de mort subite inexpliquée ou de cause cardiaque
- Avoir un membre de la famille qui a eu une pathologie cardiaque avant ses 35 ans.
- Avoir une baisse inexpliquée de ses performances.
Cette liste est volontairement très large. Le but est de ratisser largement et de renvoyer rapidement chez le médecin toute personne qui serait à risque.
Prendre les précautions nécessaires
C’est la partie la plus importante et la plus mal comprise. Elle définit les cas précis où une consultation médicale ou un suivi sont recommandés. Si vous êtes dans l’un de ces cas, une consultation médicale est très fortement recommandée avant de se lancer dans une compétition ou une course.
- Absence totale d’électrocardiogramme réalisé dans le passé. (La FFA recommande qu’au moins un ECG ait été fait une fois dans la vie adulte.)
- Au cours des douze derniers mois :
- arrêt du sport supérieur à trente jours pour raison de santé,
- mise en route d’un traitement médicamenteux prolongé (hors contraception et désensibilisation allergique),
- Penser avoir ou que l’on nous ait déjà fait remarquer qu’on a un problème avec la nourriture
- Absence de règles depuis plus de trois mois chez la femme,
- Avoir déjà eu un traumatisme crânien
- Ressentir le besoin d’un avis médical avant de poursuivre la pratique.
Ces critères sont très larges et ne sont pas à prendre à la légère. Combien de personnes se sont lancées dans une compétition alors qu’elles n’avaient jamais fait d’électrocardiogramme ou qu’elles pensaient manger souvent trop gras ? Dans la logique du PPS, ces personnes auraient dû aller consulter un médecin avant la compétition. Le PPS n’empêche pas le contact avec le médecin : il le déclenche quand il est justifié.
Attestation finale et validité
À la fin du parcours, le coureur atteste sur l’honneur avoir lu les informations et s’engage à consulter un professionnel en cas de doute ou d’un des critères précédents. L’attestation obtenue, valable trois mois, doit être renouvelée avant chaque nouvelle course. Ce principe oblige à une réactualisation régulière de la vigilance sanitaire, au lieu d’un certificat valable un an, souvent signé puis oublié.
Mais absolument rien n’empêche quelqu’un de mentir, de ne volontairement pas aller chez le médecin, et de prendre le départ de la course alors qu’il présente plusieurs facteurs de risques. Le PPS ne délivre pas une “autorisation de courir”, il informe, oriente vers le médecin et surtout responsabilise les sportifs. De la même manière que rien ne vous oblige à vous assurer en escalade, ou à mettre un casque en ski, vous pourrez toujours partir sur une course en trail malgré les recommandations. Et c’était d’ores et déjà le cas par le passé, puisque les certificats médicaux étaient devenus particulièrement faciles à obtenir.
Le certificat médical n’est plus obligatoire, la consultation médicale reste nécessaire
Les médecins et les sociétés savantes s’accordent sur un point essentiel : la prévention efficace repose sur la combinaison d’un suivi médical périodique et d’une éducation à la vigilance.
Certaines situations appellent toujours une évaluation clinique, même en dehors des critères administratifs du PPS :
- antécédent familial de mort subite ou de pathologie cardiaque avant 50 ans ;
- reprise d’activité intense après 40 ans chez l’homme ou après la ménopause chez la femme ;
- symptômes persistants à l’effort (essoufflement, palpitations, fatigue anormale) ;
- pathologie chronique nécessitant un traitement ;
- participation à une épreuve d’endurance prolongée (ultra-trail, marathon, triathlon longue distance).
Dans ces cas et dans d’autres, un examen clinique, un électrocardiogramme de repos, un test d’effort maximal voir même une coronarographie sont indiqués. Ces examens n’ont pas vocation à exclure la pratique, mais à ajuster l’entraînement et la charge d’effort aux capacités réelles du coureur.
Pour les pratiquants de trail, ces précautions prennent tout leur sens. L’effort prolongé, la déshydratation, les pertes en électrolytes, la chaleur ou l’altitude exercent une contrainte importante sur le système cardiovasculaire. Les accidents surviennent rarement sur un coup du sort : ils sont souvent la partie visible d’une pathologie préexistante, souvent silencieuse, qui aurait peut-être pu être détectée et traitée au préalable. Le rôle du PPS est de rappeler ces principes, de façon systématique, à chaque inscription.
Des exemples
Les modules du PPS apprennent à repérer les contextes où une consultation médicale apporte une information utile.
Voici plusieurs exemples typiques, issus de la pratique courante. Etes vous bien certains d’avoir toujours validé votre PPS en étant à 100% dans les clous ?
« Mon frère a eu un truc au cœur »
Un coureur de 38 ans souhaite s’inscrire à un semi-marathon. Il n’a aucun symptôme. Par contre il se souvient que son frère avait un souci au cœur à 32 ans qui avait nécessité une petite opération, mais maintenant c’est réglé.
Raisonnement médical :
Un antécédent familial de trouble du rythme avant 35 ans justifie un dépistage préventif. Même si le coureur va bien, la probabilité d’une anomalie électrique silencieuse est non négligeable, pouvant conduire à une mort subite à l’effort. Une consultation de cardiologie avec électrocardiogramme est recommandée ; le cardiologue décidera, selon les résultats et l’arbre généalogique, s’il faut compléter par une échographie ou un test d’effort.
« Je reviens d’une entorse »
Une traileuse de 29 ans a été arrêtée six semaines pour une entorse grave de cheville, puis a repris la course progressivement. Elle prépare maintenant un trail de 25 km.
Raisonnement médical :
Un arrêt supérieur à un mois entre dans les situations où une réévaluation médicale est conseillée. Au-delà du risque musculo-squelettique, la tolérance cardio-vasculaire diminue après plusieurs semaines d’inactivité. Un contrôle clinique simple (examen, tension, écoute cardiaque) permet de s’assurer qu’aucune complication n’est intervenue pendant la convalescence. En cas de fatigue persistante ou de traitement anti-inflammatoire prolongé, un ECG de repos est pertinent. La visite n’est pas une formalité ; elle permet d’adapter la reprise et d’éviter le piège classique du surentraînement de compensation.
« Je vais faire un ultra avec les copains pour me remettre en forme »
Un homme de 45 ans, sédentaire depuis plusieurs années, décide de s’inscrire à un ultra de 80 km « pour se motiver à perdre du poids ». Il fume un paquet par jour, n’a jamais réalisé d’examen cardiaque.
Raisonnement médical :
Ce profil cumule plusieurs facteurs de risque : sédentarité, tabagisme, âge, reprise brutale d’activité. Le PPS l’invite clairement à consulter avant de commencer l’entraînement. Un bilan cardio-vasculaire complet s’impose : examen clinique, électrocardiogramme, test d’effort maximal et contrôle biologique (glycémie, cholestérol). L’ultra-trail est une épreuve d’endurance prolongée, inadaptée à une remise en forme initiale. L’objectif de perte de poids est légitime, mais il doit passer par une progression progressive. Le PPS aide à identifier cette incohérence avant qu’elle ne devienne dangereuse.
« Je n’ai pas eu mes règles depuis 4 mois, c’est pratique pour les entrainements »
Une coureuse de 27 ans s’entraîne six fois par semaine pour le trail. Elle n’a plus de règles depuis quatre mois et n’a jamais consulté pour ce motif.
Raisonnement médical :
L’absence de règles prolongée (plus de trois mois) entre directement dans les critères du PPS justifiant un suivi médical. Cette aménorrhée peut être fonctionnelle (déséquilibre énergétique, perte de masse grasse, stress) ou révéler une carence hormonale plus profonde. Le risque majeur à moyen terme est la baisse de densité osseuse, avec fractures de fatigue à répétition. Le médecin du sport ou le gynécologue orientera le bilan (bilan hormonal, densitométrie osseuse, adaptation nutritionnelle). Le PPS agit ici comme un garde-fou : il rappelle que l’absence de règles n’est jamais anodine chez la sportive d’endurance.
« J’ai juste un médoc pour la tension »
Un coureur de 50 ans est traité pour hypertension par bêta-bloquants. Il prépare un trail de 40 km.
Raisonnement médical :
Le PPS précise qu’un traitement médicamenteux de longue durée doit conduire à un avis médical. Les bêta-bloquants modifient la fréquence cardiaque maximale et la perception de l’effort ; ils faussent les repères habituels de l’entraînement. Le médecin adaptera les zones de travail, vérifiera la tolérance du traitement à l’effort et ajustera la posologie si besoin. Faire contrôler le traitement avant la course est une mesure de sécurité et d’efficacité ; ignorer cet effet physiologique expose à la fatigue excessive ou au malaise.
« J’ai tapé la tête une fois, mais heureusement j’ai la tête dure ! »
Un trailer de 33 ans a subi une commotion cérébrale lors d’un accident de vélo il y a deux mois. Il se sent bien et souhaite reprendre la compétition.
Raisonnement médical :
Le PPS mentionne explicitement l’antécédent de traumatisme crânien comme motif de consultation. Même en l’absence de symptômes, certaines séquelles (troubles du rythme, dysautonomie, fatigue cognitive) justifient une évaluation avant reprise. Le médecin vérifiera l’absence de signes neurologiques persistants et proposera un protocole de reprise progressive. La reprise hâtive après un traumatisme crânien est l’un des contextes les plus sous-estimés. Le PPS vise à éviter ces retours prématurés.
Inquiétude persistante avant l’inscription
Une coureuse de 35 ans, sans antécédent particulier, hésite à s’inscrire à un trail de 20 km parce qu’elle n’a pas vu de médecin depuis plusieurs années.
Raisonnement médical :
Ce type d’inquiétude est un indicateur de vigilance. Le PPS valorise cette attitude : le doute justifie la consultation. Le médecin pourra réaliser un examen simple, un ECG de repos, un contrôle tensionnel et quelques rappels de prévention. Dans la majorité des cas, la visite sera rassurante et servira de point de départ pour un suivi régulier. Le PPS n’a jamais vocation à remplacer le médecin. Il agit comme un déclencheur de bon sens : si la question se pose, la réponse est oui — il faut consulter.
En résumé, le Parcours Prévention Santé n’a pas supprimé la médecine du sport, il en a rétabli la cohérence.
Le certificat médical, devenu routinier, ne remplissait plus son rôle de protection. Le PPS, lui, replace le savoir médical dans la sphère de la compréhension individuelle. Il repose sur une logique claire : diffuser les bons repères, rappeler les situations à risque et inciter à consulter lorsque c’est pertinent.
Dans le monde du trail, cette approche correspond à l’esprit de la discipline. Le coureur de montagne apprend à gérer son allure, son matériel et ses réserves ; il doit apprendre de la même façon à gérer sa santé. Le PPS n’est pas un permis de courir sans contrôle, c’est un rappel que la responsabilité première de la prévention appartient au coureur lui-même.
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Cet article n’a pas pour but de remettre en cause la qualité du Parcours Prévention Santé (PPS) ou le travail des médecins. Il repose sur une analyse journalistique indépendante à partir de données publiques, d’observations terrain et de retours d’expérience. Aucune accusation formelle n’est portée contre une institution, un organisme ou une personne. Les formulations employées visent à alerter, informer et responsabiliser les pratiquants, dans le respect du droit à la critique et de la liberté d’expression encadrée.






