States of Elevation, une nouvelle définition du trail
Kilian Jornet n’en est plus à cocher des victoires sur une ligne d’arrivée. Depuis plusieurs années, il trace sa propre voie, à mi-chemin entre la haute montagne, le trail longue distance, l’expédition engagée et le message politique. Son nouveau projet baptisé « States of Elevation » en est l’illustration parfaite : plus de soixante sommets à gravir aux États-Unis, à pied et à vélo, en moins de trente jours.
Pas de dossard, pas de chrono. Juste un homme, son sac et une volonté de fer.
L’aventure commence au Colorado
Le point de départ est symbolique : le Longs Peak, dans les Rocheuses. C’est là que Kilian a lancé sa traversée, avec l’objectif d’enchaîner les principaux « fourteeners » du pays, ces sommets américains de plus de 14 000 pieds — soit environ 4 277 mètres. Il reliera les massifs à vélo, dormira à la belle étoile, et affrontera chaque sommet en mode minimaliste, dans un style libre et engagé.
Les chiffres donnent le tournis : plus de 970 kilomètres de trail, près de 3800 kilomètres de vélo, 60 sommets enchaînés… Cela revient à faire un marathon et une étape du Tour de France chaque jour, le tout à haute altitude.
Un projet aux multiples visages
Ce n’est pas juste un défi sportif. C’est aussi une déclaration d’amour à la montagne, un retour aux sources, un plaidoyer pour une pratique plus sobre de l’aventure. Kilian Jornet le répète : il fuit les villes, cherche la solitude, veut vivre pleinement la nature. Avec States of Elevation, il exprime une manière de courir qui dépasse largement le simple cadre du trail.
L’alpiniste en lui choisit les lignes esthétiques. Le traileur les enchaîne en courant. L’aventurier les relie à vélo. Et le militant s’engage pour montrer qu’un autre rapport à l’effort, à la mobilité et à la montagne est possible. Ce n’est pas un hasard s’il porte ce projet avec NNormal, la marque qu’il a cofondée et qui revendique une empreinte écologique minimale.
Un message au monde du trail
En 2025, alors que les ultra-trails deviennent de plus en plus professionnalisés, balisés et médiatisés, Kilian Jornet prend le contre-pied. Il brouille les frontières, refuse les cases, et montre qu’il est encore possible d’innover — pas avec de la technologie ou des chiffres, mais avec une vision, un style, un engagement.
Une aventure pas exempte de paradoxes
States of Elevation impressionne par son ambition, sa cohérence sportive et son engagement personnel. Pourtant, certains observateurs pointent du doigt un paradoxe difficile à ignorer : comment défendre une approche « zéro impact » en ayant pris l’avion pour lancer ce projet aux États-Unis ? En 2025, Kilian Jornet a déjà traversé l’Atlantique deux fois, et ces déplacements interrogent à la lumière de ses engagements écologiques passés.
Ces critiques ne remettent pas en cause la sincérité du message, ni la portée du défi. Mais elles rappellent que même les figures les plus médiatiques du trail doivent composer avec les contradictions de notre époque. Et c’est peut-être là, justement, que le projet prend une autre dimension : il oblige chacun, suiveur ou pratiquant, à réfléchir à sa propre cohérence entre parole, action… et empreinte.
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Cet article s’inscrit dans le cadre de notre couverture de l’actualité trail et s’appuie sur des informations disponibles publiquement dans la presse américaine, notamment The Denver Post. Les propos de Kilian Jornet sont rapportés dans le respect du droit à l’information. Les images éventuellement utilisées dans cet article proviennent de publications publiques et respectent l’article 9 du Code civil.