Et voilà, la CCC est enfin passée ; comme un premier rêve qui en appelle d’autres. Mais faire le tour, même partiellement, du gros caillou n’a rien d’anodin.
Très belle organisation
On a toujours quelques blaires qui prendront l’UTMB de haut en disant qu’il est roulant, que c’est trop facile, que ce n’est pas du trail, bla bla bla… Ces mecs là n’auront jamais le quart du niveau nécessaire ne serait-ce que pour avoir les points qui permettent de tenter une des distances. Mais je m’égare, et nous aurons l’occasion de revenir sur la réelle question de la difficulté de la course.
Déjà, en termes d’organisation, difficile de faire mieux. L’UTMB est une énorme machine, mais une machine excessivement bien huilée. Que ce soit au retrait du dossard, au contrôle du matos obligatoire, au niveau de la coordination des transports pour les accompagnateurs, il n’y a juste rien à redire.
MA CCC…
réveil
Mais rentrons dans le vif du sujet ; après un réveil à 4h40, direction les navetttes pour rallier Courmayeur. On y arrive aux alentours de 6h20 ; après un petit café dans le gymnase, on prend le temps de se poser et de dormir un peu. Même si c’est à terre, ça fait l’affaire (et on s’habitue ainsi à l’inconfort des potentielles siestes sur le parcours).
départ
Les deux heures passent finalement vite et il est temps de se rapprocher vers la ligne de départ. On a beau avoir vu des vidéos pour se préparer, une fois que l’on se retrouve au coeur de l’ambiance, c’est quelque chose d’assez dingue. Entre l’appréhension, le stress et l’adrénaline, beaucoup d’émotions s’enchevêtrent.
Pendant le briefing, on nous annonce que la météo sera clémente et que les conditions seront fraîches, mais excellentes (ils auraient dû dire fraîches, puis excellentes). Et c’est parti !
début de course
Les deux premiers kilomètres se passent dans le centre-ville de Courmayeur, avant de passer aux choses sérieuses, à savoir la montée vers la tête de la Tronche, un peu plus de 9km pour 1440m de D+. Cette montée est un peu longue. Ici, ça commence à râler dans le peloton car ça bouche un peu et parce qu’il y a beaucoup de monde. Alors oui, clairement, c’est blindé et on voit du monde sur l’intégralité du sentier. Mais bon, quand un ultra commence par une grosse montée, qu’on soit l’UTMB, sur le GRP ou n’importe où, c’est toujours ainsi, donc franchement, pas de quoi fouetter un chat. De plus, ça permet d’en garder sous le coude et de ne pas se cramer tout de suite.
grêle
Quelques mètres avant la tête de la tronche, on voit un nuage qui commence à nous arriver dessus, mais par en-dessous (c’est assez particulier). Quelques gouttes de pluie arrivent, puis elles commencent à devenir plus nombreuses, avant de se transformer en grêle ! Je dois bien avouer que je ne m’attendais pas à ça. Encore quatre kilomètres avant d’arriver vers le refuge Bertone et le premier ravitaillement.
Le chemin ici est descendant et roulant ; il aurait dû être simple, mais il n’en fut rien. Avec les trombes d’eau que nous avions pris sur le coin de la capuche, les sentiers s’étaient transformés en petites cascades et il fallait passer dans l’herbe. On arrive cependant au refuge Bertone un peu plu au sec. Les sensations sont bonnes, et l’enjeu principal est de ne pas s’épuiser inutilement notamment avec le froid.
Arnouvaz
On attaque ensuite un segment d’une douzaine de kilomètres qui nous amènera jusqu’à Arnouvaz en passant par le refuge Bonatti. Ce coin est un peu piégeux ; en effet, il est plutôt plat et peu technique. Et on pourrait être tenté d’accélérer un peu pour réduire le retard engendré dans la montée. Je ne compte d’ailleurs pas le nombre de personnes ici qui m’ont doublé (de mémoire, je devais être dans les 1700ème au refuge Bertone et 1850ème à Arnouvaz). Pour vous donner un ordre d’idée, dans les vidéos de la CCC, c’est souvent un moment qui est beaucoup filmé car on est face au massif du Mont Blanc et on prend peu de risques en regardant sur les côtés. Sauf que là, le massif est bouché, on ne voit pas grand chose et il pleuviotte.
On arrive finalement à Arnouvaz, le premier quart de la course est passé. Je me pose une bonne dizaine de minutes, histoire d’être en forme avant d’attaquer le grand Col Ferret.
Une fois sorti du ravito, j’ai le plaisir de constater que non seulement la pluie s’est arrêtée, mais que le soleil a pointé le bout de son nez. Et l’ascension vers le Grand col Ferret commence à offrir des paysages sur la vallée absolument magnifiques. Après 1h45 d’ascension (1000m de D+ en 4km), la bascule se fait en 1809ème position), nous quittons l’Italie pour la Suisse.
Champex
On attaque alors une descente d’une vingtaine de kilomètres qui doit nous amener vers Champex.
J’attaque la descente prudemment en me disant que 20km de descente n’ont rien d’anodin et que ce serait dommage de se cramer à ce moment. Ayant souvent entendu qu’il fallait arriver à Champex en pleine possession de ses moyens, je gère un peu mon effort, mais ça va. Les entraînements en descente cet été ont bien aidé.
A mi-descente, ravito à la Fouly. Je m’arrête une petite vingtaine de minutes histoire de reprendre mes esprits et reposer un peu les jambes, puis repars en 1792ème position. La partie de la Fouly jusqu’à Champex est un très chouette moment. La descente est relativement soft, le parcours est bien roulant et les paysages suisses sont splendides. A la fin de la descente, nous avons une bonne côte qui doit nous mener à Champex, et c’est là que la nuit va commencer à tomber. Idéalement, j’aurais souhaité pouvoir arriver à Champex de jour et en sortir de nuit, mais c’était clairement beaucoup trop ambitieux, et ça aurait été dangereux de vouloir accélérer.
les choses sérieuses commencent
J’arrive finalement à Champex après 11h47 de course en 1768ème position. J’y reste une grosse demi-heure, le temps de manger, de se changer intégralement et de se préparer à la suite. On dit souvent que la CCC est un échauffement jusqu’à Champex et qu’elle commence véritablemment à ce moment. Je n’imaginais pas à quel point c’était vrai en sortant du ravito. Il y a de la fatigue, mais les sensations sont bonnes et je suis toujours aussi content d’être là. L’enjeu sera maintenant de faire essentiellement de la marche rapide le temps que la nuit se passe.
On a quelques kilomètres en descente pour arriver vers Plan d’ Au avant d’attaquer le premier des 3 cols qui nous attendent. La première montée est bien hard à souhait. Un peu technique, mais pas trop, mais surtout très longue. Au loin on devine des frontales sur un sommet. J’avoue croiser les doigts pour que ce soit des étoiles (spoiler : non!) mais finalement, à force de patience, on finit par arriver sur ce sommet. Bien qu’il fasse nuit, ce que l’on voit est magnifique (notamment les vallées illuminées). La bascule est passée, la descente est entamée et je passe le checkpoint de la Giète (ma montre doit en être au 67ème km) en 1669ème position.
café
Après un petit café, c’est parti pour 5km de descente vers Trient. Si le début de la descente est plutôt sympa, la fin l’est beaucoup moins, mais genre vraiment pas sympa. C’est pentu, c’est technique et c’est long.
J’arrive finalement à Trient en 1659ème position et vais y rester un peu plus d’une demi-heure. Après un petit repas, une petite sieste d’une vingtaine de minutes sur la table va faire beaucoup de bien.
D’une part car je me dis que revivre deux ascensions et descentes comme on vient d’avoir ne va pas être anodin, et d’autre part car dans le ravito, j’entends pas mal de personnes différentes exprimer toutes leurs appréhensions dans la montée des Tseppes.
J’entame cette deuxième montée prudemment, doucement mais sûrement, mais je suis plutôt content de réussir à garder la même allure du début à la fin. Et on commence à voir quelques coureurs souffrir et s’arrêter un peu. La côte est finalement un peu moins longue que ce à quoi je m’attendais et j’avale les 3,5km de montée (pour 880m de D+) en un peu plus d’une heure et demie. Je passe le checkpoint des Tseppes en 1571ème position et vais attaquer la descente vers Vallorcine.
je ne me souviens de rien
Alors grâce aux infos je sais que j’ai mis un peu moins de deux heures pour descendre les 7km vers Vallorcine et que je suis entré au ravito en 1565ème position, mais je ne serais pas en mesure de vous en dire plus sur cette descente ; je ne me souviens de rien.
J’ai passé une quarantaine de minutes à Vallorcine, le temps de manger un peu, de me changer et de me reposer, mais clairement, là c’est un peu dur. Il fait hyper froid, bien humide et on est à un moment un peu charnière ; il reste encore 18km, et c’est beaucoup et peu à la fois. On en a fait plus de 80, ce serait dommage de flancher à ce moment là. J’en sors en 1600ème position (ouais, j’ai un peu pris mon temps) en priant pour que ce temps faible passe, car sinon ça va être un peu long.
Le soleil s’est levé (c’est déjà ça) et on entame un bon faux-plat qui nous mènera au col des Montets.
C’est la dernière grosse difficulté, me dis-je, et après, ça ne sera plus que du bonus. Mais le col des Montets, Seigneur… Quelle crasse ! Alors autant l’ascension offre des panoramas absolument magnifiques ; le sentier en lui-même est super sympa aussi. Il est technique, parfois très technique. Mais il est long ! Très long. Et finalement, une fois que l’ascension est finie, c’est là que ça va devenir difficile. Il commence à faire chaud (bon, ça, j’avoue que ça fait du bien), et le terrain est très technique. C’est compliqué d’avancer à un bon rythme. La stratégie sera alors de profiter du fait que je ne peux pas aller trop vite pour refaire du jus et d’envoyer après la Flégère. A tel point que j’ai l’impression que toutes les places gagnées depuis Arnouvaz sont en train d’être perdues. Après, je me dis que tant que je finis, c’est secondaire (oui, c’est un peu de la méthode coué).
coup sur la tête
Je passe la tête aux vents en 1579ème position et psychologiquement, je vais prendre un petit coup sur la tête ; en effet, on annonce la Flégère à 3km. Rien de bien spécial ; sauf que depuis la tête aux vents, on voit déjà le ravito de la Flégère. Et voir l’endroit où on doit aller, même pendant une heure, c’est long. D’ailleurs, j’y suis arrivé en moins d’une heure, mais j’ai l’impression que ça m’a pris le triple.
A la Flégère, je suis toujours 1579ème. J’y reste une petite dizaine de minutes, le temps de boire un demi-litre d’eau pétillante et de manger quelques quartiers de pomme. Il ne reste plus que 7 à 8km avant de franchir l’arche d’arrivée. A priori, les barrières horaires ne seront plus un problème (elles ne l’ont jamais vraiment été, si je dois être honnête) et maintenant, il n’y a plus qu’à profiter de la descente vers Chamonix et de la traversée de la ville.
J’avais prévu de jouer la carte de la prudence sur la descente pour réussir à tracer dans Chamonix. Mais après avoir marché 500 mètres après la Flégère, j’ai tenté de courir un peu, et bizarrement, ça allait. Plus de douleur, plus de grosses difficultés, si bien que hormis sur l’un ou autre passage un peu caillouteux, j’ai pu courir tout le temps. Alors certes pas très vite, mais j’étais quand même content d’y arriver.
La fin de la course, c’est alors un truc de dingue.
A partir du moment où le ponton est passé et qu’on longe la rivière, l’ambiance commence à monter petit à petit. J’avais lu beaucoup de choses sur le fait que l’ambiance dans Chamonix peut vous griser, mais n’imaginais pas à quel point c’était vrai. A tel point que pendant quelques secondes, vous avez l’impression d’être vu comme une star du trail. Alors je sais bien sûr que c’est pas le cas, mais du point de vue de l’égo, c’est un sacré kif, et après plus de 24h à avoir crapahuté dans les montagnes, c’est pas du luxe.
Je franchis finalement la ligne d’arrivée en 25h09 et en 1536ème position.
J’aurais peut-être pu ou dû faire un peu moins, mais dans la mesure où c’était la première fois que je dépassais les 70km (en montagne) et où je voulais pouvoir garder un peu de plaisir tout au long du parcours, j’ai fait le choix de prendre mon temps (notamment dans les ravitaillements). Et si c’était à refaire, j’aurais exactement la même stratégie. Et même si pour un petit niveau comme le mien, le classement n’a pas vraiment d’importance, je dois bien avouer que je suis content d’avoir réussi à remonter progressivement pas mal de places d’Arnouvaz à Chamonix. Beaucoup sont partis vite et ont explosé à Champex et Trient, et j’avais très peur que ça m’arrive, alors j’ai plutôt choisi la prudence pour arriver le plus frais possible à Champex, et ça a payé. Pourtant, dieu sait que je ralais de me faire dépasser autant du refuge Bertone à Arnouvaz…
La CCC n’est clairement pas une course facile ; là-dessus je ne vous apprendrai rien. En revanche, elle a un avantage, c’est qu’à part certains moments, le parcours n’est pas excessivement technique (notamment par rapport aux Pyrénées) ; et c’est finalement un bon point, car vous n’êtes pas obligés de garder la tête au sol pour être sûr de voir où vous mettez les pieds. De ce fait, vous pouvez profiter des paysages qui se trouvent autour de vous. Et qu’est-ce que c’est beau !
C’est un premier rêve qui s’est accompli, en attendant d’aller se frotter dans quelques années à l’UTMB en lui-même.
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