Quand les World Trail Majors ont été lancés fin 2023, le message était limpide.
Face à la montée en puissance de l’UTMB World Series, à sa logique de qualification centralisée et à la mainmise croissante d’un acteur unique sur le calendrier mondial, un autre modèle était possible. Plus horizontal. Plus collaboratif. Plus fidèle à l’esprit historique du trail. Deux ans plus tard, à l’heure de dévoiler la saison 2026, le discours a changé. On ne parle plus d’expansion, ni d’alternative structurante. On parle désormais de stabilité. De consolidation. De ralentissement.
Un virage qui interroge.
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Les World Trail Majors, un circuit né dans un contexte de défiance envers l’UTMB
Il est difficile de comprendre la genèse des World Trail Majors sans revenir au climat qui régnait alors dans le trail international. L’extension rapide de l’UTMB World Series, adossée au groupe Ironman, avait suscité de fortes tensions. Certains organisateurs indépendants dénonçaient une absence de place pour leurs épreuves. Des athlètes critiquaient un modèle jugé trop fermé, trop commercial, trop centralisé autour de Chamonix.
Dans ce contexte, les World Trail Majors ont été présentés comme autre chose qu’un circuit de plus. Une alliance de courses historiques, indépendantes, décidées à collaborer sans renoncer à leur identité. Hong Kong 100 km, Transgrancanaria, Mt Fuji 100, MIUT, Ultra-Trail Cape Town… Autant d’épreuves qui existaient bien avant les grandes séries mondiales et qui revendiquaient un héritage commun.
À l’époque, le discours était clair. Il ne s’agissait pas seulement d’exister à côté de l’UTMB, mais de proposer un contre-modèle crédible.
Une croissance rapide… mais limitée
En 2024, puis surtout en 2025, le circuit a connu une expansion rapide. De 9 épreuves initiales, il est passé à 24 courses labellisées en intégrant une nouvelle catégorie de formats courts. Sur le papier, la dynamique semblait positive. Le World Trail Majors s’installait dans le paysage, attirait des athlètes élites, gagnait en visibilité.
Mais cette croissance est restée mesurée. Contrairement à l’UTMB World Series, peu de grandes organisations ont fait le choix de rejoindre le mouvement. Certaines courses emblématiques sont restées à l’écart. D’autres ont préféré conserver leur indépendance totale plutôt que de s’inscrire dans une nouvelle structure, même associative.
Progressivement, une réalité s’est imposée. Le World Trail Majors séduisait surtout des courses déjà convaincues, déjà alignées idéologiquement, mais peinait à fédérer largement au-delà de ce cercle.
2026 : moins de courses, aucun nouveau membre
Pour 2026, le constat est net. Le circuit repasse à 10 épreuves. Deux courses quittent l’aventure. Aucune ne les remplace, malgré des dizaines de candidatures annoncées. Officiellement, il s’agit d’un choix assumé. Celui de la stabilité plutôt que de l’expansion.
Dans les communiqués, le vocabulaire est soigneusement maîtrisé. On parle de consolidation, de force collective, de qualité plutôt que de quantité. Un discours classique dans le monde des circuits sportifs, souvent utilisé lorsque la dynamique initiale ralentit.
Car un élément frappe. Si le World Trail Majors était réellement en position de devenir une alternative majeure à l’UTMB, pourquoi si peu d’organisations supplémentaires ont-elles franchi le pas ? Pourquoi ce repli à un format plus restreint, alors même que le discours fondateur appelait à rassembler largement les courses indépendantes ?
Une alternative… mais pas un contre-pouvoir
Avec le recul, le World Trail Majors apparaît moins comme un véritable contre-pouvoir que comme une coalition d’intention. Le projet n’a jamais eu les moyens financiers, médiatiques ou structurels de rivaliser avec un circuit soutenu par un géant de l’événementiel sportif mondial.
Ce n’est pas nécessairement un échec. Mais cela relativise la promesse initiale. Le circuit n’a pas renversé l’équilibre du trail mondial. Il n’a pas empêché l’UTMB World Series de continuer à s’étendre. Il n’a pas non plus fédéré l’ensemble des grandes courses indépendantes sous une bannière commune.
En 2026, le World Trail Majors existe toujours. Il propose un calendrier cohérent, international, respectueux des territoires. Mais il ne structure pas le sport. Il l’accompagne à la marge.
Un discours de stabilité qui masque un essoufflement
Parler de maturité est séduisant. Parler de stabilité aussi. Mais dans un sport où les séries mondiales se multiplient, où la concurrence pour l’attention des athlètes et des sponsors est féroce, ralentir n’est jamais neutre.
Le choix de ne pas intégrer de nouvelles courses en 2026 peut être lu comme une décision stratégique. Il peut aussi être interprété comme le signe que le modèle atteint ses limites. Que l’élan initial, nourri par le rejet de l’UTMB World Series, n’a pas suffi à créer une dynamique durable d’adhésion.
Le World Trail Majors ne disparaît pas. Il se replie. Il se stabilise. Il se recentre. Autant de mots qui, dans le sport comme ailleurs, traduisent souvent une même réalité : celle d’un projet qui continue d’exister, mais qui ne grandit plus.
Le trail mondial toujours fragmenté
Deux ans après sa création, le World Trail Majors n’a pas unifié le trail international. Comme le craignaient certains observateurs dès le départ, le paysage reste fragmenté. UTMB World Series d’un côté. Golden Trail Series pour le format court. Skyrunning World Series. Championnats du monde. Et désormais un circuit indépendant qui ralentit.
Le paradoxe est là. Né pour répondre à une centralisation jugée excessive, le World Trail Majors n’a pas réussi à fédérer suffisamment pour proposer une véritable alternative systémique. En 2026, il poursuit sa route, plus modeste, plus prudent, plus discret.
Le circuit ne grandit plus en taille. Contrairement à ce qui était promis à l’origine, il peine désormais à grandir en influence.





