Noël Giordano
Il avait tout pour briller. Noël Giordano, l’un des grands noms du trail corse, avait coché l’Ultra Trail di Corsica depuis longtemps. Cette course, il la connaît par cœur. Il y a mis des années d’entraînements, de sacrifices, d’espoirs. Et pourtant, comme en 2024, son corps a de nouveau dit non.
Noël Giordano
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Noël Giordano, l’abandon de trop
Parti à bon rythme, Noël gérait bien ses sensations. Il pointait encore à la troisième place lorsqu’une compote avalée au mauvais moment a bouleversé la suite. Ballonnements, nausées, vomissements… Le ventre lâche, puis l’hydratation devient impossible. Le moteur se coupe. « Quand tu bois plus et que tu manges plus, t’as plus d’essence dans la machine », résume-t-il, vidé, au col Saint-Pierre, dans une vidéo poignante captée par Corse Matin.
Ce qui rend ce moment encore plus cruel, c’est qu’il survient presque au même endroit que l’an dernier. La scène se répète, comme un mauvais sort. Noël lâche avec un humour teinté de douleur : « Je suis abonné à l’INSEC, moi… » Une pirouette verbale pour cacher l’amertume. Ce n’est pas juste une course qui s’arrête. C’est une saison, des mois de préparation, un rêve.
Noël Giordano : un champion enraciné
Originaire de Castifao en Haute-Corse, Noël est de ces coureurs insulaires que le trail corse a vu grandir. Né en 1997, il n’a pas encore trente ans, mais déjà un CV solide. En 2024, il claque un 10 km en 32’17 sur route, remporte A Petralbinca, gagne l’Atlas Quest au Maroc, et monte sur les podiums du Trail de Haute Provence et du Marathon de la Gravona. En 2025, il remet ça avec une victoire à l’Alturaghja, une troisième place à la Sainte-Baume, et une 15e position à la Transvulcania face à un plateau international.
Son UTMB Index dépasse les 843 points sur les formats 50K et 100K. Ce qui impressionne, c’est sa régularité, sa polyvalence, et son attachement indéfectible à la Corse et à ses sentiers. Noël ne triche pas. Il trace son chemin avec humilité et passion.
La détresse filmée d’un homme à bout
Sa vidéo d’abandon a fait le tour des réseaux. On y voit un homme en larmes, en prise directe avec ses limites. Il raconte avec une lucidité glaçante son départ prudent à 23h, les premières heures bien gérées, puis le déclin brutal. Il avait Camus en ligne de mire. Il voulait s’accrocher. Mais le corps, encore une fois, a fermé la porte.
Une communauté qui répond présente
Sous la vidéo, les messages de soutien affluent. Trailers anonymes ou visages connus, tous saluent son courage, sa dignité, sa sincérité. « Tu restes un champion », « Ça arrive même aux meilleurs », « Le corps dicte sa loi »… Noël n’a pas franchi la ligne d’arrivée, mais il a touché les cœurs. Parce qu’il montre l’envers du décor, celui qu’on ne filme jamais : la fragilité, le doute, les larmes.
Au même moment : l’euphorie d’une Dream Team
Pendant que Noël s’effondrait au col Saint-Pierre, l’équipe Santelli-Peretti-Quilici-Bartoli pulvérisait le record du relais sur l’UTC, avec plus d’1h30 d’avance sur l’ancien temps de référence. C’est aussi ça, le trail. Cette brutalité du contraste. Certains flambent sous les projecteurs, d’autres s’éteignent dans la solitude d’un col. Il n’y a pas de justice, seulement la vérité du terrain.
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La capture d’écran utilisée dans cet article provient d’une vidéo publiée par Corse Matin. Elle est reproduite ici dans un but d’information, en lien direct avec l’actualité, conformément au droit de courte citation et à l’article L122-5 du Code de la propriété intellectuelle.