Dans le cadre de l’organisation du Festival Grandes Heures nature, Thibaut Baronian nous a fait l’honneur et la gentillesse de nous accorder une entrevue. Le temps pour nous de revenir sur son début de saison, son rôle de parrain du Festival mais aussi son avis de coureur sur le bon choix de chaussure.
Un Très Grand MERCI à lui pour sa disponibilité, sa gentillesse et sa passion qu’il nous a partagé.
Utrail (U) : Salut Thibaut merci d’avoir accepté l’invitation, on va partager un petit moment ensemble ou on va aborder un peu ta vie, tes expériences mais aussi le festival des grandes Heures nature qui va arriver ce week-end. Et puis on finira sur une petite partie un peu plus technique, car en tant que spécialiste chaussures sur le site Utrail, j’aimerais bien avoir un petit peu ton avis sur le sujet.
Alors avant de commencer les questions, je profite de l’occasion car je tenais absolument à te féliciter personnellement et puis au nom de toute l’équipe Utrail, pour ta performance exceptionnelle à Zegama. On est resté très attentif à ta course et bravo à toi.
Thibaut Baronian (TB) : Merci c’est sympa
U : Je ne vais pas revenir sur ton parcours depuis le début, mais est-ce que tu peux te présenter un peu auprès de nos internautes ?
TB : Je m’appelle Thibault Baronian, j’habite à Besançon depuis une dizaine d’années je suis originaire de Haute-Savoie. J’ai commencé le sport par là-bas, j’étais en sport études ski de fond pendant quatre ans au lycée et j’étais en équipe de France junior. En 2008 j’ai fait ma dernière saison et après j’ai décidé de stopper ma petite carrière sur les skis, pour passer mes concours de kiné, donc je suis devenu kiné ici à Besançon. Je suis rentré à l’école fin 2009 et j’ai fini fin 2012. J’ai travaillé 5, 6 ans en cabinet libéral. J’ai fait une formation en micro nutrition à côté, donc voilà aujourd’hui je me consacre beaucoup au travail et à la course à pied. Je fais un peu de nutrition à côté avec quelques patients, quelques coureurs mais j’ai laissé de côté la kinésithérapie mais voilà je fais un peu autre chose.
U : Tu fais partie du team Trail Salomon depuis 2014 il me semble ?
TB : En fait je suis rentré chez les espoirs en 2011 et après en 2014 j’ai intégré la team qui s’appelle élite, c’était dans la continuité aussi du pôle espoir.
U : OK et est-ce que tu peux nous expliquer rapidement, parce que c’est un peu étranger pour nous trailers amateurs, comment fonctionne une team mais surtout qu’est-ce que ça vous apporte à vous en tant qu’athlète ?
TB : Déjà on a la structure avec le manager qui est aujourd’hui Jean Michel Faure Vincent, et quand je suis rentré en espoir j’avais le coach aussi compris dans la structure qui était Christophe Malardé, aujourd’hui il est sorti de la structure mais je travaille toujours avec lui. C’est à dire qu’on n’ est pas obligé de travailler avec lui chez Salomon. Après j’ai l’aide matérielle évidemment et financière qui me permet aujourd’hui de pouvoir moins travailler en tant que kiné et faire un peu plus de sport et m’investir plus dans le trail. Sans oublier tout le côté développement produit, qui est géré avec l’ usine à Annecy mais c’est un peu au cas par cas en fonction de ce que les ingénieurs veulent travailler avec nous. Il y a aussi tout le côté communication visibilité médias qui est géré un peu plus avec notre manager.
U: J’ai suivi de très près ton début de saison et on peut dire que tu frôles la perfection, 4 courses trois victoires et puis cette superbe troisième place à Zegama, qui est presque synonyme de victoire car tu finis à même pas cinq minutes du premier qui est «juste» Kilian Jornet. Alors comment tu as vécu ces six premiers mois 2019 sur un plan sportif et puis cette performance qui est arrivée là il y à quelques semaines ?
TB : Bah écoute c’était programmé pour que j’en fasse pas trop en début de saison. C’est à dire que j’ai préféré courir moins que d’habitude et peut-être un peu mieux. J’ai vraiment préparé mon début de saison pour Zegama et pour la golden Trail Séries contrairement à d’habitude où j’attaque avec des marathons des la fin février, début mars et j’enchaîne beaucoup. En plus c’est souvent une période qui me va bien, je suis plutôt en forme.
Quand j’arrive en août septembre des fois j’ai un peu de mal. Donc pour cette année j’avais vraiment prévu de mettre un peu plus de temps à être prêt et attendre début juin pour vraiment lancer la saison. Ça a plutôt bien marché, après c’est sûr qu’à Buis-les-Baronnies (Trail Drôme) je suis passé un peu à côté de ma course, c’était vraiment une course de prépa, je rentrais du training campe des Açores, j’étais fatigué j’avais que 4 jours de récupération, c’était vraiment trop juste mais je suis pas déçu. Ça faisait partie de ma préparation donc c’était bonus.
Et puis c’est vrai que je suis arrivé à Zegama pas super serein parce que j’avais pas vraiment de course référence sur le début d’année. Même si voilà j’ai fait des 25/ 30 Km, mais ça restait autour des 2h/ 2h15 de courses donc c’est pas pareil quand même. Donc voilà je suis arrivé avec très peu de confiance, mais j’ai fait une belle course et ça m’a rassuré. J’ai fait le record français c’est cool mais c’est surtout qu’il n”y avait pas un climat à faire faire un record, il faisait très chaud et ça se voit sur les chronos donc oui oui c’est sûr c’est une belle performance et faire le meilleur chrono français voilà c’est toujours une bonne chose c’est aussi le premier podium français sur cette épreuve donc c’est une entière satisfaction. Après, un jour où tu enlèves 5 ou 6 degrés, je pense que tu peux enlever encore 3 ou 4 minutes. Ce jour là les conditions étaient presque parfaites et moi j’étais dans des superbes conditions physiques donc voilà tout s’est aligné c’était cool !
U : Et maintenant c’est quoi le programme, les objectifs ?
TB : Alors là je vais rester sur la Golden Trail Series tout l’été donc le marathon du Mont-Blanc dans moins de trois semaines et après je ferai une petite parenthèse sur le Red Bull 400 à Courchevel le 6 juillet. J’enchaînerai Sierre-Zinal le 11 août et Pikes peak 15 jours après.
Ça me fait les cinq premières manches de la Golden Trail Series, sur les six donc c’est complètement le but d’aller chercher une qualif. On va dire qu’en effet c’est bien lancé maintenant il faut que j’arrive à rentrer au moins deux fois dans le top 10.
U : Pour préparer au mieux cette fin de saison, tu en as un peu parlé tout à l’heure, tu as modifié toute ta préparation et du coup ton calendrier car l’année dernière si mes souvenirs sont bons tu as eu quelques petits pépins physiques qui ont handicapés ta fin de saison 2018 ?
TB : Oui oui en effet c’est ça. On a tout fait pour que j’arrive plus frais pour ce bloc de deux mois et demi, finalement un gros bloc avec des courses toutes les deux ou trois semaines. Donc on a essayé de réfléchir pour que je sois plus frais et que sur ce mois d’aout j’arrive à enchainer Sierre-Zinal, Pikes Peak donc on verra comment ça se présente, après cet hiver tout s’est bien passé, j’ai pas été blessé, je me suis bien reposé, donc maintenant on va voir si ça porte ses fruits jusqu’au bout.
L’idée c’est quand même d’enchaîner encore de belles performances sur les quatres, ça me laisse encore un peu de marge, cette marge que j’avais pas du tout l’année dernière. J’avais fait que trois courses sur les cinq donc forcément j’avais pas de marge et là je suis du coup plus serain.
U : On va maintenant voir une deuxième partie sur le festival des Grandes Heures nature, ce week-end à Besançon, c’est un événement important pour tous les amoureux des sports outdoor, qui de plus à lieu chez toi. Tu en es d’ailleurs un des ambassadeurs, est-ce que tu veux bien nous parler un peu de ton rôle et nous expliquer le festival ?
TB : En fait mon rôle c’est de promouvoir la région et les activités que l’on peut y faire et notamment celles que je pratique : le trail mais aussi le VTT, le vélo de route, le ski de fond l’hiver même si c’est pas à Besançon même c’est pas très loin. Donc j’essaye de promouvoir au quotidien ma ville, du moins des que j’y suis, sur les réseaux en parler un maximum parce que j’y tiens, parce que c’est une région qui me plait, si je suis resté c’est pas pour rien. Voilà c’est mon rôle tout au long de l’année.
Et sur le festival il va y avoir un nombre important de manifestations sportives. Des le Jeudi soir on attaque avec le VTT ELIMINATOR, par vague de 4, un peu comme le BMX. Et puis moi je vais prendre part à l’EKIDEN le vendredi soir, en équipe avec des copains, juste une portion de 5 km sur le 15km. Donc voilà il y aura tout un tas de manifestations en passant par la rando, du gravel, du VTT, du vélo de route et aussi des initiations sur plusieurs sports sur le salon. Des exposants et puis des show aussi qui vont être sympas. Le FISE Festival, la highline, le Canoë extrême donc de quoi bien s’occuper sur le week-end.
U : Le Grand Besançon a un éco-système Trail extrêmement sophistiqués, unique en France, est-ce que tu peux confirmer que c’est vraiment une terre de Trail ?
TB : Alors oui, la façon dont est fait la ville et le Grand Besançon, se prête énormément à la pratique du trail et des sports outdoor en général. On est quand même dans une ville de plus de 100000 habitants, c’est quand même assez rare d’avoir la ville et les montagnes, enfin les collines vraiment à proximité comme çà. J’ai jamais vu une ville qui se présente sous cette forme là. Donc après c’est sur que çà incite à faire des sports outdoor tout en étant en ville finalement. Moi j’aime bien ce coté citadin , de pouvoir sortir, aller au ciné, au resto, en 5 minutes je suis au centre ville voir les copains et de pouvoir profiter en 5 autres minutes d’être sur les chemins et de ne plus les quitter pendant des heures et de vraiment être dans la nature, en campagne. Finalement on est au porte de la ville, donc c’est cet équilibre que j’ai trouvé ici qui me plait vraiment et qui donne cet attrait à l’agglomération.
U : On va pouvoir attaquer maintenant la troisième et dernière partie, comme j’ai expliqué au début, j’interviens auprès des lecteurs de Utrail pour donner des conseils chaussures, et je demande régulièrement l’avis des coureurs élites. J’avais donc envie d’avoir un peu ton sentiment sur la question parce que je sais que tu es très impliqué sur le sujet, tu y portes une grande attention, sûrement du à ta formation professionnelle de kiné dont tu nous as parlé tout à l’heure. Je pense que c’est aussi ce qui t’a amené à vraiment t’impliquer dans le domaine. Donc pour toi c’est quoi des bonnes chaussures de Trail, quel critères il faut vraiment prendre en compte pour choisir sa chaussure ?
TB : C’est compliqué de répondre à çà, parce que c’est adaptable à chaque personne. Si la personne ne veut ni performance, n’ est pas blessée, tout lui convient, si elle a une chaussure lambda, qu’elle garde cette chaussure là. Après si tu cherches la performance, ou que tu as une tendinite, un TFL, un essuie glace, que tu as du mal à t’en débarrasser, avec une chaussure un peu lourde avec beaucoup d’amorti etc… il y aura peut-être un travail derrière à faire de foulée mais aussi chercher une chaussure plus proche du sol avec un peu plus de sensations. Mais après il faut trouver l’équilibre entre une chaussure minimaliste où tu as beaucoup de sensations et le confort que tu recherches parce que tu vas faire une course de 90 km dans les cailloux. Donc au final c’est compliqué de dire cette chaussure c’est la chaussure parfaite.
Donc voilà c’est çà, en fonction de ce que tu recherches, en fonction de tes attentes, de ce que tu vas courir comme course, si il n’y a que du chemin ce ne sera pas la course que dans les cailloux pendant 80km. Donc c’est vraiment compliqué de dire cette chaussure est la meilleure. Après il y a des tendances, c’est à dire qu’il faut quand même aller chercher je pense pour prévenir les blessures et chercher à avoir le plus de sensations possible sur son pied. Pour être le plus possible léger et amortir le plus possible les chocs par son propre système tendino-musculaire.
U : Je suis complètement d’accord avec toi, c’est aussi mon point de vue, et tu m’orientes vers la deuxième question que je voulais aborder. J’ai vu sur les réseaux que tu conseillais à la fin de tes séances d’entrainements de courir pieds nus, je ne vais pas aller jusqu’à dire que tu es un défenseur de la foulée naturelle mais déjà un partisan de cette technique ?
TB : Oui oui je suis un partisan après je suis pas un extrémiste, de courir pieds nus partout à dire il faut courir en Fivefingers toute l’année. On n’ apprend pas à courir et on nous met tout de suite des grosses chaussures aux pieds avec beaucoup d’amorti. Quelqu’un qui commence à courir, on se trompe souvent en lui mettant beaucoup d’amorti et on l’emmène vers des schémas qui sont moins naturels que si on le mettait avec une chaussure assez fine, avec peu d’amorti, ou lui finalement il va directement apprendre naturellement à courir. Donc oui courir pieds nus de temps en temps apporte des sensations qu’on a pas forcément avec les chaussures, on travaille les muscles intrinsèques, on augmente un peu le stress sur notre système mécanique mais c’est à doser aussi, mais j’aime bien le faire sur la piste ou sur l’herbe. C’est quelque chose que je conseille aux gens qui ne sont pas blessés , qui vont bien et qui veulent se renforcer naturellement.
U : Dernière question, pour toi personnellement, quel est ton modèle de chaussure préférée, celle que tu utilises le plus, je pense savoir, mais est-ce que tu peux nous donner ta chaussures de prédilection ?
TB : Moi aujourd’hui je cours qu’avec la Salomon Sense 7, plutôt SG parce que je suis souvent sur les terrains humides, un peu escarpés. Après j’utilise de temps en temps la soft ground quand je vais courir un peu sur route et chemins blancs pas trop compliqués, pas trop boueux. C’est une chaussure qui me va bien, qui est proche du sol avec un drop assez faible un amorti lui aussi assez faible, un cramponnage qu’on peut dire qui est intéressante sur tous les terrains, oui elle me va bien cette chaussure.
U : Oui c’est vrai qu’elle te correspondent bien autant pour ton profil mais aussi par les formats de courses que tu peux faire.
TB : Oui oui c’est ça ! Avec une chaussure comme çà je cours sans problème un Templiers. Une course assez roulante, même sur des parties un peu techniques.Tu peux très bien courir une CCC par exemple. Après si j’allais courir en Corse 100km je réfléchirais. Mais aujourd’hui j’ai trouvé un bon équilibre avec cette chaussure et pour du marathon elle est vraiment parfaite.
U : Super, on a aborder plusieurs domaines, merci pour les réponses que tu m’as données et le temps que tu m’as accordé
J’aime bien finir mes interview avec une dernière question, un peu plus personnelle pour avoir ton avis, ta vision, à l’heure actuelle du Trail, toi comment tu vois ce sport en ce moment ?
TB : Il est clairement en expansion, avec de plus en plus de courses, de plus en plus de coureurs, ça amène beaucoup de gens dehors et sur les sentiers donc c’est une très bonne chose. Il est hyper accessible, il y a plein plein de qualités dans ce sport.
Après sur la partie haut niveau, ça manque encore un peu de structure au niveau des fédérations et peut-être encore de visibilité par rapport aux médias, mais ça reste croissant.
Après le petit point noir c’est les fédérations qui se chevauchent, qui ne s’entendent pas et du coup ça fait un peu de mal. Il faut vraiment se structurer pour faire quelque chose de vraiment top, comme on peut trouver en Athlétisme, comme on peut trouver un peu partout en fait.