L’époque où les coureurs devaient forcément s’identifier comme « homme » ou « femme » sur la ligne de départ est révolue dans de nombreuses grandes courses. Un nombre croissant de marathons — de New York à San Francisco en passant par Boston — proposent désormais une catégorie non-binaire, qui ne se limite pas à une simple case à cocher mais inclut aussi un vrai classement et des récompenses. Une avancée majeure pour le monde de la course à pied, à l’heure où le sport débat de plus en plus de l’inclusion des identités de genre.
De New York à San Francisco, de plus en plus de marathons créent une catégorie non-binaire avec classement officiel. Une avancée majeure pour l’inclusion dans la course à pied. Une évolution amorcée outre-Atlantique
Tout a vraiment commencé en 2022, lorsque le marathon de San Francisco a lancé officiellement sa division non-binaire, avec podiums et trophées à la clé. Ce qui n’était auparavant qu’une mention administrative sur les formulaires est devenu une catégorie à part entière, reconnue par les organisateurs et saluée par les participants.
Depuis, plusieurs grandes épreuves ont suivi le mouvement : le marathon de New York en 2022, celui de Boston en 2023, puis Chicago, Philadelphie et Tokyo. Aujourd’hui, des centaines de coureurs s’inscrivent chaque année dans cette nouvelle division, apportant avec eux un message clair : courir, c’est pour tout le monde.
Un soulagement pour les coureurs concernés
Pour les athlètes non-binaires, devoir choisir entre « homme » ou « femme » lors de l’inscription pouvait provoquer malaise et inconfort, voire les dissuader de participer. Comme l’explique Mimi Hensel, coureuse non-binaire engagée sur le marathon de San Francisco : « Ce n’est pas une raison de courir, mais c’est une façon d’y aller sans me trahir. »
Désormais, les inscriptions respectent l’identité de chacun, sans forcer une appartenance artificielle. Et cela change tout. Il ne s’agit pas de créer un « troisième genre », mais d’offrir plus de liberté et de vérité dans la façon dont on vit sa pratique sportive.
Un choix technique simple, mais symboliquement fort
Du point de vue logistique, rien de très compliqué : « On suit les temps et les classements comme pour toutes les autres catégories », explique Lauri Abrahamsen, directrice du marathon de San Francisco. Pourtant, ce geste en apparence simple représente une prise de position forte, surtout dans un climat où les droits des personnes trans et non-binaires sont remis en question dans de nombreux pays.
Des modèles d’inclusivité dans un sport parfois rigide
Les figures de cette révolution tranquille ont souvent un double engagement : courir, mais aussi militer pour une pratique plus inclusive. C’est le cas de Cal Calamia, vainqueur de la première édition non-binaire du marathon de San Francisco, qui a depuis fondé le premier club de course non-binaire aux États-Unis, le NBRC. En 2025, Cal a laissé sa place de concurrent pour accompagner un coureur malvoyant sur le 10 km, prolongeant ainsi son engagement sur un autre terrain : la solidarité.
Et en France ? Une timide ouverture, mais encore beaucoup de chemin à faire
En France, rares sont les courses à proposer officiellement une catégorie non-binaire avec reconnaissance complète (classement, podium, prix). Certaines épreuves, comme le marathon de Paris, ont récemment ajouté une option « autre » dans les formulaires d’inscription, mais cela ne se traduit pas encore par une division compétitive distincte.
Le trail, pourtant réputé pour sa culture de liberté, reste lui aussi très en retard sur ces questions. Les classements restent binaires, et les règlements ne prévoient souvent aucune alternative. Pourtant, la Fédération française d’athlétisme (FFA) a publié en 2023 une note d’intention en faveur de l’inclusion, sans que cela ait, pour l’instant, été suivi d’effets concrets dans les grands événements.
Les associations LGBTQ+ sportives, comme la FSGL (Fédération Sportive Gaie et Lesbienne), militent activement pour un changement de cap. Mais il manque encore une impulsion forte, soit politique, soit venue des organisateurs majeurs, pour que la France rattrape son retard et rejoigne les grandes capitales internationales sur ce sujet.
Face à la montée de discours hostiles envers les minorités de genre, ces initiatives offrent un contre-modèle réjouissant. « On ne cherche pas à effacer les autres, on veut juste pouvoir être là aussi », résume JL Odom, qui refuse désormais de participer à des courses où il faut choisir entre homme et femme.