Dans nos aprioris sensoriels, on aura toujours tendance à se dire que la course à pied en général, et le trail en particulier sont un peu fermés pour les personnes malvoyantes. D’une part parce que si on ne voit pas où on met les pieds, on aura l’idée que ça peut être très dangereux. D’autre part parce que ce qui nous semble faire l’essence du trail, c’est aussi l’incroyable beauté des paysages qu’il peut nous offrir. On en tirera comme conséquence alors que ça peut ne pas avoir trop d’intérêts d’en faire si notre vue est limitée. Et pourtant…
J’ai souvent eu l’occasion de croiser des coureurs non-voyants sur des grosses courses (notamment aux 20km de Bruxelles), et on voit que même si l’expérience est différente, elle n’en demeure pas moins magnifique pour la personne.
Notamment à la Réunion, plusieurs guides sportifs ont pour vocation à accompagner les personnes en situation de handicap tant dans leurs entraînements que dans l’accomplissement de leurs projets. Et ce qui est chouette, c’est qu’à partir du moment où la relation de confiance est suffisante entre le coureur et son guide, il est possible de déplacer des montagnes (bon, peut-être pas les déplacer, mais au moins les gravir, et c’est déjà énorme). Un quotidien réunionnais raconte notamment l’histoire d’un malvoyant qui pratique le triathlon.
La natation
On découvre ainsi qu’ils s’entraînent à nager en eau libre en étant attachés l’un à l’autre par une corde. Déjà que travailler la technique n’est pas une sinécure en natation, mais si en plus on ajoute une partie de synchronisation, ça devient carrément un deuxième sport.
Le vélo
Ils vont ensuite faire du vélo en tandem. Alors, sachant que c’est un outil adapté à une situation particulière, un tandem aménagé va vite coûter un peu cher (aux alentours de 8000 euros). C’est un peu dommage, car ça va vite être rhédibitoire. Et comme l’explique Annie Amacouty Sidat (du Comité régional Handisport de la réunion), « nous sommes une équipe qui doit se déplacer, mais qui a besoin d’un guide, d’une aide de vie de tous les jours et le matériel est assez couteux. On nous demande d’être performants, mais les aides n’arrivent pas ».
Un peu comme c’est le cas en natation, les deux athlètes doivent non seulement travailler le physique, mais aussi leur coordination, surtout dans les côtes. Un peu à l’image du kayak, si on ne coordonne pas ses efforts, on fait du surplace et on se fatigue pour rien.
Le trail
L’athlète malvoyant explique avec beaucoup de tendresse que son guide, c’est ses yeux. « Nous avons un code entre nous et après j’ai une habitude, je reconnais les sensations des pas du guide. C’est lui mes yeux par rapport aux dangers, s’il y a des racines ou des rochers ». La confiance que cela implique est vraiment quelque chose de très sympa.
Bref, une sacrée expérience de vie qui montre bien qu’à l’impossible nul n’est tenu !