François D’Haene a donné il y a quelques jours une interview dans l’Equipe. Et ce qui est chouette, c’est que le temps a beau passer, on a l’impression d’en découvrir chaque jour un peu plus sur lui.
François d’Haene : une trajectoire atypique
François d’Haene explique que jusqu’à ses 18 ans, il faisait de l’athlétisme à Chambery, et que déjà, il prenait plus de plaisir sur les formats longs (il avait notamment participé plusieurs fois aux championnats de France de cross en cadets et juniors, mais dit ne pas se souvenir de ses classements exacts).
Il explique également qu’il était « capable aussi d’aller grimper un sommet la veille d’un 3000m steeple, de rentrer courbatu, ce qui ne plaisait pas trop aux entraîneurs, qui disaient aussi que faire ça à son âge, c’était s’abîmer ».
François d’Haene : un détachement des chronos
C’est quelque chose qu’on retrouve très souvent chez François, à savoir un désintérêt pour les chronos. En ce sens, il prend un peu le contrepied d’un Kilian Jornet (qui avait déclaré dans une interview il y a quelques semaines que la recherche des records pouvait l’aider à se bouger et à aller s’entraîner quand il fait moche dehors).
Alors, remettons quand même l’église au milieu du village, ce n’est pas parce que les chronos ne l’intéressent pas que ce n’est pas une brute. Comme il le rappelle, il a fait le marathon du Beaujolais trois fois, dont une fois deux semaines après la diagonale des fous, et il a mis 2h31…
François d’Haene n’aime pas le fractionné
Quand on avance un peu dans l’interview, on s’aperçoit en fait que ce n’est pas tant le chrono qui ne l’intéresse pas, c’est plus l’entraînement requis pour. Comme il l’explique : “c’est l’entraînement en lui même qui me met des hauts le coeur. Je n’ai pas envie de fractionner sur la route qui passe devant chez moi, j’ai envie de découvrir des sentiers, des chemins. OK ! Sur le GR20 en Corse, j’ai battu un record (31h06), mais c’était davantage le jeu des partenaires. Mon truc à moi, c’était d’aller au bout en une seule fois).”
Quand on a des capacités naturelles absolument extraordinaires, effectivement, on peut avoir le luxe de faire l’économie du fractionné. Mais pour les gens normaux, malheureusement, on est un peu obligés de passer par là, rien que pour finir des ultras.
Interrogé sur le mélange des genres entre routes et trail, François explique que ce n’est pas trop son truc. Et en soi, c’est normal. Encore une fois, à notre niveau, c’est assez « facile » d’alterner la route et le trail au gré des préparations (on peut encore intégrer des trails à une préparation marathon, même si au fur et à mesure que le temps passe, je me rends compte que ce n’est pas une super idée). En revanche, au niveau de D’Haene, Jornet ou Kipchoge, c’est autre chose.
Comme il l’explique, si les marathoniens « viennent en montagne, ils se fracasseront les quadriceps », pour la simple et bonne raison « qu’on ne peut pas tout faire ». Et même dans le trail, c’est difficile de tout faire. « C’est segmentariser en fonction du profil et des distances ; Douze heures ou vingt-cinq heures de course, ce n’est pas la meme histoire. Ce sont des pratiques différentes ». Et en cela, il a totalement raison. On ne va pas préparer et participer à Sierre-Zinal, à un Ultra-marin ou à une diagonale des fous de la même manière (à moins qu’on ait envie de mourir).
François d’Haene après le confinement
Enfin, interrogé sur l’avenir de la course à pied, François botte un peu en touche : « Que va provoquer le confinement ? On peut aussi faire son sport seul. Se tester, se découvrir. Dès que je vais pouvoir, je vais repartir courir loin ; J’avais deux objectifs majeurs, ils vont peut-être ou sûrement être annulés. Mais je me faire des défis tout seul et très heureux ainsi, sans avoir à me comparer à quelqu’un. La course ouvre des tas de possibilités. Chacun peut trouver chaussure à son pied ; il y en a pour tout le monde ».
On retrouve ici bien la philosophie de François qui, en soit, me plait beaucoup, à savoir que le trail, c’est avant tout plus une compétition face à soi que face aux autres. Et j’irais même plus loin, pour moi, le trail, c’est une compétition face à soi-même en partenariat avec les autres. Les adversaires ne sont pas les autres coureurs. Après, je dois bien avouer qu’en dehors des courses, j’ai toujours du mal à ne pas me mettre en compétition face à moi-même.