Journal d’un confiné, J 8/9/10
Dimanche, j’ai profité d’une panne assez brève du net dans la matinée pour me forcer à faire toute une journée sans réseaux sociaux et sans chaîne info. Je n’avais pas soupçonné à quel point ça pouvait faire un bien fou. Heureux les simples d’esprit, dit-on. Je ne pensais pas que ça pouvait être aussi vrai. Bizarrement, ce silence, mêlé au confinement, aide à l’idée qu’on est probablement à l’aune d’un nouveau monde, où rien ne sera plus jamais comme avant (ou du moins, où on espère que des choses changeront).
Même si le stress est relativement gérable et commence à venir majoritairement au moment où le soleil se couche, je dois bien avouer qu’à chaque fois qu’une ambulance passe devant chez moi, j’ai toujours une petite partie de moi-même qui se saisit en me disant que ça n’augure rien de bon pour un pauvre homme qui n’a probablement rien demandé. Et à chaque moment de stress, c’est la même chanson, avec l’impression que j’ai tous les symptômes de la maladie.
Ce que j’ai appris à faire dans ce cas, c’est le check corporel. Cette technique, que j’utilise en trail quand j’ai l’impression d’être au bout de ma vie, consiste à interroger d’abord chaque symptôme indépendamment les uns des autres, puis à interroger chaque partie du corps et vérifier si elle va bien, toujours indépendamment des autres. Touchons du bois, pour le moment, ça suffit.
Et si plus rien ne se déroulait en 2020 ? Plus de concert, plus d’événement sportif, plus de festival, plus de trails ? Malheureusement, l’idée commence à faire son chemin ; c’est peut être de la méthode coué, me dis-je. Dans un sens, je suis presque content de pas avoir été tiré au sort pour l’UTMB, je l’aurais vraiment eu mauvaise dans le cas où il serait annulé.
Hier, j’ai profité du dimanche pour aller courir un petit peu ; il faisait beaucoup moins beau que les autres jours de la semaine (j’ai réussi à me prendre, en sortant à peine une heure, à me prendre une tempête de grêle ; bah ça pique). Ça montre bien que tous les grands malins qui ont commencé à courir juste parce que c’était limité et interdit sont des c***.
Parti courir, il faisait moins beau et bizarrement y’avait personne. Ça montre bien que tous les imbéciles qui ont commencé à courir juste parce que c’était interdit sont des cons.
Ça va faire deux semaines aujourd’hui que le confinement a commencé, et toujours, la même chose ; est-ce que j’ai chopé cette saleté ? Soit je m’en suis pas aperçu (ce qui est possible), soit pas encore. Mais c’est fatigant, j’ai l’impression qu’à chaque fois que je dois sortir faire mes courses, je peux recommencer mon compteur de 15 jours…
Ce lundi midi, une discussion intéressante sur les conceptions de la société qui peuvent émerger de la manière dont on vit le confinement. Loin de l’hystérie des réseaux sociaux, prendre le temps de réfléchir, de se parler et de s’écouter est assez agréable.
Plus le confinement approche, plus je me rends compte d’à quel point ça ressemble en pas mal de points à un ultra.
Notamment au niveau de la gestion de la solitude. On se rend compte aussi que la fatigue mentale n’a rien à envier à la fatigue physique (chaque personne qui a déjà couru un ultra sait probablement de quoi je parle). On sait bien que ça finira par passer, même si ça peut durer très longtemps et qu’on a l’impression de n’en voir jamais la fin. On broie du noir, et on peut même devenir un peu parano. Alors on utilise la solution du dialogue interne qui consiste à transformer le négatif en positif. Plutôt que de détester la situation, de se dire qu’on n’a pas choisi ce qu’on vit, on essaie d’en profiter (ou du moins d’en tirer profit) et de voir quels bénéfices on peut en tirer. Car d’office, il peut y en avoir. Ou alors si on est frustrés de ne pas pouvoir faire ce qu’on voudrait, alors on profite que ce n’est pas possible pour mieux le planifier, le préparer, et le rendre aussi unique que possible. Bête exemple, mais si la randonné nous manque, on peut profiter qu’on a le temps pour se prévoir un trek un peu plus loin de chez nous que d’habitude.