UTMB 2025 : des sentiers abîmés, une montagne qui tire la sonnette d’alarme
Après le passage de plus de 10 000 traileurs sur les pentes du Mont-Blanc durant la semaine de l’UTMB, certains coureurs alertent sur l’état des sentiers, appelant à repenser l’équilibre entre sport, nature et format de course.
Rassembler des coureurs du monde entier autour des valeurs de paix, de dépassement de soi et de fraternité : c’est la promesse de l’UTMB.
Une promesse largement tenue. Mais au lendemain de cette grande fête du trail, une question dérange refait surface : la montagne peut-elle encaisser un tel flux humain, surtout dans des conditions météo dégradées ?
Quand le trail laisse des traces… trop visibles
Nicolas Thevenin, coureur engagé, a publié un message sans détour après avoir terminé l’édition 2025 de l’UTMB. Pas de polémique gratuite, mais un constat lucide : « Le GR entre Notre-Dame de la Gorge et le Lac Combal est détruit. Nous avons laissé derrière nous un champ de boue visqueux. »
La météo n’a rien arrangé. La pluie persistante a transformé certains secteurs en véritable bourbier. Et quand plus de 10 000 coureurs empruntent, les uns après les autres, les mêmes tronçons de sentiers durant toute la semaine, les dégâts deviennent inévitables. Ghislain, autre participant, abonde : « Les sentiers sont défoncés. J’ai été choqué par le nombre de déchets laissés derrière. »
Un choc pour les coureurs eux-mêmes
Ce qui marque, cette fois, c’est que l’alerte vient de l’intérieur même du peloton. Des coureurs chevronnés, amoureux de leur sport, qui s’interrogent désormais sur sa soutenabilité. Ce n’est pas un pamphlet extérieur, c’est une auto-critique.
On a pu lire sur notre page « Ce matin, je suis un peu triste. Est-ce que mon sport, c’est vraiment ça ? »
On n’est plus dans l’euphorie de l’arrivée, ni dans la recherche du buzz. Juste dans une réflexion sincère. Le trail n’est pas qu’un sport, c’est une philosophie. Courir libre, en pleine nature, loin du bitume et du bruit. Mais que reste-t-il de cette philosophie quand les chemins alpins sont labourés comme après le passage d’un troupeau ?
Des formats à repenser sur l’UTMB ?
La question n’est pas nouvelle, mais elle devient pressante. Faut-il limiter le nombre de participants ? Réduire la taille des pelotons ? Créer plus de vagues de départs ? Organiser des parcours plus résilients, moins fragiles écologiquement ?
À mesure que le trail grandit, la pression sur les sentiers s’intensifie. Et certains territoires peinent à suivre. L’UTMB, malgré une organisation millimétrée, ne peut rien contre la boue, l’érosion et l’impact de milliers de semelles sur un sol gorgé d’eau.
Ce débat entre spectacle, sport de masse et respect du milieu naturel devient central. L’UTMB est un vecteur d’inspiration pour toute une génération. Mais pour continuer d’exister sur le long terme, il faudra sans doute écouter ces signaux faibles, ces voix venues du terrain.
Un sport en quête d’équilibre
Le trail est un sport magnifique. L’UTMB est une célébration unique, un sommet d’émotion et de partage. Mais peut-on encore se permettre de fermer les yeux sur son impact ? Derrière la ferveur, les médailles et les larmes d’arrivée, il y a des sentiers. Et ces sentiers, eux, n’ont pas voix au chapitre.
Il ne s’agit pas de jeter la pierre, ni de sombrer dans le catastrophisme. Il s’agit de prendre conscience, de redescendre à des formats plus conformes à ce que la montagne peut réellement encaisser.
Résumé
L’UTMB ne réunit pas seulement 2 500 coureurs sur la grande boucle : plus de 10 000 traileurs participent aux différentes courses de la semaine, et une grande partie d’entre eux emprunte les mêmes sentiers. Résultat : une sur-fréquentation soudaine, concentrée en quelques jours, avec un impact environnemental bien plus massif que la fréquentation classique des 200 randonneurs quotidiens. L’article interroge la soutenabilité de ce modèle et appelle à repenser l’organisation pour préserver les sentiers.
FAQ
Q : Combien de traileurs empruntent les sentiers pendant l’UTMB ?
R : Pendant la semaine de l’UTMB, environ 10 000 coureurs participent aux différentes courses (UTMB, TDS, CCC, OCC, etc.). Sur le parcours principal du Tour du Mont-Blanc (TMB), plus de 2 500 coureurs empruntent le sentier d’un seul coup rien que pour l’UTMB. La majorité passent entre le vendredi soir et le dimanche matin, soit un pic de fréquentation massif et concentré en 36 heures.
Q : Combien de randonneurs fréquentent ces sentiers en dehors de l’UTMB ?
R : Le Tour du Mont-Blanc est l’un des sentiers les plus parcourus d’Europe. On estime qu’entre 10 000 et 20 000 randonneurs le réalisent chaque été, entre juin et septembre. En moyenne, cela représente entre 100 et 200 randonneurs par jour sur les mêmes portions de sentier (Notre-Dame de la Gorge, Col du Bonhomme, Lac Combal…).
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Q : Est-ce que les traileurs abîment plus les sentiers que les randonneurs ?
R : Oui, principalement à cause de l’effet de masse et de la concentration temporelle. Quand 2 500 coureurs passent sur un sol détrempé en quelques heures, l’impact mécanique est énorme, notamment en descente (érosion, tassement, boue, dégradation des pierres). À l’inverse, les randonneurs se répartissent sur plusieurs mois, avec des pas plus lents, un poids souvent réparti sur la semaine, et un bivouac plus diffus.
Q : Est-ce que les traileurs laissent plus de déchets que les randonneurs ?
R : Les traileurs sont généralement sensibilisés à l’environnement, et des consignes strictes sont données. Mais le rythme de course, la fatigue, les emballages de gels ou barres énergétiques, et parfois la négligence, provoquent des pertes de déchets involontaires, bien plus visibles qu’en randonnée. Les bénévoles nettoient, mais certains coureurs eux-mêmes, comme Nicolas Thevenin, déplorent une recrudescence de déchets cette année.
Q : Faut-il limiter le nombre de coureurs pour préserver les sentiers ?
R : C’est une question ouverte. L’UTMB met en place des quotas, mais l’ampleur du peloton reste impressionnante. Certains appellent à une réduction des formats, ou à des parcours alternatifs plus résilients, pour éviter de saturer certains tronçons fragiles comme le GR5 entre Notre-Dame de la Gorge et le Col du Bonhomme.
Q : Y a-t-il des exemples de dégradation documentée après l’UTMB ?
R : Oui. Après certaines éditions particulièrement humides (comme 2021, 2017 et 2025), des bénévoles et des gardes du parc rapportent des sentiers transformés en bourbier, nécessitant des travaux de réfection. Le passage des traileurs, surtout dans la boue, provoque des rigoles d’érosion et détruit la couche végétale. Ces impacts sont plus intenses mais plus ponctuels que ceux des randonneurs.
Q : Quelle est la responsabilité de l’organisation ?
R : L’organisation de l’UTMB travaille avec des communes, des offices de tourisme et des gestionnaires d’espaces naturels pour réparer les sentiers après la course. Des conventions de réhabilitation existent. Mais la question reste : à quel coût environnemental et logistique peut-on continuer ?
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Cet article repose sur des témoignages publics de coureurs ayant participé à l’UTMB 2025, librement exprimés sur les réseaux sociaux. Il s’inscrit dans une démarche journalistique d’analyse, de réflexion et de questionnement sur l’impact environnemental des grands événements de trail. L’objectif n’est pas de nuire à l’image de l’organisation UTMB®, mais d’ouvrir un débat constructif sur la cohabitation entre sport de masse et préservation des sentiers. Les faits rapportés sont documentés, les opinions sont citées, et les chiffres sont sourcés. uTrail reste indépendant de toute structure commerciale ou institutionnelle liée à l’UTMB®.